La chambre d'accusation près la cour d'Alger a reporté sa décision hier à une date ultérieure pour permettre aux 18 prévenus d'être informés des nouveaux faits contenus dans les réponses de la dernière commission rogatoire datée du 12 novembre dernier et d'entendre leurs remarques en présence de leurs avocats. C'est hier que la chambre d'accusation près la cour d'Alger devait rendre sa décision relative à l'affaire Sonatrach. En fin de journée, et contre toute attente, les avocats ont été informés du renvoi du délibéré pour une date ultérieure, non arrêtée. De nouveaux faits seraient apparus dans l'affaire à la lumière d'une nouvelle commission rogatoire dont les réponses sont intervenues le 12 novembre dernier. Ainsi, selon une source judiciaire, la chambre d'accusation a estimé : «Avant de trancher le fond de l'enquête complémentaire, il est nécessaire de notifier aux prévenus les résultats de la commission rogatoire auxquels est arrivé le parquet général près la cour d'Alger, en date du 11 novembre 2012, et d'entendre leurs remarques en présence de leurs avocats, et ce, sous la direction de la présidente rapporteuse de la chambre d'accusation.» En clair, cette juridiction veut informer les prévenus des nouveaux éléments apparus dans l'enquête à la faveur des réponses d'une commission rogatoire, obtenues durant la période où l'affaire était en délibéré. Il est fort probable que le parquet ait pu avoir d'autres informations relatives à Réda Hameche, l'ancien chef de cabinet de l'ex-PDG de Sonatrach, Mohamed Méziane, et proche collaborateur de Chakib Khelil, ex-ministre de l'Energie. La date de cette confrontation avec les prévenus n'a pas été arrêtée, mais n'exclut pas sa programmation pour la semaine prochaine. Le juge d'instruction, faut-il le rappeler, avait correctionnalisé les faits et décidé d'un non-lieu pour trois prévenus, sur les 18 poursuivis, avant que la même chambre d'accusation ne lui demande un complément d'enquête axé sur des points précis liés aux biens détenus à l'étranger et en Algérie par l'ensemble des mis en cause. Apportant de nouveaux faits ayant été à l'origine de l'inculpation du «blanchiment d'argent» que le juge a retenue à l'encontre de plusieurs inculpés, parmi lesquels l'ancien PDG de Sonatrach, Mohamed Méziane, ses deux enfants, Fawzi et Mohamed Réda, ainsi que l'ancien PDG du CPA, Hachemi Meghaoui, son fils Yazid, exerçant au profit d'une société allemande représentée à Alger par Al Smaïl Mohamed Réda qui, lui-même, est également poursuivi pour plusieurs chefs d'inculpation, dont blanchiment d'argent. A la faveur des nouveaux éléments apportés par le doyen des juges parisiens, et les auditions des prévenus durant la période comprise entre le 29 juillet et le 6 août derniers, de nouveaux éléments apparaissent dans le dossier de rénovation de l'immeuble de Sonatrach situé à Ghermoul, à Alger, et pour lequel sont poursuivis Nouria Meliani, la responsable du bureau d'études CAD, bénéficiaire du marché, Mohamed Sanhadji, directeur central de l'exécutif à Sonatrach, Abdelwahab Abdelaziz, qui était son adjoint et également au département commercial de la compagnie. Contre ces deux cadres, le juge avait retenu les charges de «passation de contrat en violation avec la législation des marchés publics dans le but de donner des avantages injustifiés». Des inculpations retenues également contre Méliani, et ce, en plus du délit «d'augmentation injustifiée des prix». Ainsi, dans ses dernières conclusions, le juge fait état de «faits avérés» de deux transferts de fonds du compte de la directrice du bureau d'études vers ceux de Réda Hameche et son épouse domiciliés en France, ainsi que l'octroi, à cet ancien homme de confiance de Chakib Khelil, d'un véhicule de marque Mercedes (toujours en France). Le magistrat revient sur le marché d'un montant de 4,530 milliards de dinars, que le bureau d'études a obtenu «sans respecter la réglementation, notamment les dispositions de la R15». Réalisé à 50% seulement, ce marché ainsi que d'autres auraient été attribués à CAD grâce à l'aide que lui a apportée Réda Hameche, ajoutant que ce dernier est également intervenu pour lui faire régler des factures en suspens au niveau de la compagnie. Le magistrat indique par ailleurs que les états de mouvement des comptes de la directrice de CAD, transmis dans le cadre de la commission rogatoire, font état de nombreux virements (en devises) surtout entre 2008 et fin 2001, que la prévenue n'aurait pas pu justifier. Le magistrat soupçonne la directrice de faire dans «le blanchiment d'argent» «vue l'importance des montants» transférés et des biens immobiliers qu'elle aurait acquis à l'étranger. De ce fait, il a recommandé «une enquête approfondie» sur le dossier CAD et sa patronne ainsi que sur Réda Hameche étant donné qu'il (le juge) était limité (dans son enquête) par les questions (de la chambre d'accusation). Devant la chambre d'accusation, les avocats des 18 prévenus vont contester les qualifications des faits établis par le juge, alors que le représentant du parquet a plaidé «la criminalisation» du dossier. Visiblement, les nouveaux faits apportés par les réponses de la commission rogatoire du 12 novembre dernier risquent de changer le cours des événements de cette affaire qui a fait couler beaucoup d'encre et pour laquelle quatre sociétés sont poursuivies en tant que personnes morales, Contel-Funkwerk, Contel Algérie, Funkwerk Biletac et Saipem Contracting Algérie, pour «corruption, augmentation injustifiée des prix et participation à passation de marché en violation de la loi».