Que faudrait-il ajouter à un tableau déjà bien sombre ? Rien a priori, la situation en Syrie étant depuis au moins une année qualifiée de catastrophique. Mais a priori seulement, car les organisations internationales toutes aussi sérieuses les unes que les autres étudient la guerre en Syrie pour en relever des aspects peu évidents, mais en fin de compte d'une gravité extrême. Un désastre à tous points de vue. Et ce n'est pas fini, puisqu'en près de trois années la guerre (les guerres devrait-on dire) en Syrie n'a pas fini de causer des dégâts. Ainsi en est-il des enfants syriens déjà victimes du froid, des épidémies, de la faim et de l'exil, ont subi «le plus rapide et le plus net déclin éducatif» jamais vu au Moyen-Orient, ont affirmé l'ONU et plusieurs organisations non gouvernementales dans un rapport publié vendredi 13 décembre 2013. Ou encore, selon la même étude, cette guerre a «inversé les progrès réalisés en plus d'une décennie dans l'éducation», ont affirmé l'Unicef, le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et les ONG Save the Children et World Vision. Selon leur communiqué, environ trois millions d'enfants syriens «ont été forcés de quitter le système scolaire en raison des combats qui ont détruit des écoles, terrifié les enfants au point qu'ils ne puissent plus se rendre en classe ou conduit leurs familles à fuir le pays». Quant au prix du pain, il a augmenté de plus de 500% en deux ans en Syrie et quatre Syriens sur cinq considèrent la nourriture comme leur besoin prioritaire. Autre statistique, un habitant sur cinq au Liban est un réfugié venu de Syrie, selon le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), ajoutant que le petit pays méditerranéen abrite plus d'un tiers des personnes ayant fui la guerre qui ravage son voisin. Pour David Miliband, ancien chef de la diplomatie britannique, «la famine menace une large partie de la population syrienne. Avec les cas de polio et des températures en dessous de zéro, la population syrienne connaît de plus en plus de morts et de désespoir». «Mais, ne manquera-t-il pas de relever, nous assistons à une catastrophe humanitaire qui n'attire pas l'attention du monde». Faute de moyens ? La crise actuelle explique-t-elle tout ? Autant de questions qui ne trouvent pas de réponses, mais rien n'interdit de croire que la Syrie a bel et bien été abandonnée, sinon qu'elle est devenue un champ d'expérimentation. Rapporté au fait que la Syrie enregistrait certains des meilleurs indicateurs sur l'éducation au Moyen-Orient, ce n'est plus là un déclin, mais bien une catastrophe qui privera ce pays d'une relève, ou encore le plongera dans une situation que nul n'ose imaginer, puisqu'il faut ajouter à ce tableau tous les maux liés aux conflits, mais aussi les fractures dans la société faisant parfois oublier l'origine même de ce conflit qui était le soulèvement d'une population contre un pouvoir qui s'opposait à la moindre ouverture. L'émissaire international pense toujours que le pire est encore à venir si les parties en conflit ne s'entendent pas sur une solution politique. «Ce qui menace la Syrie, c'est une sorte de somalisation… plus durable et encore plus profonde que ce que nous avons pu voir en Somalie», a ainsi déclaré Lakhdar Brahimi qui déplorait l'éclatement de l'opposition, l'élément le plus évident étant les combats que se livrent certaines factions. M. Brahimi ne fait en aucun cas dans l'alarmisme, son analyse est d'ailleurs partagée par différents analystes pour qui il est difficile de reconstituer la mosaïque syrienne. L'ONU a en tout cas vu juste en mettant en garde contre la militarisation du conflit syrien. Ses conséquences sont tout simplement catastrophiques.