- En 2006, vous initiez le Festival du conte d'Oran. En sept ans d'existence, le festival s'est fait un nom… J'avoue que c'est le rendez-vous incontournable des Oranais. Notre programme est bien ficelé, les conteurs vont dans les écoles et au théâtre régional et les centres culturels, afin de rencontrer leur public. Le conte n'est pas seulement pour les enfants, mais aussi pour les adultes, puisqu'il a plusieurs messages : la paix, l'humanisme, la société, etc. On ne s'est pas figé sur le conte ancien, mais aussi sur le contemporain qui relate la vie de tous les jours. Même si nous pensons qu'il y a un manque de production de livres jeunesse.
- Pensez-vous qu'il y a de moins en moins d'auteurs en livres jeunesse ?
En Algérie, il est difficile de faire des livres exclusivement pour les enfants. Le beau livre est assez onéreux, et les éditeurs sont face à un dilemme, éditer de beaux livres, c'est se confronter à l'absence de réelles politiques de lecture, le réseau de distribution est défaillant. Il n'y a pas assez d'espaces de lecture et de bibliothèques dans les communes, puisque ce sont ces dernières qui achètent le plus de livres. De ce fait, l'éditeur n'arrive pas à donner au jeune public un livre relevant les défis de l'esthétique et le contenu. Il y a bien certains qui se sont lancés dans cette édition particulière, mais souvent ça laisse à désirer. Par ailleurs, il y a une aide à la création, ce qui contribue à l'achat de centaines d'exemplaires par le ministère de la Culture, auprès des éditeurs.
- Manque-t-on réellement d'auteurs jeunesse ?
Il y a un bon nombre de personnes qui écrivent ou voulant écrire pour les jeunes, mais il y a aussi un manque d'encouragement. Dans notre association, quand il y a des projets d'édition, on trace une ligne budgétaire pour démontrer que si on met les moyens dans un tel projet, les résultats sont concrets à long terme. Il est important de souligner qu'il y a une écriture pour les enfants et une autre pour les adolescents. On n'écrit pas assez pour ces derniers, il n'y a pas assez de romans jeunesse, c'est une réalité.
- L'association Le petit lecteur a édité une série de livres de contes multiculturels…
Effectivement, nous avons édité plusieurs livres de contes rassemblant à la fois les contes anciens et contemporains. Nous comptons beaucoup sur les ateliers thématiques, car ils incitent les enfants à poser des questions, et notre rôle est de les orienter vers le livre et le goût de la lecture.
- Le Festival du conte d'Oran a, depuis le début, reçu des conteurs atypiques, à l'exemple de Jorus Mabiala et Mahi Seddik. Qu'apportent-ils dans leurs contes ?
Jorus apporte dans ses contes l'Afrique, la vie d'un enfant africain, il met des personnages d'animaux qui parlent et d'enfants pour aborder les crises politiques et les tabous. Ce conteur amène avec lui une richesse qu'il offre aux enfants. C'est dans cet esprit d'interculturalité que les contes vivants développent les grandes valeurs humaines. Pour Mahi Seddik, conteur et troubadour de Sidi Bel Abbès, on plonge dans les histoires de notre terroir. Il a cette gestuelle théâtrale qui nous fait voyager dans le temps et dans l'espace.