Les voyageurs, près de 100 000 par jour, se plaignent des retards et du confort sommaire sur les quais. La Société nationale des transports ferroviaires (SNTF) a gardé ses habitudes: ses trains n'arrivent jamais à l'heure. Les voyageurs de la banlieue algéroise ne comptent plus les heures perdues sur les quais. «J'étais obligé d'attendre plus d'une heure sur le quai du Caroubier par un temps pluvieux. J'ai pris mon ticket à 9h05, le train devait passer, comme c'est inscrit, à 9h25. L'attente a duré plus d'une demi-heure. C'est hallucinant. Cette société ne veut plus de clients», raconte, blasé, un voyageur qui devait rallier la gare Agha, à partir de la gare du Caroubier. Le jeune trentenaire, employé d'une société privée au centre-ville, a toujours préféré prendre le train. «J'ai toujours préféré le train. Les rames sont propres et les gens sont moins stressés. Dans les bus privés de Garidi ou de Baraki, on a l'impression d'être parqués comme du bétail. A part cet avantage, la SNTF n'offre rien à ses clients. Les retards : c'est le problème que doit régler en priorité cette société», suggère-t-il. Pour les voyageurs, venir plus tôt que d'habitude est la seule manière d'arriver à l'heure. «Je préfère sortir de chez moi plus tôt. Comme ça le retard qui s'accumule à attendre un hypothétique train est compensé. Le matin, la cadence est plus rapide qu'en milieu de journée. Le soir, c'est le calvaire, le dernier train de 18h30 peut venir plus tard. Des voyageurs arrivent chez eux à 20h passées», relève le voyageur de la banlieue. Les retards des trains de banlieue, qui transportent près de 100 000 voyageurs quotidiennement, sont dus à des problèmes techniques, aux accidents qui surviennent sur le réseau et aux mouvements sociaux cycliques des cheminots. «L'intervalle entre deux trains est, habituellement, d'une demi- heure, excepté les week-ends, où la durée est plus importante. Les trains de Thenia et El Affroun en une journée normale se suivent à des intervalles de 5 minutes. Les voyageurs sont informés par le guichetier de tout retard pour qu'ils prennent leurs dispositions», relève un agent de la société, qui fait les cent pas sur le quai, un gobelet de café fumant à la main. Cette affirmation est battue en brèche par les voyageurs. La société, à de rares exceptions, n'informe pas les clients des retards et ne les rembourse jamais. «A part les agents de la gare Agha et du terminus du port, les autres guichetiers n'informent pas les clients d'un éventuel retard. C'est à peine s'ils annoncent régulièrement l'arrivée et le départ des trains», s'indigne un voyageur qui prend son train à Blida. Les voyageurs, en plus du retard, souffrent du confort sommaire sur les quais : les bancs rouillés, cassés sur des quais souvent laissés aux quatre vents. «La SNTF a un mobilier qui date du début des trains à vapeur. Le hall de la gare Agha laisse passer des trombes d'eau. Un accident d'électrocution, dû aux infiltrations d'eau, peut vite arriver. Mais qui s'en soucie ? Les bancs des gares en fer ne sont jamais remplacés. Et dire que la société a ouvert ses infrastructures aux annonceurs. L'opérateur de téléphonie Nedjma a placardé ses publicités sur les quais. Cela fera sûrement des rentrées d'argent conséquentes pour la société qui vit des subventions publiques. La prise en charge des clients doit suivre. Ce qui m'a toujours intrigué c'est l'indisponibilité de la monnaie. Des guichetiers ne vous vendent pas de tickets si vous n'avez pas de monnaie. C'est la seule société au monde qui favorise les resquilleurs. De là à te rembourser pour un retard, il faut attendre quelques décennies encore. Le retard est une habitude qui s'est ancrée», assène un sexagénaire qui prend son train chaque matin à partir de la gare de Birtouta, où là aussi le mobilier n'a pas été renouvelé depuis plusieurs années. Les employés de cette gare sont eux-mêmes exaspérés par cette situation. Leurs collègues se font agresser au passage à niveau par des automobilistes trop pressés.