Le dossier de l'ex-wali de Blida, Mohamed Bouricha, vient d'être transféré à la Cour suprême, avons-nous appris de bonnes sources. Le procureur général devra désigner un magistrat instructeur pour finaliser l'enquête sur ce fonctionnaire de l'Etat. La procédure ne prendra que quelques jours, selon les mêmes sources. L'article 573 du code de procédure pénale couvre les fonctionnaires de l'Etat par ce qui est appelé « le privilège de juridictions ». Théoriquement, le magistrat instructeur reprendra les charges déjà retenues par le parquet général de Blida, qui a achevé une enquête préliminaire qui a duré dix mois. Les principaux griefs retenus contre Mohamed Bouricha et d'autres personnes sont, entre autres « dilapidation de deniers publics », « faux et usage de faux », « abus de pouvoir », « corruption », « usages de deniers publics à des fins personnelles » et « atteinte au foncier agricole ». La Cour suprême décidera de la juridiction qui prendra en charge le procès. La compétence territoriale de la cour de Blida n'est pas concernée. Contacté hier, maître Mustapha Farouk Ksentini, avocat-conseil de Mohamed Bouricha, a estimé que la procédure suivie jusque-là est correcte et réglementaire. « Au niveau de la Cour suprême, le procureur général décidera soit de classer l'affaire soit de demander au juge d'instruction, désigné parmi les membres de la cour, d'ouvrir une information », a-t-il précisé. Interrogé sur les charges retenues contre son mandant, il a déclaré qu'une vérification est nécessaire. « Une fois chez le juge d'instruction, je vais avoir accès au dossier », a-t-il ajouté. En plus de Me Mustapha Farouk Ksentini, qui est également président de la Commission nationale de promotion et de protection des droits de l'homme (organisme officiel), l'ex-wali de Blida est assisté aussi par Me Boutarek Omar. L'affaire de Mohamed Bouricha a éclaté, en mai 2005, lorsque le promoteur immobilier Messaoud Hadji l'avait cité. Il avait déclaré au juge avoir offert deux villas à l'ex-wali en contrepartie d'un vaste terrain à Khazrouna, à la sortie nord de Blida, remboursable sur 25 ans. L'ex-wali a expliqué au procureur que l'octroi de ce terrain s'est fait « dans la légalité » et pour « encourager l'investissement » dans la région. Il a affirmé avoir « acheté » les villas avec une « certaine » facilité de paiement. Le fonctionnaire de l'Etat est également cité dans un scandale, évoqué par la presse, lié à la surévaluation de factures d'achats de vêtements pour des familles pauvres de quatre communes de Blida et pour la vente d'une marchandise au CHU Frantz Fanon. Impliqué dans le scandale, Djamel Boukrid, un commerçant connu dans la Mitidja, est toujours en fuite. Un mandat d'arrêt national a été lancé contre lui. Ce commerçant aurait cédé, dans des conditions troublantes, une villa à Chenoua, sur la côte de la wilaya de Tipaza, à l'ouest d'Alger. Durant l'été 2005, Mohamed Bouricha a été auditionné à trois reprises par le procureur général de Blida. Autant que d'autres personnes, dont un conseiller au ministère de la Justice. Accusé dans l'affaire pour « trafic de véhicules », et après quatre mois de détention, Abdelilah Bouricha, le fils du wali de Blida, a été libéré en octobre 2005, mais placé sous contrôle judiciaire par la chambre d'accusation près la cour de Blida. Un conseil à la Présidence de la République a bénéficié des mêmes mesures. Détenu dans le cadre de cette affaire à ramifications, le patron de la marque Jutop est toujours sous les verrous. Mohamed Bouricha, qui a été installé à la tête de la wilaya en 1999, a été forcé de démissionner de son poste de wali de Blida le 10 mai 2005, après l'éclatement du scandale. Blida est restée pendant presque une année sans premier responsable jusqu'à la nomination de Hocine Ouadah à ce poste, le 12 mars 2006, à la faveur d'un mouvement partiel dans le corps des walis.