En dépit des perturbations causées par les partisans de l'ancienne direction, le nouveau conseil local de l'Ordre des architectes de la région de Constantine, composé de dix wilayas, a été élu le 29 septembre en présence d'un huissier de justice. Depuis août dernier, c'est le cinquième conseil local qui élit une nouvelle direction en attendant, ceux de Ghardaïa et Batna. Ce dernier sera probablement le moins facile, étant donné qu'il s'agit du fief de l'ex-président du conseil national de l'Ordre des architectes, Khaled Benboulaïd, déchu par décision de justice. Avant de terminer son mandat, Benboulaïd a subi un retrait de confiance de la part d'une majorité des membres. C'était en octobre 2010, à la suite d'une crise qui avait provoqué le blocage du conseil. Les frondeurs reprochaient au président, entre autres, de n'avoir jamais présenté de bilan, d'avoir gelé de fait les activités de l'organisation et aussi d'avoir créé des conseils parallèles au niveau de chaque wilaya, contrairement aux dispositions statutaires, explique Noureddine Khelfi. Il a cependant fermement résisté sur son siège de président, aidé en cela par l'ex-ministre de l'Habitat, Noureddine Moussa, avant que la justice ne tranche en faveur des frondeurs, ordonnant à Benboulaïd de quitter le siège du conseil, situé à Aïn Allah, et de transférer le pouvoir à OthmaneTouileb, désigné nouveau président à l'issue d'une session extraordinaire du conseil tenue le 1er mars 2012 au siège du ministère de tutelle. Ceux qui connaissent le milieu saisissent l'enjeu de cette bataille, l'Ordre des architectes ayant été ramené depuis longtemps dans le giron du pouvoir et utilisé par les uns comme moyen de bénéficier de faveurs et décrocher des marchés, par d'autres à l'effet de s'assurer la caution de la corporation à des politiques souvent discutables. La bataille a été longue et le chemin pour la reconstruction et l'organisation de la corporation semble semé d'embûches. Les luttes intestines se traduisent par des procès en cascade. OthmaneTouileb a été d'ailleurs condamné par un tribunal pour «faux, usage de faux et usurpation de fonction» sur plainte de l'ancienne direction, qui fut condamnée par la même justice à quitter le conseil ! Dans ce procès autour de la légalité ou pas de l'assemblée qui a élu Touileb, le juge a appelé un seul témoin à la barre, un fonctionnaire du ministère pourtant absent lors de l'assemblée en question, alors que tous les membres électeurs étaient présents dans la salle d'audience ! Par ailleurs, on attend que le Conseil d'Etat tranche l'affaire opposant l'actuelle direction à l'ex-ministre de tutelle autour d'une décision prise par celui-ci en avril 2011, autorisant des architectes étrangers à exercer en Algérie. Décision qui avait soulevé un tollé chez les architectes algériens. Après des années d'effacement de la vie publique et de soustraction de son rôle d'instrument de régulation des pratiques d'architecture et d'urbanisme, l'Ordre des architectes serait-il en train de redorer son blason ? Le nouveau conseil a, en tout cas, du pain sur la planche.