Plus qu'elles ne l'étaient déjà avant l'«attaque ischémique transitoire» dont a été victime le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, évacué le 27 avril dernier à l'hôpital militaire parisien du Val-de-Grâce, les institutions semblent en totale léthargie. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui sillonne le pays depuis sa nomination, il est vrai, pour faire face aux mouvements sociaux, aux manifestations des chômeurs dans le Sud, aux grèves dans les secteurs de l'éducation et de la santé, remplit aussi le vide sidéral laissé par un Président omnipotent, absent de l'Algérie depuis un mois. Même le projet de révision de la Constitution semble battre de l'aile ; selon des informations crédibles, il serait en stand-by. La commission mise en place pour élaborer, dit-on, la nouvelle mouture de la Loi fondamentale aurait marqué le pas. A moins d'une année de l'élection présidentielle, la scène politique ne semble pas pour autant s'emballer. Le président Bouteflika a tellement verrouillé le champ politique qu'il n'a plus laissé d'espace à la construction d'une alternative politique ni même au débat clair sur l'avenir du pays. Un pays en panne, qui a plus que jamais besoin de se libérer de la régression dans laquelle il a été plongé. Les parlementaires sont en chômage technique et la session de printemps est une session à blanc tant les députés, eux qui n'ont jamais initié une proposition de projet de loi, n'ont presque adopté aucun texte. Le Conseil des ministres ne s'est pas réuni depuis bien longtemps. La vie politique nationale donne l'air d'être suspendue à cause de la maladie du chef de l'Etat. Si en sourdine des partis et des candidats potentiels se préparent à l'échéance présidentielle, publiquement, personne n'a encore franchi le pas pour faire part de son ambition de briguer un mandat à la magistrature suprême. D'aucuns s'interrogent si l'élection présidentielle sera ouverte ou fermée. Et le silence du chef de l'Etat a, avant l'accident vasculaire dont il a fait l'objet, lourdement pesé sur la scène politique. Briguer un quatrième mandat était, pour la classe politique, un signal clair que les jeux sont faits et qu'il était inutile d'entrer dans une compétition perdue d'avance. Maintenant que le retrait du président Bouteflika se dessine, la grande question qui revient au-devant de l'actualité est : quel serait le candidat qui bénéficiera du soutien «des décideurs» ? En d'autres termes, qui sera coopté par «le pouvoir de l'ombre» ? Selon des observateurs, «même si l'on est politiquement dans l'après-Bouteflika, l'institution militaire se tiendrait, fait inhabituel, loin du champ politique». Ce qui, selon nos sources, «laisse présager d'une élection présidentielle ouverte». Serait-ce une réalité ou une illusion ? Rien n'est moins sûr. Que faudrait-il pour que la classe politique se libère, se prononce sur l'élection présidentielle, sur la maladie du Président, lance des débats sur l'avenir du pays ? Les 14 ans de règne de Bouteflika ont tellement pesé sur la pratique politique, presque confinée à la clandestinité, que nul n'ose aujourd'hui s'exposer tant la situation du pays est dans un flou total. Il est, en effet, anormal qu'il n'y ait pas d'annonce de candidatures à quelques mois seulement de l'élection présidentielle, d'autant plus que désormais, le quatrième mandat du chef de l'Etat en exercice n'est plus une option sérieuse.