En tout et pour tout, les deux tendances du mouvement des archs, la radicale et la dialoguiste, n'auront donc pu mobiliser que quelques centaines de citoyens lors des deux marches distinctes organisées jeudi dernier pour célébrer le 26e anniversaire du printemps berbère. De petites grappes congrues qui soulignent l'écart vertigineux entre les foules pachydermiques d'il y a quelques années et l'aigre solitude des animateurs et des porteurs de banderoles encore convaincus.Les actions pourtant, et au-delà de la célébration de la date en elle-même, se sont attachées à se prévoir des attractions. La baptisation d'une placette au nom des martyrs du printemps noir pour les dialoguistes et une rebaptisation de la Maison de la culture de Béjaïa au nom de Taous Amrouche pour Ali Gherbi et ses pairs. La placette fut baptisée au bout de quelques centaines de mètres de marche par un carré de manifestants un peu perdus dans ce boulevard qui les a vu passer. La Maison de la culture aussi a été baptisée. Un panneau portant inscription du nom de la figure honorée dans les trois langues, français, amazighe et arabe, accroché à la grille fermée de l'enceinte lors d'une cérémonie soutenue par quelques dizaines de marcheurs et où le solennel a carrément viré au pathétique. « La CICB s'interroge sur le manque d'adhésion de nos frères de combat aux différentes actions de célébration du printemps amazigh. La CICB doit-elle comprendre qu'on doit renoncer au combat ? Est-ce vraiment la solution idoine ? » Les propos, émus et dépités, sont ceux de la déclaration de Ali Gherbi et ses camarades antidialoguistes. Des mots qui révèlent tout le désarroi de ce qui reste du mouvement devant la situation. A Tizi Ouzou, le rassemblement auquel a appelé l'organisation des archs pour commémorer le 26e anniversaire du printemps berbère n'a pas drainé grand monde. La grève générale n'a été suivie qu'au cœur de la ville de Tizi Ouzou, lieu du déroulement du rassemblement. La sonorisation a été installée, tôt le matin, près de l'ex-brigade de gendarmerie et les principales rues de la ville ont été fermées à la circulation automobile par la police. En dépit des bonnes conditions pour une grande manifestation populaire, le constat est plutôt renversant : la population a bel et bien tourné le dos aux délégués. Même les parents des victimes ont fait faux bond. Seuls Khaled Guermah et son épouse, arborant le portrait de leur fils Massinissa assassiné en 2001, étaient présents. Le « mouvement citoyen » s'émousse, malgré la persistance des délégués à clamer « l'union et la solidité du mouvement ». Dans leur intervention, ils ont annoncé un ultime rendez-vous avec le chef du gouvernement mardi prochain. « Ce sera la mise en application totale des textes de la plateforme d'El Kseur ou alors, ce sera la rupture », a annoncé à la foule le représentant de la présidence tournante des archs. Lorsque la marche des étudiants arriva vers 11h 30 à leur niveau, les archs quittèrent les lieux et se dirigèrent vers la gare routière. Les manifestants scandaient les slogans traditionnels : « Pouvoir assassin », « Ulac smah ulac ». Après le dépôt d'une gerbe de fleurs à la place Matoub, la foule se dispersa dans le calme. Dans une déclaration, la CADC s'est félicitée de ses activités : « Une réponse cinglante aux charlatans de tous bords. » Jeudi dernier, sans l'intervention de la police, des affrontements auraient pu avoir lieu entre les adhérents à la marche, de laquelle ont émergé des figures du RCD, et des participants au meeting des archs. Finalement, les deux manifestations ont pu se dérouler. Pour une fois, la police a favorisé l'expression sur la voie publique aux uns et aux autres. Ce que ces derniers ont voulu mutuellement s'interdire. M. S., S. G.