Plus de 6 millions de Maliens sont appelés, pour la seconde fois, à choisir leur Président entre deux candidats : Ibrahim Boubacar Keita (IBK) qui avait raflé plus de 39% des voix au premier tour du scrutin et Soumaila Cissé qui avait obtenu un peu plus de 19% des voix. Bamako (Mali). De notre envoyée spéciale Après avoir achevé vendredi dernier une campagne électorale marquée par des échanges de propos et de critiques acerbes, les deux candidats arrivés au second tour du scrutin présidentiel affronteront aujourd'hui les urnes. Issus d'un même parti, l'Adema, ayant l'expérience de l'exercice des fonctions de l'Etat mais des rendez-vous électoraux présidentiels ratés, Ibrahim Boubacar Keita ( IBK) et Soumaila Cissé (surnommé Soumi) se retrouvent face à face en ce dimanche 11 août 2013. Tous deux s'attendent à une forte participation au vote et chacun se déclare le principal favori. Soutenu par des couches importantes de la société et par une grande partie de l'armée, IBK a le soutien de vingt candidats ayant obtenu un score insignifiant lors du premier tour, ainsi que le ralliement de Dramane Dembélé, classé troisième sur la liste des candidats. IBK est le favori de ce deuxième tour que beaucoup espéraient éviter. Soumaila, qui a obtenu le soutien de Modibo Sidibé arrivé en 4e position au premier tour, espère sortir vainqueur de ce rendez-vous électoral, tout en exprimant sa grande crainte de voir «les manipulateurs» jouer avec les résultats. En dépit du soutien d'une partie de la diaspora malienne, Soumi traîne néanmoins une casserole : son long séjour à l'étranger au moment où le pays était secoué par une grave crise. Il compte beaucoup sur l'URD, le parti qui l'a présenté et dont les principaux acteurs ne sont apparus à l'opinion publique que lors de la campagne électorale. Cet ancien secrétaire du président Alpha Omar Konaré dans les années 1990 a sous-évalué et fait peur aux commanditaires du coup d'Etat qui a renversé ATT, mais arrange beaucoup les partisans de l'intervention étrangère et de la présence des forces françaises au nord du Mali. Ce qui n'est pas le cas pour son adversaire qui, lui, appelle à la «refondation» de l'armée malienne pour se «réapproprier» ses prérogatives sur l'ensemble du territoire. Un discours qui plaît en raison de l'assentiment que suscite la présence des forces étrangères au sein de la population. A Bamako, les vrais décideurs sont ailleurs qu'à Koulouba (siège de la Présidence). Même en tant que journaliste, pour se rendre à Kidal ou à Gao, il faut passer par les militaires français qui ont le contrôle de toute la région du Nord. L'enjeu est considérable. Dans le cas où IBK sera élu, il aura certainement du mal à avoir les coudées franches dans cette zone. IBK semble avoir de fortes chances d'être porté à la Présidence. De nombreuses personnalités, dont le candidat du plus grand parti, Dramane Dembélé, lui ont exprimé leur soutien. D'autres, comme Jeamille Bittar, ont rejoint Soumaila Cissé. Mais si les candidats et leurs partisans sont convaincus d'une participation massive des électeurs à ce rendez-vous, beaucoup craignent l'abstention. Les Maliens souffrent trop de la misère, des promesses non tenues des candidats lorsqu'ils étaient au pouvoir, de la corruption qui entache leur crédibilité. Jamais le Mali n'a vécu une situation aussi grave que celle dans laquelle il se débat ces dernières années. Des maladies depuis longtemps éradiquées, comme la lèpre, sont revenues ; l'école est totalement sinistrée ; l'armée est éclatée ; la paupérisation touche un large pan de la société et les deux tiers du territoire sont sous le contrôle de forces étrangères. Tels sont les lourds défis que devra relever le prochain Président avec des moyens dérisoires, voire insignifiants. Tant attendue, l'aide internationale sera-t-elle à la hauteur en ces temps de crise économique mondiale ? En attendant d'avoir la réponse, les Maliens ont encore de longues années de souffrance à subir, le temps que leurs richesses soient aspirées…