Que peut le Quartette (Etats-Unis, Europe, Russie et ONU) appelé à se réunir, alors que sa propre feuille de route comporte une approche biaisée, ou encore partiale comme le soutiennent les Palestiniens avec vigueur ? Ces derniers n'en veulent pour preuve que ce comportement d'un seul côté, et plus précisément la victime à laquelle il est demandé davantage de concessions. Pendant ce temps, le ministre israélien de la Défense, Shaoul Mofaz, annonçait hier un durcissement de la répression israélienne contre les Palestiniens, une répression aveugle puisqu'elle a entraîné la mort de deux enfants palestiniens depuis vendredi. Depuis vendredi soir, 16 Palestiniens ont été tués dans des raids aériens et des bombardements israéliens de la bande de Ghaza. De son côté, le président palestinien toujours partisan d'un règlement négocié a appelé lundi Israël à mettre fin à sa tentative d'isoler le cabinet dirigé par le mouvement Hamas, et a exhorté la communauté internationale à aider à concrétiser le rêve d'un Etat palestinien indépendant. Prenant prétexte dans l'accession au pouvoir du Hamas, Israël a accentué ses pressions en coupant tout contact avec l'Autorité palestinienne devenue, une rupture qui existe dans les faits depuis 2002, mais qui bénéficie cette fois de l'appui de l'Union européenne et les Etats-Unis qui ont suspendu les aides directes au gouvernement palestinien. M. Abbas s'est déclaré décidé à contrer à tout prix ces mesures. « Nous demandons au gouvernement israélien de mettre fin à ces mesures qui ne visent qu'à isoler l'Autorité palestinienne », a-t-il affirmé, dans une allocution télévisée. « Nous ne l'accepterons pas, nous ne permettrons pas qu'elles deviennent une réalité. Nous sortirons de cet isolement à tout prix », a-t-il poursuivi. « Nous disons au gouvernement israélien, nous sommes une nation pacifique, mais nous voulons nos droits », a ajouté M. Abbas. « Nous sommes favorables à la feuille de route, ce qui veut dire un Etat indépendant, sans mur (de séparation) et colonies, pour une solution équitable au problème des réfugiés, pour vivre en paix et en sécurité dans cette région », a-t-il dit. « Est-ce là trop demander ? », s'est-il interrogé. L'appel s'adresse davantage au Quartette qui croit détenir la solution avec sa feuille de route, bien que lui-même n'ait jamais tenu ses propres engagements. Il a au contraire laissé faire Israël avec son mur de séparation, considéré comme une frontière de fait. Plus que cela, ce forum s'est montré incroyablement sourd à la décision du nouveau Premier ministre israélien Ehud Olmert de fixer unilatéralement les frontières du futur Etat palestinien après l'avoir préalablement dépecé et privé de certains territoires. D'un autre côté, le CICR (Comité international de la Croix-Rouge) traditionnellement réservé, a décidé d'intervenir lui aussi en estimant que la décision des Etats-Unis et de l'Union européenne de suspendre l'aide au gouvernement palestinien pourrait aggraver les souffrances de la population et susciter un regain de violence. « Même si le CICR est prêt à intensifier ses activités pour venir en aide à la population palestinienne, ni lui ni aucune autre organisation humanitaire ne peut remplacer les autorités dans leur rôle de prestataires de services publics », a expliqué Pierre Krdhenbùhl, directeur des opérations du CICR, de retour d'une mission d'une semaine sur place en Cisjordanie, Ghaza et Israël. M. Krdhenbùhl a refusé de se prononcer sur « le contenu politique » de la décision de Washington et de Bruxelles. Cet aspect « est entièrement du ressort des gouvernements concernés », a-t-il déclaré à la presse. « Mais le CICR est très inquiet des conséquences possibles sur le terrain, en ce qui concerne une détérioration de la situation humanitaire et des conditions de sécurité », a-t-il ajouté. Les Palestiniens, a-t-il souligné, sont déjà confrontés à « des difficultés extrêmes » en raison d'une crise économique aggravée par les obstacles aux mouvements de marchandises et des personnes mis par les Israéliens pour des raison de sécurité. Suspendre l'aide pourrait entraîner une « crise humanitaire plus large », a-t-il conclu. Dans un communiqué, le CICR souligne aussi que d'après le droit international humanitaire, « c'est à l'Etat d'Israël qu'incombe la responsabilité de satisfaire les besoins fondamentaux de la population civile dans les territoires occupés », dont la nourriture et les fournitures médicales. En outre, ajoute le Comité, « le droit prescrit à tous les Etats parties aux Conventions de Genève de permettre le libre passage de l'aide humanitaire essentielle ». Cela rappelle à bien des égards, le rapport de la mission onusienne conduite en 2004 , par le Suisse Jean Ziegler qui avait dénoncé le chantage alimentaire. Quelques mois auparavant, le secrétaire général de l'ONU en personne mettait en garde contre le risque de chaos dans les territoires palestiniens. Ce sera davantage de désespoir. Le Quartette prendra t-il ce risque ?