Huit troupes participent à la 7e édition du Festival du théâtre professionnel de Sidi Bel Abbès, qui se tient depuis mercredi et jusqu'à mardi prochain. El Watan Week-end retrouve les planches de la ville Katebienne. Dans le noir total. La pièce, La chambre d'amis, mise en scène par Sadek El Kebir, a lancé, mercredi soir au Théâtre régional de Sidi Bel Abbès, la 7e édition du Festival culturel du théâtre professionnel de la ville Katebienne. La représentation a été jouée sans lumière. Manière d'amener le public au monde des non-voyants puisque la pièce est interprétée par des comédiens amateurs n'ayant pas l'usage de la vue. Malgré une salle bruyante et des voix presque inaudibles, Mebarka Belfekroune, Abdelkader Hamidi (un enfant de la lune), Hakima Boudraâ, Mohamed Amine Bensafi, Mohamed Lahouali et Samir Merabet (à la musique) ont joué comme ils ont pu. C'est une nouvelle expérience pour eux. Autant pour le public, non habitué au théâtre sonore et à l'absence prolongée des lumières. L'histoire, inspirée d'un conte d'Ibnou Al Moqafaa, est très actuelle : Hillel, le roi des singes, détrôné par ses enfants, va à la rencontre d'une tortue. Tout en nuances, le texte, adapté par Sadek et Sabine El Kebir, rappelle l'accélération des mouvements politiques dans la région arabe. De la discussion entre singes et tortues, l'un d'eux lance : «Il faut laisser les jeunes gouverner.» «Nous sommes habitués à voir des comédiens, des musiciens, des auteurs de jouer et de parler sur scène. Ils jouent pour nous, mais ils le font dans notre monde. D'où le pas que nous avons franchi pour découvrir l'univers des non-voyants. Comment le faire, sinon que de jouer dans l'obscurité totale», a soutenu Sadek El Kebir. Lors de la cérémonie d'ouverture, un bref hommage a été rendu aux artistes disparus ces derniers mois, comme Rachid Fares, Salima Labidi, Djamel Chiar, Djelloul Djedi, Attou, Abdelkader Leulmi, Abdelkader Malaab, Noureddine Drâa... Mohamed Hattab, wali de Sidi Bel Abbès, a souhaité toute la réussite au festival et rappelé le passé théâtral de cette ville. Et il a repris, la célèbre phrase : «Donne-moi un théâtre, je te donnerais un peuple cultivé.» Avant d'ajouter : «Nous serons toujours là pour vous soutenir et vous encourager.» Exprimé par un wali, ce discours est plutôt rare ! Mohamed Zetili, représentant du ministère de la Culture, a, de son côté, rappelé que 170 festivals sont institutionnalisés en Algérie. «Des festivals régis par les lois de la République sur les plans administratif et financier. Certains portent des jugements hâtifs sans savoir comment les choses évoluent sur le terrain», a-t-il dit. Huit troupes participent à la compétition durant le festival qui se déroule jusqu'au 16 avril. Elles viennent de Aïn Defla, Alger, Mostaganem, Sidi Bel Abbès, Chlef et Hamam Bouhadjar. «Je suis très honoré de recevoir Taha Al Amiri, Nadia Talbi et Madani Nâamoun qui vont être en compétition aux côtés de jeunes de 20-25 ans. C'est extraordinaire», a confié Ahcène Assous, commissaire du Festival et directeur du Théâtre régional de Sidi Bel Abbès. Une journée d'étude sera consacrée à la critique théâtrale et la pratique des médias. «Nous avons souhaité ouvrir le débat. Nous avons, en tant qu'espace de création du théâtre professionnel, un rapport étroit avec l'université de Sidi Bel Abbès où il y a des étudiants en filières art. Nous avons donc souhaité initier ces jeunes qui étudient les arts dramatiques en les invitant à voir des spectacles sous la direction du professeur Djamila Zegaï. Ils vont discuter les spectacles», a-t-il souligné. Ahcène Assous a estimé que les travaux des artistes doivent être décryptés et a regretté l'absence de revues ou de journaux spécialisés en arts dramatiques en Algérie. «Nous avons besoin d'une critique théâtrale pour savoir où on en est. La critique ouvre des pistes aux créateurs», a-t-il plaidé.