Dans une lettre adressée au président Bouteflika par le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), dont le siège est à New York, Ann Cooper, directrice exécutive « proteste énergiquement contre la promulgation récente d'un décret limitant davantage la liberté d'expression et fixant des limites draconiennes aux débats sur le conflit qui a ravagé l'Algérie durant les années 1990 ». Cette ONG interprète le décret interdisant aux familles des victimes et aux médias le droit d'enquêter sur les crimes et les atteintes aux droits de l'homme comme « une tentative flagrante d'empêcher l'écriture de l'histoire ». Le CPJ affirme aussi : « Les dispositions de ce décret sont promulguées avec une telle rapidité qu'elles en sont assimilées à une censure et à une tentative de contrôler l'investigation et l'écriture de l'histoire. Cette nouvelle loi est d'autant plus embarrassante qu'elle coïncide avec une escalade de la persécution des journalistes dans l'exercice de leur métier. » Cette organisation étaye ses dires par « la confirmation en appel de la condamnation à 6 mois de prison ferme de Hakim Laalam du Soir d'Algérie, pour avoir offensé Votre Excellence ». Elle rappelle, dans la foulée, le cas de Kamel Boussad, directeur d'Errissala, arrêté le 8 février et Berkane Bouderbala, directeur d'Essafir, arrêté le 11 février pour « insulte du Prophète et critique de l'Islam ». Le caricaturiste Ali Dilem a, lui aussi, été condamné à un an de prison ferme pour diffamation. La lettre ajoute : « Si aucun de ces journalistes n'a purgé sa peine de prison, Bachir Larabi d'El Khabar a été emprisonné. De plus, le CPJ reste profondément préoccupé par le cas de Mohamed Benchicou emprisonné sur des accusations de violation de la loi sur la monnaie. Nous sommes persuadés que ces accusations sont venues en représailles des critiques du Matin envers Votre Excellence et envers quelques-uns de vos puissants ministres. » Ann Cooper précise : « Le recours à de fausses accusations de droit commun et à l'emprisonnement des journalistes place l'Algérie très près des régimes qui tournent le dos aux standards internationaux de la liberté de la presse. » Le CPJ demande au président Bouteflika de « révoquer le décret du 27 février et de s'assurer que soit mis un terme au cycle d'emprisonnement et de harcèlement des journalistes ».