La problématique des subventions des produits de première nécessité pour préserver le pouvoir d'achat des citoyens a de tout temps constitué une arme du pouvoir en vue de préserver la paix sociale dans notre pays. Cet équilibre artificiel entretenu par l'Etat est battu en brèche par le détournement indirect de ces subventions par des importateurs indélicats et des contrebandiers avisés. Danger. Pas moins de 2341 affaires de contrebande ont été enregistrées durant le premier semestre 2013 par les garde-frontières de la Gendarmerie nationale. «Ce qui représente près de 33,74% de la criminalité organisée enregistrée durant la même période de l'année 2012», révèle ce corps de sécurité. Les trois marches du sinistre podium de la contrebande reviennent aux wilayas de Tlemcen avec 1056 affaires, 572 pour Tébessa et 467 pour Souk Ahras. Trois régions dont le dénominateur commun est la situation géographique frontalière avec le Maroc pour la première et la Tunisie pour les autres. Les produits «exportés» par les contrebandiers vers ces pays sont tous subventionnés par l'Etat et varient du sucre à l'huile en passant par la semoule et le gasoil. En effet, selon un décompte officiel du commandement de la Gendarmerie nationale, le trafic de carburant a connu une augmentation de 22,03% par rapport au premier semestre 2012, se traduisant par la saisie de 813 178 litres, dont 512 214 à l'Est. Ce qui a donné lieu à 1550 affaires traitées, qui représentent 66,21% de la contrebande. Le trio des wilayas les plus concernées sont toujours les mêmes : Tlemcen avec 632 affaires, 359 à Souk Ahras et 329 pour Tébessa, soit une baisse de 2,45% par rapport au premier semestre 2012 en matière d'affaires traitées.Quant aux contrebandiers impliqués, 159 ont été arrêtés. La contrebande des produits alimentaires subventionnés – sucre, lait, huile de table, semoule, pâtes, concentré de tomates, etc. – a également connu une augmentation sensible estimée à près de 30%. Situation similaire concernant le trafic de bétail où les mêmes services ont recensé, durant les six derniers mois, 4500 ovins saisis contre 2500 au premier semestre 2012 soit un taux d'accroissement de 80%. A cela, il faut ajouter des quantités similaires, sinon plus élevées, qui ont réussi à passer à travers les mailles des services de sécurité. Pis, tous ces produits sont subventionnés directement et indirectement par l'Etat. En effet, le prix réel d'un litre d'essence est de près de 60 DA, celui du gasoil de 50 DA/l, ceux du sucre et l'huile respectivement de 140 DA/kg et de 180 DA/l. Quant au cheptel ovin, bovin et caprin, la subvention est indirecte puisque les éleveurs sont aidés sur l'aliment du bétail. Les émeutes ayant secoué le pays, en janvier 2011, après une augmentation des prix du sucre et de l'huile, avaient poussé le gouvernement à prendre des mesures en faveur du soutien des prix de ces deux produits, qui lui avaient valu 26 milliards de dinars, selon le ministère du Commerce. Une manne qui a profité, outre aux Algériens, aux Tunisiens, aux Marocains et même aux Libyens. Du côté des gardes frontières de la gendarmerie, l'action est permanente. L'effort consenti au quotidien fait face à un trafic sur les produits de première nécessité, avec des chiffres révélateurs dont le volume et l'importance sont de nature à compromettre les efforts de l'Etat en matière d'approvisionnement des populations des bandes frontalières et la stabilité macro-économique. Les contrebandiers algériens accèdent sans discernement à la demande des marchés des pays voisins et n'introduisent en territoire national que des produits nocifs ou de mauvaise qualité (drogues, cigarettes, alcool frelaté, friperie…). En effet, le constat établi indique que «dans le sens de l'importation, les produits ciblés sont les stupéfiants, les tabacs, les alcools, les effets vestimentaires, les fruits et légumes saisonniers et les produits alimentaires. Alors que dans le sens de l'exportation, il s'agit essentiellement de carburant, de cheptel, de produits ferreux et des produits alimentaires soutenus par l'Etat».