Berceau de l'identité culturelle et témoin du passage successif de plusieurs civilisations : romaine, byzantine, musulmane et ottomane, le vieux Mila a subi, un quart de siècle durant, des agressions de toutes sortes et des dégradations qui ont terni le patrimoine architectural de cette cité millénaire classée officiellement comme patrimoine national en 1992. Résolument prônée par un groupe d'initiés et amis du vieux Mila, l'idée de réhabilitation de l'antique Milev, largement partagée par le wali de Mila, Djamel Eddine Salhi, très réceptif au demeurant au principe de promotion dudit site, est en maturation depuis près d'une année. L'acte de naissance du projet est signé à l'occasion du mois du patrimoine culturel (avril-mai 2005) avec l'organisation d'une Journée scientifique et culturelle consacrée au thème « Mila à travers l'histoire » et à laquelle ont pris part d'éminents historiens, chercheurs et hommes de science et de culture. C'est à partir de ce rendez-vous, qui se voulait une opportunité de sensibilisation, que la proposition technique d'un pan d'occupation des sols (POS) du vieux Mila a reçu l'aval du wali. L'inscription officielle du POS étant acquise, la direction de l'urbanisme et de la construction confiera le projet au bureau d'études techniques Hadidji et Kara Mostefa qui devra livrer, cet été, son étude élaborée sur la base d'un système d'information géographique. « La quête assidue des moindres données afférentes à ce type de projets (levé topographique, enquête socioéconomique et enquête sur les différents réseaux : AEP, électricité, assainissement et gaz) est impérative », dira le directeur de l'urbanisme et de la construction. Réconcilier Mila avec ses origines L'oreille tendue des pouvoirs publics provoquera un déclic salvateur parmi les initiateurs du projet qui prendront à bras le corps le travail de préparation de l'environnement et établiront des contacts avec les propriétaires des vieux fours qui ont produit jusqu'aux années 1980 les matériaux de construction traditionnels (tuile, brique pleine, chaux, etc.) Théâtre de stratification de civilisations millénaires, Mila a surtout besoin de synergies constructives aptes à aider à la création d'une vie sociale intra-muros, maintenir les habitants, concrétiser le rêve d'installation d'une maison d'artisanat, sauvegarder et mettre en valeur la vieille ville de Mila et le riche patrimoine architectural qu'elle recèle, et enfin, créer une curiosité touristique contraire à la notion dévalorisante de « cité-dortoir ». Le souci de rassemblement de toutes les informations et documents contribuant à préserver la mémoire et l'histoire de la vieille ville, la nécessité d'implication de la population pour passer à une étape supérieure et cohérente du projet de restauration du site, la reconstitution du cadre bâti dont 26% est en ruine sont les autres aspects qui sous-tendent les objectifs de la dynamique de réhabilitation. Il s'agit aussi, selon les promoteurs du projet, de créer une symbiose en matière de coopération entre le POS du vieux Mila et le POS de la direction de la culture concernant la restauration de la mosquée de Sidi Ghanem. Ce grand monument historique, construit par le compagnon du Prophète, Aboumouhadjir Dinar en l'an 55 après l'hégire, est, pour rappel, la plus ancienne mosquée d'Afrique après celle de Kairouan (Tunisie). C'est dans cette vision futuriste de réconcilier le vieux Mila avec ses origines qu'est née, en décembre dernier, l'association dénommée Les Amis du vieux Mila, véritable cheville ouvrière que dirige de main de maître le professeur et non moins député Addelkrim Segueni. Un deuxième groupe devant s'occuper de l'aspect de l'hygiène à l'intérieur de l'enceinte sera lancé. La vieille ville de Mila, qui étend son manteau sur 7,20 ha est occupée à présent par 267 familles regroupant quelque 1389 âmes. Mila, contemporaine Sur les 267 constructions, 46 sont implantées à l'extérieur de la muraille. La citadelle abrite entre autres 24 locaux et équipements et 126 logements dont 71 inoccupés. Les grandes lézardes et les mutilations visibles sur les façades des maisons, les dénivellements des pavés et l'état lamentable de la câblerie et des pylônes électriques qui datent des années1950, dénotent que ce haut lieu historico-culturel a subi bien des déprédations et perdu beaucoup de son aura. Le plus important, résumera Abdelkrim Segueni, est de se mettre à l'œuvre et éviter les erreurs du passé, avant d'ajouter : « La partie est jouable pour peu qu'il y ait conjugaison de tous les efforts, surtout que l'administration locale et l'autorité de tutelle ont décliné leur adhésion au projet de réhabilitation du vieux Mila. » En somme, un rêve, qui après le longues années de disettes, est en train d'épouser les contours d'une réalité qui gagne en audience et qui ne manquera pas de se profiler nettement à la faveur du mois du patrimoine prochain où des rencontres d'évaluation de la première phase dudit projet sont prévues à cet effet.