Le marché financier, pour plusieurs raisons pas nécessairement pertinentes, ne se présente pas encore dans cette étape de l'organisation de l'économie comme une alternative au marché du crédit. Il s'ensuit que celui-ci reste incontournable en accaparant la plus grande partie pour ne pas dire la totalité du financement des entreprises. Les emprunts obligataires émis à ce jour totalisent 117,5 milliards de dinars, ce qui n'est pas très significatif par rapport au crédit bancaire dont le volume a atteint plus de 1800 milliards de dinars à fin 2005. Cette situation reflète les caractéristiques des économies d'endettement où le financement de l'économie est assuré à 100% par le marché du crédit, c'est-à-dire les banques. Le crédit constitue en moyenne 80% des actifs et des activités des banques. C'est dire l'importance de l'intermédiation bancaire dans ce marché. Le canal bancaire n'est pas près de céder ses parts au marché financier malgré les risques essentiellement de contreparties qu'elles encourent et les sanctions en termes de provisionnement des créances improductives alors que partout dans les pays émergents celles-ci préfèrent passer par le marché financier, ce qui leur permet de transférer les risques sur ce marché pour ne pas à avoir à supporter des charges additionnelles et coûteuses en fonds propres. C'est aussi une technique de réduction des risques. Il reste que pour se dégager d'une telle emprise, il faut réorienter les modes de financement des entreprises en continuant de booster le marché financier dans son compartiment obligataire (titres de taux) qui s'est soudainement essoufflé après une effervescence en 2004-2005 où il a enregistré dix huit emprunts, exclusivement émis par les entreprises publiques. Le secteur privé n'est pas encore convaincu par les opportunités d'investissement qu'offre la Bourse. Et là, on revient à la case départ, c'est-à-dire aux formes de financement que privilégie l'économie dans sa structuration actuelle. En attendant que la bourse retrouve son chemin naturel, force est de constater que le marché du crédit s'est beaucoup développé ces dernières années dans ses déclinaisons institutionnelles. Les pouvoirs publics ont ainsi conforté les banques en créant des caisses de garantie du crédit aussi bien en direction des PME-PMI qu'en direction des entreprises de grande taille et en mettant à la disposition des opérateurs de nouveaux instruments de financement tels que le leasing qui connaît actuellement un développement remarquable d'autant que la législation algérienne sur le crédit-bail est des plus évoluées dans le bassin méditerranéen. En plus de l'aspect institutionnel, des mécanismes modernes de financement de l'investissement apparaissent ou vont apparaître sur le marché, il s'agit de la titrisation et du capital-risque. Dans le même sillage et dans une perspective de diversifier l'offre de placement par un décloisonnement du marché aussi bien pour les entreprises qui dégagent des surplus que les banques, de nouveaux instruments financiers s'imposeront sous forme de titres de créances négociables. Dans sa configuration actuelle et à venir, le marché du crédit dispose maintenant de toute l'instrumentation pour être plus efficient. Cette diversification des sources de financement en termes de maturité permet de financer aussi bien le haut du bilan ( investissement) que le bas du bilan (fonctionnement). La multiplication des dispensateurs de crédit entre banques, établissements financiers, caisses de garantie des investissements, sociétés de capital-risque, société de leasing, caisse de financement des marchés publics, microcrédit, zakat, touiza, etc. allège le poids du crédit sur les banques et induit un partage des risques entre tous ces intervenants sur le marché du crédit à partir du moment où en cas de non-remboursement, c'est le garant, c'est-à-dire les organismes de garantie, qui se substituera aux contreparties défaillantes. La vulnérabilité des banques sera atténuée et elles pourront alors développer d'autres offres de crédit avec des montages appropriés et ciblés suivant la demande la clientèle. Seulement, toute cette mécanique lourde doit, pour qu'elle puisse fonctionner efficacement et permettre au marché du crédit de se développer encore mieux pour le bien de l'économie nationale, être bien huilée et bien pilotée. Jamais par le passé en Algérie, les conditions d'un bon décollage n'étaient aussi favorables qu'aujourd'hui, la demande de crédit est réelle mais s'exprime mal, l'offre de crédit existe et ne cherche qu'à être mieux canalisée ; entre les deux, il y a la volonté des pouvoirs publics de sortir de ce marasme qui ne sert personne. L'imagination savamment utilisée conciliera tous ces atouts et fera prospérer les efforts des uns et des autres.