Que signifie la désertification pour vous ? Quels sont les causes et les facteurs aggravants en Algérie ? Rappelons tout d'abord que depuis la Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement (CNUED) à Rio en 1992, la communauté internationale a reconnu que la désertification est un phénomène environnemental global qui demande une mobilisation mondiale. Bien que le terme de désertification continue à faire l'objet de nombreux débats et controverses, la définition actuellement retenue reconnaît que l'impact néfaste de l'homme est la cause première de la désertification. La désertification est la dégradation des terres dans les zones arides, semi-arides et sub-humides sèches, résultant principalement de l'activité de l'homme. Elle intègre un certain nombre de processus qui aboutissent à l'appauvrissement des sols et de la végétation là où l'activité humaine est le facteur principal. En tout état de cause, le phénomène de désertification est la résultante d'interactions complexes entre différents facteurs physiques, biologiques, socioéconomiques et culturels. La désertification constitue donc un problème d'environnement et un problème de développement. Ses effets ont un retentissement très négatif sur l'environnement local (biodiversité, faune, flore, ressources en eau...) et sur le mode de vie des populations. L'Algérie fait partie d'une région bioclimatique où les zones sèches constituent la majeure partie du territoire (littoral : 2% ; steppe : 11% ; Sahara et oasis : 87%). Ce qui induit une grande précarité de la productivité biologique variant au gré d'une grande variabilité interannuelle du climat. La zone steppique est actuellement très menacée par le phénomène de désertification. La région ouest en particulier est considérée zone rouge au vu de la dégradation de la couverture végétale, de la faiblesse qualitative et quantitative des ressources en eau, de l'exacerbation des mécanismes physiques à la surface du sol, de l'érosion et de l'ensablement. Les causes immédiates sont nettement identifiées : il s'agit du surpâturage, de la mise en culture inappropriée et des prélèvements excessifs. Cet écosystème est de plus en plus fragilisé par l'accroissement de la pression humaine. Les causes fondamentales restent d'abord la croissance démographique, la pauvreté et la crise économique ainsi que le cadre institutionnel et le choix de développement. On comprend donc qu'un ensemble de facteurs agissent de manière combinée à différentes échelles spatiales et temporelles. Cette analyse implique que les actions de lutte doivent nécessairement s'appuyer sur un diagnostic fiable de l'état de l'environnement local en intégrant l'identification des responsabilités et des intérêts respectifs de tous les acteurs. A cet effet, la convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (ratifiée par l'Algérie le 22 janvier 1996) est reconnue comme un instrument de développement. Elle permet aussi de contribuer à l'élimination de la pauvreté. On souligne à juste titre le caractère particulier de cette convention basée sur une approche intégrée. Quelles sont les techniques de lutte contre la désertification utilisées en Algérie ? Y a-t-il des insuffisances ? Quelle stratégie peut-on alors imaginer ? En réalité, l'Algérie a été amenée, très tôt après l'indépendance, à réaliser un programme de protection et de valorisation de son espace naturel (volontariat de reboisement, mais surtout l'opération barrage vert en 1971). Les différents plans quadriennaux et quinquennaux ont permis le reboisement et la gestion des ressources naturelles tout en visant le développement économique et social des populations. Cette opération de grande envergure devait avoir des résultats plus importants. D'autres opérations sont menées également par le Haut commissariat au développement de la steppe (HCDS créé en 1981) qui intervient beaucoup plus en préservant les terres de parcours par la mise en défens et dont le programme consiste à lutter contre la forte dégradation des terres et l'érosion des sols en réhabilitant les parcours et l'agriculture surtout dans les espaces steppiques mais aussi dans certaines oasis. Cette expérience est encore jugée insuffisante car elle ne couvre qu'une partie des terres dégradées. Elle nécessite surtout une évaluation des impacts. Tous ces efforts doivent être soutenus car au-delà de l'utilisation de techniques appropriées il faut plusieurs mesures d'accompagnement visant spécialement le changement économique et social en s'inscrivant dans le processus de développement. Il faut également et surtout rechercher plus de cohérence au niveau de toutes les institutions nationales en charge du problème de désertification afin de tirer avantage de toutes les opportunités offertes aujourd'hui à l'intérieur (schéma d'aménagement du territoire, option Hauts Plateaux, option Sud) comme à l'extérieur (approches conceptuelles globales et cadre international de la convention) du pays. Quel bilan peut-on faire de l'expérience en matière de recherche scientifique ? Il faut tout d'abord rappeler que les approches scientifiques et techniques constituent un maillon fondamental dans la lutte contre la désertification. Ces approches reposent sur une connaissance approfondie des mécanismes et des processus de désertification et sur le développement d'indicateurs et d'observatoires. Les recherches scientifiques doivent, d'une part, évaluer et mesurer l'état de dégradation des terres afin de diagnostiquer la gravité du problème, et d'autre part, mesurer l'impact des actions de lutte entreprises sur le territoire. Les résultats des recherches menées à ce jour en Algérie ne peuvent être généralisés ni intégrés dans des problématiques très larges car les travaux sont généralement limités dans le temps et dans l'espace. Il est à noter que les analyses des problèmes socioéconomiques et biophysiques étaient considérés avec des liens insuffisants. Malgré une importante participation des chercheurs dans ce domaine on note un faible niveau de connaissances de ces milieux. Nous ne pouvons développer ici tous les aspects qui donnent lieu à de nombreuses recherches mais l'extension croissante des phénomènes de dégradation des terres a créé le besoin de mettre au point des outils d'évaluation de surveillance. En effet, la recherche propose des moyens et des méthodes pour évaluer et suivre le processus de désertification à travers les indicateurs, l'utilisation de l'outil spatial et les observatoires. L'expérience de l'Observatoire du Sahara et du Sahel dans le cadre du programme ROSELT (réseau des observatoires de surveillance de l'environnement à long terme) a été confortée. Ce programme ayant été domicilié au Centre de recherche scientifique et technique des régions arides a permis la mise en place d'un réseau national des observatoires en Algérie en intégrant tous les secteurs. Ce réseau d'observation à long terme utilise des méthodologies de collecte et de transfert de données compatibles dont l'objet consiste à condenser un grand nombre d'informations en quelques mesures compréhensibles pour aider à décider des actions à enclencher. Ce réseau s'inscrit comme une contribution essentielle à la compréhension des phénomènes d'environnement en liaison avec la problématique des changements globaux et du développement durable et de la lutte contre la désertification.