On s'attendait vaguement à quelque chose, un peu à rien, mais certainement pas à ce phénomène de foire. Aux dernières mauvaises nouvelles, Amar Saïdani serait pressenti pour être le prochain patron du FLN. On s'en rappelle peut-être, Amar Saïdani avait été accusé, quand il était président de l'APN, de plusieurs détournements chiffrés à des milliards de dinars, pris sur le fonds du développement agricole, en compagnie d'autres hommes d'Etat qui n'ont jamais été inquiétés. Ce n'est pourtant pas le problème, les Algériens ayant pris l'étrange habitude de voir leurs dirigeants se servir directement dans la caisse à coups de pelleteuses. Le problème, s'il en est un, est que ce Amar Saïdani, qui va probablement diriger le parti issu de la glorieuse indépendance, a commencé sa carrière comme drabki de mariages, c'est-à-dire un joueur de derbouka qui officiait dans les cérémonies. Frappant et frappant, il a fini par entrer au FLN par la porte de la cuisine pour connaître la carrière qu'on lui connaît. Dans la décadence générale qui frappe désormais les hommes et les institutions nationales, on ne devrait pas s'étonner qu'un drabki puisse devenir le leader du premier parti algérien, en attendant qu'un clown de cirque devienne président, ministre ou général-major. L'acte de cooptation en cours ici a valeur de symbole, la derbouka, comme le tar, tbel ou djembé, est un instrument classé dans les percussions, qui ont cette particularité d'émettre un son quand on les frappe. Si un drabki homme politique de premier plan est une absurdité, elle rejoint au fond cet autre paradoxe où l'Etat continue à frapper indistinctement chômeurs du Sud ou du Nord, syndicalistes algériens et maghrébins, participant à la même mécanique administrative. Le rythme est le même, celui de cette nouvelle année. Frappez, battez, il n'en sortira rien, à part du bruit. Ce qui n'a rien à voir avec la musique.