Nécessité de renforcer la coopération entre les Etats membres et d'intensifier le soutien pour atteindre les objectifs    La réunion consacrée aux exportations présidée par le président de la République "importante et fructueuse"    Ligue 1 Mobilis: le CS Constantine bat l'USM Alger (1-0) et prend la tête du classement    Timimoun : commémoration du 67è anniversaire de la bataille de Hassi-Ghambou dans le Grand erg occidental    Accidents de la circulation en zones urbaines: 11 morts et 418 blessés en une semaine    Entrée prochaine de la première startup à la Bourse d'Alger    Le ministre de la Santé met en avant les progrès accomplis par l'Algérie dans la lutte contre la résistance aux antimicrobiens    Le Conseil de la nation prend part à Montréal à la 70e session de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN    Touggourt : une quinzaine de participants à l'exposition de dattes à Témacine    La CPI émet des mandats d'arrêt contre Netanyahu et son ancien "ministre" de la Défense    Khenchela: 175 foyers de la commune d'El Mahmal raccordés au réseau du gaz naturel    Le Général d'Armée Chanegriha préside la cérémonie d'installation officielle du Commandant de la 3ème Région militaire    Meilleur arbitre du monde 2024: l'Algérien Mustapha Ghorbal nominé    Une action en justice intentée contre l'écrivain Kamel Daoud    Le recteur de Djamaâ El-Djazaïr reçoit le recteur de l'Université russe du Caucase du Nord    Attaf reçoit l'envoyé spécial du président de la République fédérale de Somalie    Foot féminin: maintenir la dynamique du travail effectué pour bien préparer la CAN-2025    Palestine: des dizaines de colons sionistes prennent d'assaut l'esplanade de la mosquée Al-Aqsa    La liste des présents se complète    Combat de la spécialité muay thai : victoire de l'Algérien Mohamed Younes Rabah    Ouassa Younes et Aribi Karim suspendus deux matchs    Poutine a approuvé la doctrine nucléaire actualisée de la Russie    L'entité sioniste «commet un génocide» à Ghaza    Liban : L'Italie dénonce une nouvelle attaque «intolérable» de l'entité sioniste contre la Finul    Un nourrisson fait une chute mortelle à Oued Rhiou    Sonatrach s'engage à planter 45 millions d'arbres fruitiers rustiques    Campagne de sensibilisation au profit des élèves de la direction de l'environnement de Sidi Ali    Sonatrach examine les opportunités de coopération algéro-allemande    Semaine internationale de l'entrepreneuriat    La 3e édition du salon «Algeria WoodTech», prévue du 23 au 26 novembre    Il y a 70 ans, Badji Mokhtar tombait au champ d'honneur    L'irrésistible tentation de la «carotte-hameçon» fixée au bout de la langue perche de la Francophonie (III)    La femme algérienne est libre et épanouie    Les ministres nommés ont pris leurs fonctions    «Dynamiser les investissements pour un développement global»    Le point de départ d'une nouvelle étape    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Etrange «Etranger»
Littérature. Trois romans autour de Camus
Publié dans El Watan le 02 - 11 - 2013

Il y avait eu ce Camus dans le narguilé (Ed. Après la lune, Paris, 2011) de Hamid Grine où Nabil, professeur de français, apprend qu'il serait en fait le fils d'Albert Camus.
Un prétexte romanesque pour aller sur les traces de l'écrivain. Sans promotion, ce premier roman de Grine publié en France, mais le deuxième à évoquer Camus après Un parfum d'absinthe (Ed. Alpha, Alger, 2010), a réussi, un moment, à se placer parmi les meilleures ventes de la Fnac. Et voilà que sortent trois romans d'écrivains algériens qui, d'une manière ou d'une autre, mettent en scène Camus ou son œuvre. Bien sûr, la coïncidence avec le centenaire de la naissance d'Albert Camus (7 novembre 1913, à Mondovi, près d'Annaba), ne peut relever d'un simple hasard éditorial. Il y a, également, la polémique engagée autour de l'écrivain avant et durant le Cinquantenaire de l'Indépendance de l'Algérie, animée notamment par un Michel Onfray plus véloce que philosophe. Tout cela a sans doute influé sur ce désir d'apporter des voix algériennes à la circonstance car, n'est-ce pas, rien n'est plus frustrant que d'entendre parler de soi et des siens sans pouvoir se prononcer.
Ainsi, paraissent trois œuvres aux angles de vues, procédés narratifs et styles différents, mais qui, autant par leurs sorties quasi-simultanées que leurs inspirations, se rejoignent sur une vision «autochtone», pour reprendre ce mot si connoté dans l'histoire coloniale. On y compte Aujourd'hui, Meursault est mort de Salah Guemriche, paru en version numérique et qui débute le jour de l'exécution du personnage de L'Etranger (lire page XX). Vient ensuite Le Dernier été d'un jeune homme de Salim Bachi (Ed. Barzakh, Alger, 2013, et Flammarion en France). Le romancier se glisse dans la peau du jeune Camus pour envisager ses certitudes, ses doutes et ses dilemmes (lire page XX). Enfin, toujours chez Barzakh, le roman de notre confrère, Kamel Daoud, Meursault, contre-enquête (lire page XX).
Deux premières choses à souligner. L'incluant même dans leurs titres, deux de ces livres portent sur Meursault, l'assassin de «l'Arabe» dans L'Etranger, comme pour indiquer que c'est surtout cette œuvre majeure de Camus qui interpelle car paraissant la plus évocatrice de l'affrontement réel que l'histoire a engendré. La deuxième chose tient aux destins éditoriaux. Salah Guemriche, qui vit et publie régulièrement en France, n'a pas encore trouvé d'éditeur dans ce pays. Salim Bachi, également expatrié, inscrit depuis longtemps au catalogue Gallimard, s'est vu bizarrement publié chez Flammarion, devenue filiale de son éditeur.
Relégation de l'auteur ou prise de distance vis-à-vis du roman ? Finalement, c'est Kamel Daoud, seul des trois à vivre en Algérie, qui s'en tire le mieux. Son roman, édité chez Barzakh, le sera aussi prochainement en France, aux éditions Sabine Wespieser, et ses traductions en anglais et en italien sont déjà lancées. Avec Meursault, contre-enquête, son parti pris fictionnel est radical puisqu'il donne vie au personnage du frère de «l'Arabe». Ce faisant, il met fin à l'anonymat dans lequel Camus avait plongé la victime de Meursault et rétablit, en quelque sorte, le cours de l'histoire (et de l'Histoire), tout en mordant sur l'Algérie d'aujourd'hui. Une œuvre assurément décapante. Guemriche se distingue par son sens de la rhétorique, son humour de controverse et l'érudition de ses sources.
Lui aussi nomme «l'Arabe» et invente son fils, personnage principal de son «essai-fiction». On peut penser ici à d'autres univers qui se sont emparés de L'Etranger : le cinéma avec Luchino Visconti (1967) et Zeki Demirkubuz (Cannes, 2002) ; la B.D. avec Jacques Ferrandez (2013) : la chanson avec Killing an Arab de The Cure… L'œuvre a donc déjà échappé à son auteur et a même été entre les mains de G. W. Bush en 2006, quand d'autres Arabes anonymes mourraient en Irak. Rien de plus attendu donc que des Algériens, directement concernés, en proposent leur lecture.
La preuve aussi que Meursault est, tout de même, une star de la littérature mondiale, malgré ou grâce à son insignifiance et son indifférence. Bachi, pour sa part, réussit une performance en s'immergeant dans le jeune Camus, privilégiant l'écrivain-personnage. Mais il opte pour une démarche implicite, peut-être imposée par le procédé intimiste qui paraît parfois justificatif, tandis que Daoud comme Guemriche mettent l'œuvre de Camus devant ses responsabilités. Tous trois, encore, charrient de belles écritures, réjouissantes quant à la vivacité de la littérature algérienne. Tout trois, enfin, révèlent leur connaissance et reconnaissance de l'écrivain. D'ailleurs, Guemriche énonce en dédicace : «En hommage à Albert Camus».
Mais, dans cette admiration, ils ne pardonnent pas le manque de reconnaissance de l'Autre et, notamment, de son aspiration à la liberté, pourtant essentielle chez le nobélisé. En fait, ils replacent Camus dans l'histoire, devant ses non-dits et ses hésitations face à l'horreur coloniale et, concomitamment, remettent l'histoire dans l'œuvre de Camus en redonnant au meurtre de l'Arabe son épaisseur historique. Ils montrent que Meursault n'est pas qu'un agent du hasard dans un monde de non-sens, mais porte, selon l'expression de Guemriche, du «sens sur les mains».
En «réécrivant» Camus, ils affirment en quelque sorte : «L'Autre, c'est nous». Et ils expriment alors bien cette dualité lucide entre l'élan et la critique qui est celle de nombreux lecteurs et lectrices de Camus en Algérie.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.