Précédant de 6 jours celui du Azimut Rock, également nationale organisé du 9 au 12 août 2004 par l'Union nationale des étudiants algériens (UNEA), le Festival national de rap du 3 au 5 août a été clôturé ce jeudi par Driss Boudiba, directeur de la culture de la wilaya. Avec la participation de 25 groupes en provenance de diverses régions du pays, le 2e Festival national du rap de Annaba n'a pas failli à la règle qui veut que la capacité insuffisante du théâtre de Verdure par rapport à la préemption offerte aux spectateurs, sabote quelque peu le succès de la manifestation intéressante par sa programmation. Celle-ci a attiré un public plus large que la clientèle habituelle ayant eu à visiter le Festival de l'habit traditionnel et des arts populaires qui s'est achevé ce 31 juillet. Dès la 1re soirée, les groupes de jeunes rappeurs ont chauffé le théâtre Mohamed Boudiaf. Un son tout neuf pour une musique rétroactive qui, selon ses fans, ouvre la route vers des lendemains résolument chantants. Le son d'ensemble du groupe Haffa hip-hop doit beaucoup aux conceptions de même que la voix du chanteur Azzouz. Avec ses phrases tortueuses, Azzouz évoque une musique rap omniprésente et sublimée. Planète hip... pone La modernité des notes telles que composées réside dans l'originalité de la formule rythmique. Aux antipodes de cette 1re soirée, l'on a suivi avec plaisir la 2e riche en événements et en spectateurs. TNT 23, 9mm, Black Solda, Houl 23 tant de formations de rappeurs qui ont manqué de justesse dans la voix avec en sus des chorus avortés. On était loin de l'audace et de la maîtrise auxquelles ces groupes aspiraient. Comme satisfaction, l'on a eu Dynamite, Le cri du silence, La familia, Houd Killer et Atomic gang qui ont réveillé un public somnolent en abusant de phases modales sur des tempos. Ils ont même réussi à mieux représenter le niveau conceptuel du rap. Avec sa volubilité de tout instant, Rahim Antar, un des jeunes rappeurs du groupe Clan City a su débrider une musique un peu flegmatique du hip-hop en flirtant parfois avec un réel professionnalisme. Avec ses camarades, il s'est engagé sur le chemin de la libre improvisation. La même démarche a été adoptée par les autres formations pour lesquelles il n'est plus nécessaire d'écrire pour créer. Pour elles, festival ou pas, la manifestation consiste beaucoup plus à déconcerter qu'à concrétiser. C'est pourquoi, toutes ont tenté de subvertir une des annexes du temple de la culture implanté sous le ciel étoilé d'août à Annaba. Il y avait des chanteurs tintinnabulant de toutes les cloches, d'autres gazouillant et il y a ceux rugissant, le tout a donné à l'ambiance un aspect véritablement juvénile dont seules les nuits d'été ont le secret Ce n'est pas râpé ! Durant leur prestation, les membres du groupe Dynamite ont donné l'image d'une jeunesse algérienne en pleine chevauchée dans des plaines où la tristesse, la colère, l'indignation, la révolte, la déception et l'incompréhension se mêlent aux désirs de faire, créer, vivre sa jeunesse, s'ouvrir à d'autres communications, s'évader, aimer et espérer. Par la voix et par le geste, ils ont démontré que la musique fragile du rap, mais combien profonde, se couche comme l'herbe sous le piétinement du coursier. Beaucoup de jeunes spectateurs s'étaient agglutinés au 1er rang, les yeux écarquillés, la bouche grande ouverte et la langue pendante. Tout autant que Viking suave et nostalgique, Loop Killeur, Houliginz, Famillia, Last Poets, Maniak, Leaderd ont tous tenté d'emprunter l'ascenseur vers le podium. Ces groupes auxquels l'on ajoutera Immortel City, Break Dance, Gang Boy, Rbone, Deak Men Htm et Bicskoubate ont laissé de côté la surexploitation des poncifs du hop et le scat sans conviction. Ils ont joué le rôle de dépollueurs en donnant des coups de plumeau sur un répertoire rap dont ils ont secoué la poussière. L'enchaînement des thèmes abordés par la majorité des groupes suivant la logique de leur tonalité a installé un climat véritablement rapeur. Dans les paroles, il n'y avait certes pas d'élégance à dire les réalités vécues par les Algériens jeunes et moins jeunes, mais l'érudition et la division se partageaient l'affiche avec beaucoup d'emphase et de références pour donner aux chansons une palette sonore aussi riche que la culture de ce style de musique qu'est le rap.