Le comité Nobel, qui attribue le célèbre prix éponyme de son fondateur Alfred, inventeur de la dynamite, a fait voler en éclats l'espoir de l'adolescente pakistanaise. Annoncée quasiment récipiendaire de la prestigieuse distinction du Nobel de la paix, Malala Yousafzai, a finalement servi de petit lièvre à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) engagée à «plein gaz» en Syrie. De même que le gynécologue Denis Mukwege, réputé pour son aide aux femmes violées dans l'est de la République démocratique du Congo. Pour de nombreux observateurs, la version 2013 du Nobel de la paix est plus un cadeau qu'un mérite. Pas spécialement pour avoir frustré la jeune Pakistanaise. Quel est donc cet exploit réussi par l'OIAC pour avoir droit à ces grands honneurs de l'académie du Nobel ? De s'être exécuté en envoyant une équipe d'experts pour détruire les stocks d'armes chimiques de Bachar Al Assad ? C'est pour le moins un argument spécieux pour plaider la cause d'une organisation créée en 1997 pour de mettre en œuvre la Convention sur l'interdiction des armes chimiques (CIAC) signée le 13 janvier 1993. Beaucoup ont dû découvrir l'existence de l'OIAC à la faveur de la décision du Conseil de sécurité, le 28 du mois passé, de la charger de superviser l'opération de démantèlement des armes chimiques syriennes d'ici au 30 juin 2014. Une mission inspirée par la proposition du président russe, Vladimir Poutine, de mettre l'arsenal chimique syrien sous contrôle international… Tant qu'à faire, il aurait été plus juste de décerner ce prix au maître du Kremlin qui, par cette proposition, a court-circuité de justesse des frappes militaires contre la Syrie en septembre dernier. Mais le comité Nobel ne voulait visiblement pas offrir une telle fleur à Poutine au risque de s'attirer des ennuis de la part des Etats-Unis, de la France et du Royaume-Uni notamment. Pour autant le président russe est certainement loin de mériter une telle distinction, ne serait-ce que pour les horribles massacres qu'il a ordonnés en Tchétchénie et le traitement qu'il réserve à ses opposants. Cela dit, le prix Nobel de la paix plus que les autres perd irrémédiablement de son clinquant. Prime aux intentions Il est même tombé dans la banalité, tant ses derniers récipiendaires ne sont pas forcément des pacifistes. Loin s'en faut. Le déclin de ce prix a été entamé en 2009, quand l'académie d'Oslo a cru bon de le décerner, sur la base d'un discours d'intention, au président américain Barack Obama. A trop vouloir surfer sur la vague d'un premier président noir, le comité Nobel a déçu dans les quatre coins de la planète. Obama lui-même a eu l'honnêteté de reconnaître qu'il ne le méritait pas. Ce fut une douche froide pour les augustes décideurs «sages» de Nobel.Il y a pourtant d'illustres inconnus dans le monde «d'en bas» qui se battent pour la paix et le respect des droits de l'homme et qui auraient mérité leurs faveurs. En Egypte, au Mali, en Somalie, en Syrie, en Palestine, même en Arabie Saoudite et au Qatar, des gens bravent les interdits des régimes fermés pour dénoncer les violations des droits de l'homme et réclament une part de bonheur pour leurs peuples. Il faut croire que depuis Oslo, les «sages» du comité Nobel n'apprécient pas bien ces luttes quotidiennes de ces gens qui n'ont aucun parrainage. Obama, l'ONU et l'UE en attendant le FMI… Ainsi et à défaut d'honorer une personnalité qui s'est distinguée par son action en faveur de la paix, l'académie Nobel semble trouver le filon des organisations apparentées à l'ONU pour se donner bonne conscience. Ces attributions exceptionnelles à des «personnes morales» tendent à devenir presque une règle. Il ne serait pas étonnant de voir le FMI ou la Banque mondiale honorés dans les prochaines années, pour avoir soumis des pays dévastés par les guerres à des plans d'ajustement structurel… C'est que le prix Nobel de la paix est devenu, au fil des ans, la caricature de lui-même. Les contemporains de mère Teresa et Nelson Mandela ne sont plus en odeur de sainteté et ne courent plus les rues… Le comité revient à ses normes premières qui consistent à distinguer davantage des organisations que des personnes. Et ce jeu est pratiquement devenu un instrument onusien, tant toutes les agences et tous les organismes apparentés ont été primés. L'ONU elle-même, que de Gaulle a qualifiée à juste titre de «machin», a été distinguée en 2001 pour ses efforts pour la paix (?) dans le monde. De même l'Union européenne en crise qui a eu incroyablement les faveurs du comité Nobel en 2012. Que vaut finalement ce prix qui a pris des rides après plus d'un centenaire d'existence ? Les talibans pakistanais se sont réjouis hier d'avoir vu juste, à savoir que l'adolescente Malala Yousafzai ne méritait pas le prix. Quel soutien !