Dans cette région riche en sites naturels et touristiques, où les hameaux sont perchés à plus de 1000 m, les habitants sont en quête permanente d'une bonbonne de gaz, cédée à des prix prohibitifs, surtout l'hiver. Quand il pleut ou il neige à Ouled Driss, toutes les sources taries par le soleil de l'été retrouvent vie et donnent une eau limpide et abondante qu'aucun obstacle ne peut retenir. Champs arables et vergers qui sentent l'odeur de la terre, s'ouvrent en ruisseaux qui s'étendent jusqu'aux confins de la ville de Souk Ahras. L'eau en percutant la pierre donne un son agréable. Ses cerises et ses figues, dont la réputation n'est pas à prouver, sont vendues sur pied, avant la récolte. Ses sites paradisiaques, ses forêts, ses eaux thermales, l'hospitalité de sa population, une route nationale réhabilitée et élargie…sont autant d'atouts révélés quotidiennement à ses visiteurs. Et pourtant, sa population estimée à 12000 âmes, ne profite guère de ces potentialités. Le chômage ronge ses jeunes, plusieurs mechtas réclament l'alimentation en eau potable et les routes et les projets pour l'investissement durable se comptent sur les doigts d'une seule main. En voulant crânement résumer ce travail journalistique, nous nous sommes retrouvés face un véritable dilemme : faudrait-il résumer l'essentiel de notre visite en quelques paragraphes ou lâcher le stylo pour décrire les richesses d'une région, ô combien, sous-exploitée ? Arrivé à proximité d'une station-service à l'entrée du chef-lieu de la commune, nous avons constaté le passage de plusieurs tracteurs et autres véhicules qui transportaient des bonbonnes de gaz butane dont certaines on été vendues sur la route nationale. Il faut dire que le froid est irrésistible dans certains endroits et en particulier dans certains hameaux perchés sur des montagnes où l'altitude culmine à 1200, voire à 1400 mètres. C'est dire toute l'importance du raccordement au gaz de ville et/ou l'implantation d'un point de vente permanent du gaz butane. Selon la cellule de communication, Ouled Driss a été raccordée au gaz de ville à 40%. A quelques dizaines de mètres de notre première escale, c'est le centre de la commune. Des cafés bondés à craquer, des jeunes oisifs qui observent les passants, sinon rasent les murs dans un interminables va-et-vient, des passants qui vaquent à leurs affaires et un commerce qui semble dans le marasme. Encore une scène de déchargement de gaz butane par un mastodonte qui appelle trois de ses connaissances pour leur signifier d'un hochement de tête de passer prendre la «marchandise». Renseignements pris auprès des citoyens, des prix prohibitifs sont souvent pratiqués en hiver par ces commerçants occasionnels. Une récente compétition-randonnée en VTT organisée par l'académie sportive de la wilaya de Souk Ahras, a permis aux participants d'explorer les sentiers ombragés et de contempler la nature dans son état originel. Ils ont aussi découvert à leurs dépens qu'il n'existe aucun espace aménagé pour accueillir le visiteur, et ce, à des kilomètres à la ronde. Les citoyens ici, ont eu vent du projet d'un complexe touristique que devait lancer un promoteur natif de la région, et compromis par une affaire d'espace routier incessible, menée par la direction des travaux publics. Quand l'eau vient à manquer Ce réservoir d'eaux pluviale, minérale et thermale, a connu l'année en cours plusieurs protestations notamment aux mechtas El Fedden, G'sar Laâtach et Bouamira. Cette dernière fait partie des hameaux des plus pauvres. Les 50 foyers qui s'y trouvent sont dépourvus d'eau et de route malgré la fertilité du sol qui se distingue par l'existence de plusieurs hectares arables. «Nous sommes confrontés au problème d'eau dans une commune où il suffit d'un minimum de volonté pour transformer ces étendues en jardins producteurs de fruits et légumes», a déclaré un fellah de la région. Et un autre d'ajouter : «Voyez-vous ces étendues rocailleuses et stériles, elles sont capables d'alimenter tout le pays si les responsables décident un jour d'encourager la plantation d'arbres fruitiers». Cet avis est partagé par Yazid Hambli, ingénieur-agronome et président de la Chambre d'agriculture. «Nous oeuvrons pour la création d'une pépinière à Ouled Driss, une commune prometteuse en production des fruits et légumes et où toutes les conditions climatiques sont favorables à son essor dans le domaine», a-t-il indiqué avant d'affirmer que seulement 10% des potentialités de la région sont exploitées. Les cultivateurs locaux qui demeurent peu initiés aux méthodes modernes, arrivent, bon an, mal an, à occuper la première place en production des fruits à l'échelle de la wilaya avec, en plus des produits sans fertilisants chimiques. Sur les 33 mechtas, au moins dix réclament l'AEP et certains habitants effectuent des déplacements biquotidiens pour s'approvisionner auprès de puits et sources naturelles. M.Boughrara, un cadre des services de la direction de l'hydraulique, a déclaré à ce sujet le lancement de travaux de quatre forages importants non loin des hameaux de Majene El Kebch, El Fedden, G'sar Laâtach et Mitou. Le même responsable a mis en relief l'envergure du nouveau barrage implanté à Ouled Ali dans la même commune. S'agissant d'un projet de prévention des inondations, notre interlocuteur a déclaré qu'une enveloppe budgétaire de 60 MDA (million) a été allouée pour sa réalisation. La commune en quête de projets L'enclavement, le manque des infrastructures de loisir, le logement avec ses différentes formules, l'aménagement urbain… sont parmi les autres préoccupations majeures des habitants de Ouled Driss. Le P/APC Ammar Boulebda apporte, ici, sa vision de la situation : «En matière de logement rural, la commune a réussi à attribuer jusqu'à présent 1600 unités en plus de 144 logements sociaux, ceci dit, nous avons enregistré 1500 autres demandes (…) Je peux d'ores et déjà affirmer qu'elles seront toutes satisfaites avant la fin du quinquennat en cours.» Concernant le désenclavement, des dizaines de projets sont enregistrés depuis son investiture à la tête de la commune. Il s'agit, entre autres, de routes en direction des mechtas Sebaâ, Lemragha, Lemsen, Aâch Laâgab et plusieurs autres agglomérations. Le premier édile de la municipalité s'est dit disposé à encourager tout investissement touristique ou autres dans cette région qui recèle des richesse naturelles incommensurables. «Nous sommes disposés à aider avec tous les moyens dont dispose la commune l'investissement (…) Mieux encore, nous nous engageons à faciliter les démarches pour l'octroi de l'assiette foncière pour tout opérateur fiable. Je dois saisir cette occasion pour reconnaître au wali son assistance et sa disponibilité pour toute réalisation d'interêt public», a-t-il étayé avant de citer en exemple la récente implantation d'une entreprise de mise en bouteille de l'eau de Ain Bendaoud, dont les vertus thérapeutiques pour les pathologies rénales ont été avérées. Le maire qui a émis le vœu de renforcer sa commune par un deuxième CEM à El Gueria, l'une des deux principales concentrations urbaines, justifie ce choix par l'existence de plusieurs villages aux sentiers inaccessibles et donc contraignants pour les jeunes collégiens. Retour à Souk Ahras avec plus de conviction que les richesses de la wilaya sont sous-exploitées et qu'on n'est pas forcément joaillier pour parler or.