Une vague de dénigrement s'acharne sur les élus et responsables politiques d'origines maghrébine et africaine en France. Il ne se passe pas un jour sans que des noms soient jetés en pâture à l'opinion publique par des propagandistes d'extrême droite. Christiane Taubira et Faouzi Lamdaoui en sont les victimes les plus édifiantes. Paris (France) De notre bureau Christiane Taubira, ministre française de la Justice, est l'objet depuis plusieurs semaines d'une campagne de racisme affiché. Elle a été successivement assimilée à un singe par Anne-Sophie Leclère, tête de liste Front national (FN) aux municipales à Rethel (Ardennes), dans un photomontage diffusé sur France 2 le 17 octobre 2013, et traitée de guenon, le 25 octobre 2013 à Angers lors d'une manifestation d'opposants au mariage pour tous, par une fillette de dix ans au cri «La guenon mange la banane». Il aura fallu que le socialiste Jean Glavany interpelle le gouvernement, exprime sa honte et sa révolte pour que les députés républicains, de gauche et de droite, apportent leur soutien à la ministre. Faouzi Lamdaoui, conseiller du président de la République française, militant de la diversité et de l'égalité citoyenne, est victime, à son tour, d'un «bashing» en règle, déclenché par un article pour le moins tendancieux de Charlie Hebdo, qui semble alterner les fausses révélations et les insertions mensongères, en montant en épingle une histoire de pain au chocolat qui aurait été demandé par M. Lamdaoui à un officier de sécurité. Le policier et son collègue n'auraient trouvé que ce prétexte risible pour se venger d'une éviction pour d'autres raisons. Laurent Léger, auteur de l'article, n'en est pas à son coup d'essai. Il a fait des enquêtes sulfureuses sa spécialité. Il s'est déjà illustré, dans le passé, par des articles consacrés à Azouz Begag quand il était ministre délégué à l'Egalité des chances et à Yazid Sabeg quand il était commissaire à la diversité. La diversité culturelle peine à percer Compagnon historique de François Hollande, proche parmi les proches avec Stéphane Le Foll et Michel Sapin, Faouzi Lamdaoui, depuis sa prise de fonction à la présidence de la République, travaille à la promotion de l'égalité et de la diversité. Il est notamment à l'initiative du concert pour la tolérance du 14 juillet 2013 au Champ de Mars, qui a connu un succès retentissant avec 1,5 million de spectateurs, et de l'émission «Parcours gagnant» sur France 2. Il est un relais incontournable entre l'Elysée, la société civile, les banlieues et les quartiers populaires. L'esprit maurrassien soufflerait-il de nouveau sur la braise ? Les vieux démons de l'ostracisme traquent un symbole de la diversité, s'acharnent sur leur proie et la livrent, sans autre forme de procès, au délire populiste. L'extrême droite, en embuscade, ramasse les prébendes électorales. La diversité culturelle, partout présente dans la vie quotidienne, peine à percer le plafond de verre du pouvoir. La technocratie régnante protège jalousement ses privilèges. Le politiquement incorrect est désormais un code de conduite politique, et le tir à vue sur les quelques dirigeants franco-maghrébins et franco-africains, sortis de l'ombre, est devenu le sport favori des antidémocrates.