L'image classique que l'on a du médecin du sport est cette personne qui surveille les compétitions sportives et qui intervient sur le terrain lorsqu'un sportif se blesse. S'ensuit alors un examen rapide et, selon les cas, le sportif sera évacué hors de l'aire de jeu, où reprendra la compétition après un bref glaçage. Cet aspect est en soi un véritable métier nécessitant un sens aigu de l'observation du mécanisme de la blessure et une grande maîtrise de l'examen clinique. Si le médecin décide d'une reprise immédiate, sa responsabilité est engagée. S'il décide l'évacuation, commence alors une prise en charge du sportif jusqu'à la reprise au niveau initial de performance. Cette prise en charge peut durer quelques jours à quelques semaines, voire quelques mois selon le type de blessure. Ce travail de terrain nécessite donc beaucoup d'expérience et de connaissances cliniques et, surtout, une grande maîtrise de soi, car la pression est énorme. Pression du public, de l'entraîneur, de l'arbitre et du sportif lui-même qui souhaite reprendre son activité au plus vite. Cet aspect de la discipline ne représente que la partie visible de l'iceberg. En fait, la médecine du sport ou médecine de l'homme en mouvement possède bien d'autres aspects comme toute spécialité multidisciplinaire. Il incombe donc au médecin du sport la responsabilité du certificat de non-contre-indication à la pratique sportive. Certificat qui sera établi après un examen médical minutieux, tenant compte de l'état de santé du sujet, mais également de l'activité physique et de ses exigences. Le médecin du sport devra également évaluer l'aptitude physique par des examens variés et, notamment, par des épreuves d'efforts, selon des protocoles appropriés, pertinents et validés. Examens ayant comme objectif l'évaluation de la performance mais également la recherche de signes de surcharge ou d'inadaptation à l'effort. Ce certificat engage totalement la responsabilité du médecin, particulièrement face aux accidents graves et à la mort subite du sportif. Le médecin du sport a pour rôle également d'éduquer les sportifs en matière de santé pour qu'ils apprennent à mieux connaître leur corps, à le préparer à l'effort par des échauffements adaptés, à assouplir les articulations sans les léser, à renforcer la musculature sans excès, à affiner la coordination gestuelle, à manger de façon variée et suffisante. Il a aussi le devoir de les instruire de la façon la plus complète sur les effets et les conséquences de la prise de substances interdites. Le médecin du sport se doit aussi de maintenir un contact permanent auprès des dirigeants et des cadres sportifs. Cela, dans le but de protéger la santé des sportifs par la limitation des charges d'entraînement et par l'usage de matériaux sportifs moins traumatisants. Il intervient également dans le cursus de formation des futurs entraîneurs et éducateurs sportifs, dans le but d'une collaboration étroite entre médecins et entraîneurs. Plus récemment, notre pays est entré de plain-pied dans une transition épidémiologique qui a vu l'émergence de maladies chroniques, dites non transmissibles. Ces maladies sont la toute première cause de mortalité dans le monde. 35 millions de personnes sont décédées de maladies chroniques en 2005. 80% de ces décès sont survenus dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. 16 millions de décès ont touché des personnes de moins de 70 ans. La mortalité due aux maladies non transmissibles devrait encore augmenter de 17% au cours des dix prochaines années. C'est surtout parmi les populations pauvres et défavorisées que l'incidence de ces maladies augmente rapidement, creusant encore les écarts sanitaires entre les pays et dans les pays. Il ressort des données épidémiologiques actuellement disponibles que quatre types de maladies non transmissibles (maladies cardiovasculaires, cancers, affections respiratoires chroniques et diabète) contribuent le plus à la mortalité dans la plupart des pays à revenu faible ou intermédiaire et doivent faire l'objet d'une action coordonnée et concertée. Elles peuvent en grande partie être évitées par des interventions efficaces dirigées contre les facteurs de risque qu'elles ont en commun, à savoir le tabagisme, une mauvaise alimentation, l'usage nocif de l'alcool et la sédentarité. La médecine du sport en Algérie, à l'instar des autres pays du monde a élargi son champ d'intervention à ces maladies. Le médecin du sport s'est donc vu attribuer la lourde charge d'utiliser les effets de l'activité physique pour améliorer la santé des malades atteints de pathologies chroniques ou ceux présentant des manifestations psychosomatiques liées au stress. Toutes ces fonctions ne peuvent être réalisées avec qualité que si le médecin reçoit une formation spécifique, englobant tous les aspects qui concernent l'effort physique et la santé. Cette formation a été mise en place à l'Université d'Alger depuis maintenant presque trente ans. Au terme des études de médecine, la spécialisation en médecine du sport se fait sur quatre années d'études, sanctionnées par un diplôme d'études médicales spécialisées (DEMS) en médecine du sport. Plusieurs promotions de médecins du sport sont actuellement réparties dans les deux principaux services de médecine du sport (CNMS actuel sous tutelle du MJS et service de médecine du sport et rééducation fonctionnelle EHS Dr Maouche ex-CNMS sous tutelle du MSPRH) ainsi que dans les fédérations spécialisées. Ces médecins, formés avec les deniers de l'Etat algérien, sont actuellement à la disposition de l'ensemble du mouvement sportif national quel que soit le niveau de pratique. Les évaluations ainsi que les soins dispensés dans ces deux établissements sont aux normes internationales, de qualité et entièrement gratuits comme le sont les soins dans tous nos établissements publics. L'on peut s'étonner alors qu'il règne une anarchie totale dans le contenu et dans la délivrance des certificats de non-contre-indication à la pratique sportive à l'égard des sportifs toutes catégories et tous niveaux confondus. Des examens coûteux et le plus souvent inutiles sont demandés à des sportifs sans revenus et parfois issus de milieux modestes. Pire encore, certains dirigeants de club se voient orientés d'emblée vers des structures privées à «label international», mais ne disposant d'aucun médecin titulaire du diplôme d'études médicales spécialisées en médecine du sport ou titre reconnu équivalent par l'université algérienne. Au regard de toutes ces anomalies, il semble imminent d'entamer une large concertation entre tous les acteurs concernés par la prise en charge médicale du sportif (ministères, services médicaux, fédérations sportives, dirigeants de clubs, sociétés savantes et experts) afin de remédier au plus vite à cette situation préjudiciable à la santé du sportif, à l'image de la médecine algérienne et à l'image du service public.