Dans son livre, Bouteflika, ses parrains et ses larbins (éditions Encre d'Orient, 2011), Mohamed Sifaoui cite un certain nombre d'hommes de réseau qui auraient joué un rôle déterminant dans la promotion de la candidature de Bouteflika auprès des responsables militaires et autres hommes liges du régime algérien. En tête de ces «lobbyistes», Larbi Belkheir. Des hommes d'affaires proches du «cardinal» se seraient ainsi employés, à sa demande, à vendre le «candidat Bouteflika» de l'autre côté de la Méditerranée. C'est le «lobbying effectué par le trio Abdelkader Koudjeti- Jacky Fleschen-Prosper Amouyal, trois hommes d'affaires proches de la chiraquie et du général à la retraite Larbi Belkheir», écrit Sifaoui (p101). «Ils auraient, pendant plusieurs semaines, fait des pieds et des mains, organisé des dîners et des rencontres pour vendre à tous les ‘'hommes qui comptent'', des deux côtés de la Méditerranée, le candidat Bouteflika». En Algérie, ce travail est pris en charge, assure-t-il, par Larbi Belkheir et Smaïl Lamari qui «joueront un rôle similaire auprès des caciques du régime. Ces deux figures ont également leurs entrées dans plusieurs capitales arabes et occidentales. Belkheir connaît parfaitement les milieux d'affaires ici et là et Smaïl, chef du contre-espionnage, avait ses entrées avec les services de plusieurs pays. Ce sont ces deux hommes qui iront convaincre le chef d'état-major Mohamed Lamari d'opter pour Bouteflika, alors qu'il était plutôt favorable à la carte Ouyahia». Reste maintenant à convaincre Toufik. Sifaoui poursuit: «La troisième séquence évoque une étape qui consistait à convaincre, dès le mois de septembre, Mohamed ‘Toufik' Mediène, mis à l'écart dans un premier temps, car il se serait toujours méfié de l'ancien ministre des Affaires étrangères de Boumediène. Le patron du DRS aurait écouté une première fois Larbi Belkheir sans broncher.» (P102). Selon Sifaoui, si Toufik se montrait réservé au départ, c'est parce qu'il craignait un «remake de 1994». Et de reprendre : «Un ancien militaire se souvient des conciliabules interminables réunissant le général-major Smaïl Lamari, Larbi Belkheir et Abdelaziz Bouteflika dans le ‘bloc B' du ministère de la Défense. Selon ce témoin, il y avait quelque chose d'absurde dans la démarche, puisque les trois hommes restaient des heures à discutailler et c'était Mohamed Ghenim, le secrétaire général du ministère qui était chargé de les ravitailler en eau et en boissons chaudes afin qu'aucun soldat, sous-officier ou officier, n'approche le lieu de la rencontre. Ce manège a duré plusieurs jours. D'après mon interlocuteur, le général Mohamed Lamari les rejoignait de temps à autre et Larbi Belkheir allait voir le général Toufik pour lui rendre compte du contenu des discussions, alors que son bureau était à trois cents mètres du lieu où se tenaient les rencontres avec Bouteflika.» Ce témoin précise en souriant ironiquement : «Toufik avait néanmoins les moyens techniques pour suivre les réunions en direct.» (P103). «Un autre responsable avec lequel j'ai eu l'occasion de m'entretenir, ajoute Sifaoui, évoque également une réunion qui aurait eu lieu entre Mohamed Touati, Larbi Belkheir et Toufik, durant laquelle il fut décidé de mettre le pouvoir algérien entre les mains d'un ‘civil'. Ce serait, selon cette source, Larbi Belkheir qui aurait usé de tous les ‘arguments' pour imposer celui qui allait devenir le ‘candidat du système'. Les généraux Touati et Mediène auraient finalement trouvé que si l'idée n'était pas extraordinaire, elle n'était pas non plus mauvaise. Quelques voix expliquent que les décideurs n'ont pas opté pour le ‘meilleur candidat', mais pour le ‘moins pire'».