Diar Echems, cité de la commune d'El Madania, a été l'épicentre de la révolte. «Les émeutes ont commencé dans notre cité. C'est un peu le ‘‘Sidi Bouzid'' de l'Algérie, mais avec heureusement moins de morts. Le 1er Novembre 1954 a été préparé chez les Derriche (maison où s'est réuni le groupe des 22). Il en a été de même des dernières révoltes.» Khaled, trentenaire, occupe toujours avec sa famille un appartement, «un cagibi infecte», des «Maisons du soleil», cité de recasement vidée d'une partie de ses occupants, au lendemain des émeutes d'octobre 2009. Des affrontements avaient opposé, durant plusieurs jours, de jeunes manifestants aux forces de l'ordre venues les déloger du terrain des Jasmins où ils comptaient construire des baraques. Des blessés avaient été enregistrés de part et d'autre, avant que la wilaya ne décide d'octroyer, quelques semaines plus tard, un quota de logements. «Plus de la moitié des habitants ont été relogés à Tixeraïne et Birtouta. Certains se sont vu refuser ce droit sous prétexte qu'ils n'ont pas été recensés par les services de M. Mouffouk (ancien président de l'APC). Mais notre APC n'a jamais été juste. Des célibataires ont été relogés et personne ne s'y est opposé», estime un jeune, employé d'une administration du centre-ville et clandestin à ses heures perdues. Les appartements, des F1, où s'entassaient jusqu'à 4 familles, ont été vidés et leurs résidants relogés dans de nouvelles cités de la périphérie. Même situation pour les occupants des nombreux bidonvilles qui se serraient entre les barres d'immeubles. Plus de trois ans après les émeutes, rien n'a changé pour les habitants de cette cité, ni pour les autres de la commune d'El Madania, Clos Salembier pour les anciens. «Salembier, c'est une succession de cités-dortoirs construites par les colons (Fernand Pouillon, architecte de renom y a laissé son empreinte). On n'y naît jamais, on y meurt de mort naturelle, mais surtout de désespoir», regrette un jeune chômeur de la cité Diar El Mahçoul, qui a «tenté la harga» pour échapper à son destin de hittiste. «Une fois, j'ai failli y laisser ma vie, des marins indonésiens ont eu pitié de moi et de mes compagnons qui se trouvaient sur le ‘‘bouti'' (embarcation de fortune), qui a chaviré au large de Mosta», raconte-t-il. Le changement n'arrive que rarement dans cette commune populaire, excepté l'élection remarquée d'une femme à la tête de l'APC, comme chez les voisins de Belouizdad. La nouvelle «mira» a un style qui tranche avec l'ancienne équipe de Mouffouk, dont les deux mandats ont été marqués par plusieurs incidents (soupçon de corruption, affaires en justice, conflits avec des élus et une partie de la population, etc.) APC sous perfusion Mais en dépit de la volonté affichée par la nouvelle équipe, le travail n'est pas de tout repos. «Que faire avec un budget de 17 milliards de centimes ? Plus de 80% de cette somme sont destinés à payer les fonctionnaires de l'APC. D'ailleurs je ne sais pas comment on va s'en sortir avec les nouvelles augmentations», s'étonne Malek Bougayou, élu FFS et vice-président de l'assemblée. L'APC vit avec les seules subventions de l'Etat. Les projets lancés appartiennent aux autres secteurs, surtout à la Direction de la jeunesse, des sports et des loisirs (DJSL) qui a dénoué les cordons de la bourse pour reprendre des projets abandonnés faute de moyens, mais aussi d'entrain des autorités locales, occupées par la défense de leur chapelle politique. Le problème du logement se pose avec acuité. L'opération «Tiroir» qui devait être lancée au milieu des années 1980 est remise dans les tiroirs des fonctionnaires de l'Etat. Aucune cité ( Diar El Mahçoul, Diar Saâda, El Afia, Diar Echems, Nador, etc.) n'en a bénéficié. «Le social, c'est la wilaya déléguée qui s'en occupe. Nous avons, par contre 5000 demandes dans le LSP. On a eu des quotas. La moitié des bénéficiaires ont été relogés. L'autre moitié partira à Aïn Benian (350) et Baba Hassen (140) dès la fin des travaux», relève Mme Ben-Salem, présidente de l'APC. Des opérations de relogement ? «On ne peut pas savoir quand l'opération sera relancée. Il reste à reloger près de 450 familles de Diar Echems. Depuis le début des opérations, 5000 familles ont été relogées dans toute la commune (El Bahia, Mahçoul, Oued Knis, El Aloui, Afia)», relève le secrétaire général de la commune, Kendjoua Tewfik. La nouvelle équipe municipale dont certains étaient des élus des mandats précédents, a entamé son mandat sur les chapeaux de roues, avec le lancement des travaux de réhabilitation de l'état civil. Une entreprise est déjà sur place pour réaménager les locaux. Le service de l'état civil a été délocalisé au centre culturel Debbih Cherif, qui reçoit les administrés. Le service reviendra dans les anciens locaux relookés, situés au rez-de-chaussée du siège de l'APC, «d'ici deux mois au maximum», promet Mme Ben-Salem. Un autre problème récurrent se pose pour l'assemblée : les immeubles menacent ruine (IMR). «Nous avons 19 anciennes bâtisses, en plus des 5 recensées dernièrement. Le dossier de ces habitations classées rouge a été ficelé. Ces immeubles, qui se trouvent à la rue Mustapha Serrir, Panorama, Mohamed Belkacemi, rue 4 cité Nador, Abderrahmane Laâla, peuvent s'effondrer à tout moment», note le SG.