Le Syndicat national des magistrats (SNM) a appelé hier, par la voix de son président, Djamel Aidouni, «au renforcement de l'indépendance de la magistrature», précisant «qu'il s'agit bien de la magistrature et non de la justice» dans la prochaine révision constitutionnelle, sans pour autant expliquer cette nuance. Lors d'une conférence de presse animée deux jours après la réunion du conseil national, M. Aidouni a déclaré que son organisation syndicale a proposé de nombreux amendements qui «consacrent», dans la prochaine Constitution, «la séparation des pouvoirs». Selon lui, les magistrats «souhaitent la mise en place de nouveaux mécanismes qui reflèteront une réelle indépendance de la justice». Une revendication, a-t-il noté, qui ne date pas d'aujourd'hui, mais déjà formulée depuis la création du SNM, vers la fin des années 1980. Il a écarté tout lien entre cette revendication et les affaires politiques et partisanes qui ont alimenté la presse ces derniers temps. Il a indiqué que ces propositions ont d'ailleurs été soumises à la commission de concertation politique présidée par Abdelkader Bensalah. «La supervision des élections par les magistrats a été une de nos propositions. Mais après deux expériences, législatives et communales, des insuffisances sont apparues. Il est donc important d'élargir les prérogatives de cette commission pour les rendre plus efficientes.» M. Aidouni a estimé que la mission de supervision «a été confinée dans trois articles d'un décret, alors que celle de la commission politique a été définie dans 17 articles. Pourtant, entre les deux, il y a une grande différence. Les juges sont en amont et en aval de l'opération électorale et ont pour rôle de la superviser et non pas juste de constater, comme cela est le cas pour la commission politique de surveillance. La responsabilité qui leur incombe est de loin plus importante. Nous ne voulons pas que l'autorité du magistrat soit fictive ou purement formelle. De ce fait, nous voudrions qu'il y ait des amendements au niveau du code électoral afin d'élargir les prérogatives de la commission de supervision et de la rendre plus efficace du début de l'opération électorale jusqu'à la fin et ce, loin de toute considération politico-politicienne». Aidouni a également plaidé pour la refonte du statut du Conseil supérieur de la magistrature, souhaitant qu'il soit présidé par le premier président de la Cour suprême et non pas par le ministre de la Justice, qui représente le pouvoir exécutif. Il a affirmé en outre que dans leur majorité, les magistrats veulent que «les pressions qu'ils subissent soient réduites à travers une protection juridique et judiciaire». Il a également revendiqué une «autonomie matérielle» du juge et pourquoi pas, a-t-il dit, «la consécration d'un budget autonome du pouvoir judiciaire comme cela est le cas pour certaines institutions de l'Etat». Interrogé sur la présence du ministre de la Justice, Mohamed Charfi, à la réunion du conseil national du syndicat, M. Aidouni, a répondu : «Il est venu à la fin et s'est déclaré disposé à trouver des solutions à nos préoccupations. Nous ne pouvons que saluer cette initiative.» Selon lui, «il faudra 10 à 15 ans» pour venir à bout du contentieux légué par Tayeb Belaïz, avec lequel les relations étaient tendues. Sur la question des rapts d'enfants, Djamel Aidouni s'est déclaré pour la peine capitale contre les auteurs d'infanticides, notamment lorsque ces crimes sont précédés de violences sexuelles. «Tous les citoyens exigent la peine de mort aux tueurs et violeurs d'enfants. Non seulement nous sommes pour cette peine, mais nous voulons qu'elle soit appliquée», a-t-il déclaré, rappelant au passage la revendication des juges relative à l'opportunité de la plainte lorsqu'il s'agit de délits économiques. «La loi de 2006 ne permet pas au juge de s'autosaisir en cas de délit économique si la société mise en cause ne dépose pas plainte…» Sur les accusations de fraude portées contre des membres de la commission de supervision, M. Aidouni a déclaré : «Je vous défie de trouver un seul PV d'un juge entaché de faux. Les juges ont fait leur travail dans des conditions extrêmement difficiles, dans des bureaux où des partis politiques n'étaient même pas capables d'avoir des représentants. Ils n'avaient qu'à être là pour contrôler les urnes !»