C'est de Paris, où il séjourne quelques jours pour un bilan médical, que le général Belkheir est sorti de son mutisme, mercredi, confirmant qu'il avait accepté « la mission » qui lui avait été confiée et précisant qu'il rejoindrait Rabat « probablement en octobre », rapporte le Monde (édition du 26 août 2005) dans un article intitulé « En Algérie, le général Larbi Belkheir, pilier du régime, quitte la présidence ». « Les uns prétendent que j'ai refusé mon poste. Les autres affirment que j'ai claqué la porte. D'autres encore me conseillent de ne pas quitter Alger sous prétexte que je suis un élément de stabilité », a déclaré le général Belkheir au Monde. Et de préciser : « La réalité est que Rabat est un poste sensible et qu'on en a conscience de part et d'autre. Ma priorité sera d'établir des relations de confiance avec le Maroc et surtout une véritable communication entre les deux pays. Cela fait trop longtemps que nos relations passent par des hauts et des bas. Or le Maroc est notre voisin et le restera. Nous sommes condamnés à nous entendre. » Le quotidien français du soir note, pour sa part, qu'« à Rabat, on a accueilli avec une immense satisfaction la nomination de ce partisan convaincu de la normalisation algéro-marocaine. En quelques heures, les autorités marocaines avaient donné leur assentiment. Reste que la nouvelle fonction de Belkheir ressemble bien à une mise à l'écart, même si l'intéressé refuse de l'admettre ». Et « l'utilité de cet homme de réseaux et de contacts avait-elle fini par s'émousser ? C'est probable. A coups de mises à la retraite, de promotions et de mutations, le président Bouteflika a réussi à élargir son pouvoir au point d'avoir aujourd'hui la haute main sur l'armée. La démission du chef d'état-major, le général Mohamed Lamari, l'année dernière, a fait sauter un verrou. Depuis, c'est une valse permanente. Du noyau des généraux « janviéristes », il ne reste plus que trois hommes : Abdelmalek Guenaïzia, ministre délégué à la Défense nationale (le chef de l'Etat occupant le poste de ministre), mais aussi et surtout les généraux-majors Mohamed Mediène et Smaïn Lamari, chefs des services de renseignements ». « Le départ de Larbi Belkheir signifie que le président n'a plus besoin d'interface avec l'armée, du moins celle qui porte l'uniforme. Jour après jour, le chef de l'Etat assoit son pouvoir et écarte quiconque lui résiste ou menace de lui faire de l'ombre. Quoi qu'il en soit, la disgrâce de Belkheir s'accompagne d'une porte de sortie plus qu'honorable. » Le quotidien Libération, quant à lui, se demande, dans un article ayant pour titre « Un ambassadeur algérien de poids à Rabat », si la nomination à Rabat de celui qui est considéré comme l'officier supérieur le plus favorable à une normalisation avec le Maroc, constitue-t-elle la « mise à l'écart » qu'affirme la presse algérienne en croyant savoir qu'il avait d'abord refusé ce poste ? La réponse est laissée à « un connaisseur du dossier » : « Sans doute parce que Belkheir sait très bien qu'il ne pourra rien faire pour rapprocher Rabat et Alger, car Bouteflika ne cédera rien sur le Sahara-Occidental, soucieux de garder cette carte de négociation avec les Etats-Unis et la France. » Lequel « connaisseur du dossier » estime que « depuis le début de l'été, les rapports entre Bouteflika et Belkheir se sont beaucoup dégradés ». Et Libération d'affirmer : « C'est l'une des hypothèses, le président algérien, fort d'un deuxième mandat, voulant notamment éloigner un Belkheir considéré comme le rappel vivant d'un premier mandat imposé par les généraux. A moins que tout cela ne soit un rideau de fumée visant à convaincre les Marocains qu'Alger est dans les meilleures dispositions à leur égard. »