Trente ans après avoir été « lauréat du deuxième prix de la fête des cerises, édition de 1974 », tenue à Larbaâ Nath Irathen, un arboriculteur sexagénaire a tenu à participer à la récente édition organisée du 23 au 26 mai au centre culturel H'cène Mezani. Il se dit « très heureux que la fête reprenne. J'espère que cela augure une relance réelle de la production des cerises et la prise en charge des préoccupations des fellahs ». Notre interlocuteur se rappelle de cette dernière fête « avec les troubles et les incidents ayant causé trois morts parmi la population ». « Depuis cette dérive, que des éléments étrangers avaient orchestrée sciemment, la fête des cerises avait perdu de son attrait jusqu'à sa disparition. Même le cerisier avait commencé à péricliter. Et le parasite ravageur s'est installé pour décimer le cerisier de toute la région », se rappelle notre interlocuteur avec amertume. « A cette époque, nous écoulions des dizaines de tonnes de cerises. Des revendeurs, venant notamment de l'est du pays, nous achetaient de grosses caisses », précise cet exposant qui, à présent, n'a que deux cageots à présenter à la vente à 200 DA/kg. D'autres agriculteurs participants n'ont pas manqué d'interpeller Rachid Benaïssa, ministre délégué au Développement rural qui a inauguré la fête, au sujet de l'accès « très bureaucratisé » aux aides publiques et au traitement de la cerisaie locale et à l'éradication du parasite incriminé (le capnode). Le directeur des services agricoles avance que « dans le cadre du Fonds national de la régulation et du développement agricole (FNRDA), la cerise est l'espèce la plus soutenue avec 250 DA le plant et 42% de la cerisaie nationale se trouve à Tizi Ouzou ». Si le rendement actuel est de 22 q/ha, selon le DSA, la cerisaie a failli disparaître de la région dans les années 2000 « à cause des conditions climatiques et du parasite qui n'a pas été traité ». Les statistiques montrent parfaitement ce désastre : de 19 000 q en 2001, la production de la cerise, dans la wilaya de Tizi Ouzou, a chuté à 12 000 q en 2002, pour atteindre 4200 q en 2003 et moins de 3000 q en 2004. Cerisaies ravagées Une légère reprise a été enregistrée en 2005 avec 4600 q. Notons aussi que le rendement à l'hectare a, lui aussi, dégringolé de 22 q/ha en 2001 à 5 q/ha en 2005. Mais cette année, les services agricoles s'attendent à bien meilleure récolte variant entre 15 000 et 20 000 q. Mais la relance de la cerisaie a du plomb dans les ailes. Ainsi, dans le cadre du FNRDA, un investissement de plus de 10,3 millions de dinars, dont 7,6 millions de dinars de soutien public, visait l'objectif d'une extension de la cerisaie de 69 ha (13 800 arbres). La réalisation a été d'une cinquantaine d'hectares (10 000 arbres) avec un investissement de plus de 4,9 millions de dinars, dont le soutien public était de 3,89 millions de dinars et cela a bénéficié à 108 agriculteurs. Les services agricoles précisent surtout que « les nouvelles plantations de ces six dernières années représentent 25% de la superficie des arbres à noyau ». Conscient de l'importance de la cerisaie pour l'économie et l'image de la région, le président d'APC de Larbaâ Nath Irathen a noté, lors de son allocution, que « notre commune est heureuse de la reprise, de la renaissance et de la réhabilitation de cette fête, éclipsée pendant plus de 30 ans ». S'adressant au ministre ainsi qu'au wali, Mostefaï Chaâbane s'est fait écho des préoccupations des agriculteurs locaux qui attendent aide et assistance technique. Sans être concret dans ses réponses, M. Benaïssa reconnaît qu'il y a eu beaucoup de difficultés, mais se dit convaincu de la relance de la cerisaie. Quant à la question du traitement du cerisier, le ministre affirme, en substance, que « le dispositif et l'argent du traitement existent, les moyens peuvent être mobilisés, mais il y a un problème de fond : on ne peut pas traiter chez un agriculteur et ne pas le faire pour les autres ». Mais, d'ici-là, les arboriculteurs attendent que leurs cerisiers fleurissent.