Abdallah Baâli, ambassadeur, représentant permanent de l'Algérie auprès de l'ONU, revient sur le débat actuel. Il en évoque l'importance ainsi que la nécessité, mais aussi les enjeux qui consistent essentiellement à réhabiliter les principaux organes de l'ONU. Nous n'entendons plus la voix de l'Algérie d'où est pourtant partie, en 1973, la revendication d'un ordre mondial plus juste, ce qui supposait à l'époque déjà une réforme des instances internationales. Pourquoi un tel silence ? L'Algérie n'a jamais cessé de revendiquer avec force et conviction l'instauration d'un ordre mondial plus juste et d'appeler à une réforme en profondeur de l'Organisation des Nations unies pour lui permettre de mieux faire face aux nouvelles réalités internationales, de faire prévaloir le droit sur la force et de mieux servir la paix et la justice dans le monde. Bien plus, l'Algérie préside le groupe de travail des pays non-alignés sur la réforme des Nations unies et joue, de ce fait, un rôle de premier plan dans l'effort global visant à réformer l'ONU. Le website de la mission d'Algérie à New York est riche de références sur la position de l'Algérie sur la question des réformes. Qu'est-ce qui empêche l'Algérie de prétendre elle aussi à un siège de membre permanent du Conseil de sécurité ? L'Algérie est respectueuse d'une décision prise par le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement à Harare qui consiste à revendiquer deux sièges permanents pour l'Afrique à titre rotatif entre les pays africains et trois sièges non permanents. Pensez-vous que le débat actuel tel qu'il est soulevé soit empreint de réalisme ? La question de la réforme du Conseil de sécurité fait l'objet d'un vif débat qui dure depuis 1993. S'il existe une concordance de vues au sein des Etats membres sur la nécessité d'améliorer les méthodes de travail du Conseil de sécurité qui gagnerait à être plus transparent, plus efficace et plus équitable dans le traitement des questions internationales, l'élargissement du Conseil de sécurité qui est devenu une nécessité absolue, puisque le nombre des Etats membres de l'organisation a plus que triplé depuis 1945, suscite des appétits et des ambitions concernant la création de nouveaux sièges permanents qui ont empêché les Etats membres de s'entendre sur quelque formule d'élargissement que ce soit. A la faveur de la présentation, le1er décembre prochain, du rapport sur les défis et menaces à la paix, par le panel d'éminentes personnalités, et de l'approche du 60e anniversaire de la création de l'ONU, plusieurs pays ont publiquement fait état de leur ambition de postuler à un siège permanent. La décision, si décision il y a, ne pourra cependant être raisonnablement prise que l'an prochain. Tout dépendra d'abord et surtout de ce que le panel recommandera à l'Assemblée générale, laquelle décidera d'y donner suite ou non. Croyez-vous que les membres permanents actuels du Conseil de sécurité accepteraient son élargissement ? Certains membres permanents ont déclaré qu'ils étaient favorables à un élargissement du Conseil et ont même proposé des noms. D'autres sont restés plus prudents, mais je pense que tous comprennent et acceptent la nécessité d'élargir le Conseil de sécurité. On dit déjà qu'une réforme de l'ONU signifierait sa fin de mission. Partagez-vous ce point de vue ? Certainement pas. L'ONU a besoin de se réformer et de se réformer d'une manière radicale. Elle joue un rôle irremplaçable sur la scène internationale, et les événements internationaux récents ont confirmé sa validité et sa pertinence. Mais pour mieux répondre aux nouveaux défis et aux nouvelles menaces globales, elle a besoin de se revitaliser. Le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social et l'Assemblée générale doivent, à cet égard, subir des réformes substantielles pour pouvoir remplir véritablement et efficacement leurs mandats respectifs. Les relations entre ces différents organes doivent être également revues de façon que chacun de ces organes assume le rôle qui est le sien, sachant que l'Assemblée générale, en particulier, doit être réhabilitée dans ses fonctions d'organe délibérant principal de l'organisation.