Les chercheurs algériens n'échappent pas à la paupérisation dans laquelle baignent les enseignants et autres cadres et fonctionnaires de l'Etat. Ils sont eux aussi victimes d'une politique salariale « restrictive » et trop « prudentielle », pour reprendre l'expression utilisée par l'un d'eux. Abdelmadjid Sidi Saïd, secrétaire général de l'UGTA, parle, quant à lui, de délaissement. « Le chercheur se sent à l'écart, complètement marginalisé, à la recherche de sa place dans la société et dans le développement du pays », déplore-t-il, lors de la 2e Conférence du syndicat national des chercheurs permanents (SNCP), ouverte hier au centre de développement des technologies avancées de Baba Hassan, à Alger. Tout en mettant en relief l'importance et le rôle des chercheurs dans le développement socioéconomique, le patron de la centrale syndicale estime qu'il faut revaloriser leurs salaires qui, selon lui, « frisent l'indécence ». Il s'engage d'ailleurs à inscrire les revendications des chercheurs, après concertation avec leur syndicat, à l'ordre du jour de la prochaine tripartite. Semati Zoghbi, président du SNCP, indique que la grille des salaires des chercheurs algériens est la « dernière » au Maghreb. « Un chercheur permanent dispose d'un revenu mensuel de 30 000 DA (300 euros), alors que l'assistant en Mauritanie perçoit un salaire équivalant à 50 000 DA », lâche-t-il avec désolation avant d'ajouter qu'« un chercheur débutant commence chez nous avec une mensualité de 25 000 DA, c'est-à-dire 250 euros. Un chercheur du même grade perçoit 700 euros en Mauritanie, 1200 euros au Maroc et j'en passe. » M.Zoghbi se demande comment peut-on garder ces chercheurs avec des rémunérations pareilles ? Selon lui, l'Algérie a déjà perdu suffisamment de chercheurs qui sont partis à l'étranger. « En 1999, nous étions 2700 chercheurs permanents. Aujourd'hui nous ne sommes que 1300 », souligne-t-il, regrettant qu'« en dépit de ce phénomène de fuite des cerveaux, le gouvernement n'arrive toujours pas à briser le mur psychologique et à donner des mensualités décentes à ces chercheurs, ce qui en reste du moins ». Comptant sur l'appui de la centrale syndicale, le président du SNCP envisage de porter les revendications des chercheurs aux plus hautes autorités du pays. « S'il faut saisir personnellement le chef de l'Etat, nous le ferons », tonne-t-il. En plus de leurs maigres salaires, les chercheurs algériens souffrent du problème de logement et du manque de moyens matériels nécessaires pour leur travail. L'Algérie compte 21 centres de recherche répartis à travers le territoire national ainsi que quelque 500 laboratoires. Ces entités de recherche dépendent de plusieurs institutions, notamment de l'Intérieur, de la Santé, de la Défense nationale... Cela rend difficile le travail du syndicat, car il n'y a pas un seul interlocuteur avec qui l'on peut négocier. La centrale syndicale s'engage ainsi à peser de tout son poids à même de garantir aux chercheurs une vie décente leur permettant de se consacrer entièrement à leur travail. En attendant, les chercheurs se perdent dans leurs dures conditions de vie.