Lieu plein d'histoire sur les civilisations qui s'y étaient succédé depuis la nuit des temps, aujourd'hui totalement oublié, La Casbah de Annaba, que les riverains appellent la citadelle, somnole au bord de la Seybouse et au pied de l'Edough. Elle se mire dans l'eau calme de la Méditerranée avec à ses côtés Aïn Yacine, enterrée par des mains barbares et incultes. Riche et secrète de son passé, toujours aussi belle et discrète, La Casbah avait été l'une des plus étonnantes constructions réalisées sous le règne des Hafsides d'Abou Zakaria Ibn Abi Ishak à la fin du XIIe siècle. Située en plein centre de Annaba, face à une vieille ville pavée, aux douves en brique rouge et vastes tours en clochetons, La Casbah impressionne. L'ampleur des dégâts Son histoire est faite de légendes et de mystères. Durant l'occupation française, la cité s'était transformée en un îlot de rennaissance et les autorités de l'époque n'hésitaient pas à engager d'importantes dépenses pour garder en l'état ce patrimoine culturel. Quarante-deux années après l'indépendance, de changement en changement et de dégradations en dégradations, ce patrimoine a fondu. Seule demeure, comme un témoin immortel, l'enceinte de cette citadelle. Détruite par les Espagnols au XVe siècle, elle fut restaurée par les Turcs. Aujourd'hui, à l'exception de cette enceinte, tout a disparu : les vestiges qui avaient fait la grandeur de La Casbah, son palais et sa résidence situés à proximité des cours fleuries, ses placettes charmantes et ses rues tortueuses. Ce que l'on doit venir admirer en ce lieu, ce sont ces petits chemins escarpés, source d'inspiration des poètes. C'est aussi l'intimite presque chaleureuse de cette citadelle avec ses murs et ses sols gardant encore les traces de meubles en bois sombre. Ce sont des fresques, ou ce qui semble l'être, émouvantes que l'on n'a pas pu sauver de l'oubli et de la destruction. C'est cette façade que l'on croirait vêtue de figures chimériques et de sculptures en plein air que l'on aurait pu transformer en musée. On arrive même à admettre le fait que ce groupe d'architectes de divers pays d'Europe de passage à Annaba, du mois de juillet dernier, à l'invitation de l'ordre des architectes algériens, n'a pas pu disposer de plus amples renseignements sur cette construction quarilatère avec une forme de proue de bateau. La Casbah de Annaba est une suite de rêveries d'architectes de l'époque ayant conçu dans leur imaginaire tout le royaume d'une dynastie dont la grandeur ne devait jamais finir. C'est aussi une merveille, une vitrine de l'art turc à son apogée. La citadelle, contre l'oubli La beauté lasse, dit on, et pourtant ce n'est pas le cas lorsque l'on s'accorde le temps d'écouter les murs de cette citadelle parler, gémir et se plaindre de l'oubli de ceux qui auraient dû penser à sa réhabilitation ou en faire un musée. Le regard du touriste de passage s'userait peut-être, mais il ne pourrait s'empêcher de lire les épopées que la citadelle, ses deux mosquées et les habitations mitoyennes ont vécues. Ce touriste peut concevoir une visite dans cette cité imprenable de Djebel Abed comme étant une étape vers d'autres lieux tout aussi historiques à l'image de la vieille mosquée Boumerouane, dont la construction par Abou Leïth El Bouni remonte au tout début du IIe millénaire. Cette mosquée garde à l'intérieur, dans des sépultures bien entretenues, ses premiers témoins comme, outre son créateur, Zemmouri, Raïs M'hamed Ben Guita et le premier imam Abou Marouane. Des califes, des sultans, des savants, des hommes de lettres et même les frères Barberousse y ont séjourné. Légèrement en retrait à l'ouest, la basilique St-Augustin, un autre lieu de civilisation et d'histoire. Un lieu de séjour paisible qui représente en même temps un long résumé sur Hippone éternelle, l'une des meilleures haltes avant de s'engager sur le chemin des Numides, Romains et Vandales.