Bachir Mazouz est professeur titulaire à l'Ecole nationale d'administration publique-Réseau de l'université du Québec. Intronisé au Cercle d'excellence de l'université du Québec, il est lauréat du Prix d'Excellence en sciences sociales et humaines (2009) et titulaire de la Chaire Gutenberg 2009 à l'ENA de France. Depuis 15 ans, il consacre quatre semaines par an à l'enseignement en Algérie (ENA) et à l'encadrement à distance de doctorants et de jeunes collègues enseignants-chercheurs. Pourtant pour venir s'établir en Algérie c'est une autre paire de manches. Selon lui, «les conditions les plus élémentaires» ne sont pas «réunies» pour faire que ses compétences soient «utiles» à l'économie algérienne. Par conditions, il entend «l'accès à des données actualisées et pertinentes de terrain, faire des investigations scientifiques sans être obligé de recourir à des interventions suspectes, des bases de données nationales et étrangères, des supports de publication reconnus à l'échelle internationale, des réseaux de chercheurs spécialisés et des manifestations scientifiques de haut niveau... » Il s'agit purement de «conditions de travail permettant à un chercheur de contribuer, un tant soi peu, à l'émergence de son pays et de son champ disciplinaire». Cette situation peut-elle changer ? M. Mazouz estime que pour mettre à contribution la communauté scientifique nécessaire au développement de n'importe quel pays à «l'ère de l'économie et des sociétés du savoir», il faudrait «miser sur des politiques publiques qui s'inscrivent dans la durée et favorisent progressivement l'émergence d'une véritable élite politique (dirigeants) qui soit réellement sensible en particulier aux communautés scientifiques, littéraires et artistiques». Ce qui est demandé, ce sont «des choix stratégiques qui visent d'abord, à moyen et long termes, à susciter l'intérêt des compétences algériennes installées à l'étranger». Cela peut se faire à travers «des programmes et projets menés conjointement avec des équipes de chercheurs opérant en Algérie et à l'étranger, l'organisation de rencontres annuelles et pluriannuelles, l'accueil de compétences algériennes, la conclusion d'accords institutionnels, la co-gestion de pôles scientifiques et le transfert de compétences... ». L'important est d'avoir des politiques publiques «qui ne changent pas au gré des chefs de gouvernement et leurs personnels ministériels». Car, dit-il, «on ne peut bâtir une économie et une société avec les effets d'annonce du JT de 20 heures et des déclarations ministérielles».