par Fouzia Belkichi La détente récente des marchés donne lieu, en cette période estivale, à un retour sur les causes et les origines de cette hausse vertigineuse qui a secoué le monde. La crise est bel et bien là. Non pas la crise économique. Mais la crise financière. Une crise boursière. Une crise de liquidités. Une crise de capitaux. Une crise bancaire. À tout moment, cette crise, qui n'affecte pour le moment que le secteur financier, peut se transformer en une tornade qui dévastera l'économie mondiale. On a déjà dépassé le stade du battement d'ailes de papillon cher à la théorie du chaos. Ce n'est, toutefois, pas le grand soir. Juste un phénomène inhérent au capitalisme où les excès et les bulles s'ajustent de manière spontanée. Mais il n'y a pas de capitalisme efficace sans une régulation adaptée. Il n'y a pas de vrai libéralisme si l'environnement ressemble à un "laisser-faire". C'est pour cette raison que la Réserve fédérale américaine surveille l'évolution de l'économie américaine comme on surveille le lait sur le feu.Mais le pire c'est que cette crise, localisée aux subprimes, s'est vite transformée en une crise de liquidités, du fait d'un marché de l'argent asséché. Pour se procurer les capitaux nécessaires à l'exercice de leur métier, les banques ont dû vendre tout ce dont elles pouvaient se débarrasser (actions, obligations, immobilier…). Car la caractéristique de la crise boursière qui déferle depuis l'été dernier, c'est qu'en raison de l'absence d'acheteurs, il existe toute une série d'actifs pour lesquels il est impossible de trouver un prix de référence. La communauté financière internationale commence à réaliser qu'avec la mise en œuvre de ces normes, elle a ouvert une véritable boîte de Pandore. Car ces pertes pour une bonne part virtuelles viennent réduire les fonds propres des banques et donc leur capacité à prêter. Ce qui accroît encore davantage l'assèchement du marché des liquidités, de l'accès au crédit et joue donc le rôle d'un amplificateur de crise dont chacun se passerait bien par les temps qui courent. Il ne s'agit pas de contester ici une forme de régulation du capitalisme, mais de s'interroger sur la pertinence de ces normes qui s'appliquent à 7 000 sociétés cotées dans le monde. D'autant qu'elles n'ont été décrétées par aucun gouvernement. Elles ne sont issues d'aucun processus démocratique. Elles ont été émises et instaurées par un sympathique "club" de comptables aguerris regroupés au sein d'une institution internationale, l'IASB, qui n'a de compte à rendre à personne, mais dont les règles s'imposent à tous. Il existe peu d'exemples dans le monde où une institution disposant d'aucun contre-pouvoir puisse de son propre fait changer les règles du jeu du capitalisme. Sans mesurer les conséquences dramatiques que ses modifications peuvent avoir sur les résultats des institutions financières, sur la quantité de crédit mise à disposition des entrepreneurs et, in fine, sur la bonne marche de l'économie. En voilà un de plus. Ce n'est pas faire injure au libéralisme de souhaiter que les démocraties reprennent vite la main sur la comptabilité, sans laquelle la confiance des investisseurs ne peut exister de manière durable. Ce n'est pas seulement une question conjoncturelle liée à la crise du moment. C'est un problème structurel. De la comptabilité dépendent les faits et gestes des grands groupes, comme les humeurs des marchés financiers, c'est-à-dire des acteurs de la mondialisation. C'est donc une question bien trop cruciale pour être laissée aux mains d'une poignée de professionnels, fussent-ils dotés de la meilleure volonté du monde.