Le hasard fait bien les choses et la rencontre de Yasmine Ammari (fille du chanteur Bouzid Ammari), musicienne, avec Sabrina Aïci, poétesse, peut s'avérer prometteuse mais dans le domaine du théâtre, cette fois. La deuxième a élaboré un texte qu'elle a intitulé Chems, le soleil noir et, étant à la recherche de quelqu'un pour un support musical, elle tombe, grâce à des amis communs, sur Yasmine qui est également la nièce du dramaturge Abdelkader Alloula. Tous les ingrédients sont réunis pour « passer à l'acte » et proposer un spectacle. Le groupe d'amis, dont quelques éléments ont déjà eu une petite expérience dans le domaine grâce à l'opérette imaginée par le musicien de Jazz manouche, Francis Moerman, se sont mis au travail avec l'aide du CCF. « Quand j'ai lu le texte de Sabrina, j'ai tout de suite été séduite, à tel point que dès que je me suis mise au piano, les mélodies me venaient à l'esprit comme une révélation », raconte Yasmine lors d'une séance de répétition, à la rue Mostaganem, dans l'appartement de feu Alloula. La grande pièce, qui fait office de salle de répétitions, était particulièrement animée ce jour-là, car la troupe était au grand complet et chacun de ses éléments devait affiner sa prestation pour une première représentation prévue fin mars (le 30) au TRO. Sur les murs, hormis quelques icônes de l'ancien temps, l'on peut distinguer un tableau d'une série de Zoheïr Boukerche, un peintre mystique révélé au début de la décennie 90 mais dont la flamme semble avoir été éteinte depuis. Justement, le thème de la pièce théâtrale est tellement particulièrement grave, que cette œuvre picturale semble avoir attendu tout ce temps-là pour susciter de l'intérêt. Du noir, il y en a dans la théorie « pyramidiste » du peintre mais aussi dans la pièce, même si les dualités humanité/vie, ange/diable, raison/folie, etc. sont bien distinctes. Cette œuvre, mise en scène par les jeunes eux-mêmes, comporte 11 passages musicaux chantés par la fille prodige du chanteur classe le spectacle dans la catégorie théâtre en chansons, mais qui laisse une large part à l'expression individuelle des personnages, tous symboliques, à commencer par Chems, l'humanité. « La Raison est le juste milieu entre le bien et le mal et mon rôle consiste à guider Chems dans ses passions », confie Djihane au sujet de son rôle. Yasmine qui interprète l'ange s'attelle à « montrer le bon côté des choses » et, pour Imène, sa doublure, il s'agit simplement d'« apporter un soutien pour éviter le désespoir. » Hormis Réda, Ahlem et Amina sont également distribuées. « Etant au courant de tout ce qui va se passer tout le long du récit, comme si je racontais une histoire, le rôle de la vie sert à déclencher les duels », atteste l'une de ces dernières. Alors que Massi, dont le personnage chargé d'écrire l'histoire, est le témoin principal de l'histoire, Menouar Benzaza joue le bibliothécaire dépositaire de toute la connaissance humaine d'où vont émerger tous les protagonistes de cette fable imaginée par Sabrina, la graine de poétesse admiratrice d'Amélie Nothambe. Chems, le soleil noir jeudi 30 mars au TRO, écrite et mise en scène par Sabrina Aïci, musique de Yasmine Ammari