L'acquittement pour les éditeurs, tel est le verdict prononcé hier par la cour de Constantine dans l'affaire opposant le général à la retraite Mohamed Betchine aux trois éditeurs des journaux El Watan, Liberté et El Khabar, respectivement Omar Belhouchet, Abrous Outoudert et Ali Djerri. L'affaire était en délibéré durant deux semaines, le procès ayant eu lieu le 24 décembre 2013. Les trois responsables étaient poursuivis en justice par le général à la retraite Mohamed Betchine pour diffamation, lequel général avait déposé une plainte le 5 mai 1999, suite à la publication les 13 et 14 octobre 1998, par quatre journaux, à savoir El Watan, El Khabar, Liberté et Le Matin, d'une lettre ouverte de Abboud Hichem. S'ensuivra ainsi une série de procès. En 2008, les trois éditeurs, Omar Belhouchet, Abrous Outoudert et Ali Djerri, avaient été condamnés à 50 000 DA d'amende et autant de dommages et intérêts. Un pourvoi en cassation avait été introduit par les trois éditeurs, et la Cour suprême a cassé le 27 décembre 2012 l'arrêt de 2008 et renvoyé l'affaire devant la cour de Constantine, qui a été examinée de nouveau le 24 décembre 2013. Lors de ce dernier procès, à propos de la publication de cette lettre de Abboud Hichem, Omar Belhouchet dira : « Lors du 10e anniversaire des événements d'Octobre 1988, je reçois une lettre, pas de n'importe qui, signée par Abboud Hichem, qui était à l'époque de ces événements le directeur de cabinet du général Mohamed Betchine. Il était de mon devoir de la publier, d'autant plus que durant ces événements, il y a eu plus de 600 morts et beaucoup de gens torturés, y compris des femmes.» Ali Djerri insistera sur le fait que c'était une contribution à l'histoire lors du 10e anniversaire de ces événements. Quant à Abrous Outoudert, il indiquera : «D'abord, je ne connaissais pas Betchine, je ne l'ai jamais rencontré, malgré cela, en 1995, alors que j'étais dans l'avion pour partir à l'étranger, j'ai été descendu de l'avion et arrêté pour un simple petit papier d'information.» Dans sa plaidoirie, Me Soudani Zoubeir déclarera : «Il ne s'agit pas d'un écrit de journaliste pour lequel le directeur de publication peut être poursuivi, mais simplement d'une lettre ouverte dont l'auteur est identifié, et qui se veut une contribution à un débat.» Il insistera sur le fait qu'il n'y a pas eu de diffamation dans ce procès, dont l'issue la plus logique ne peut être que la relaxe. Me Soudani Zoubeir commentera le verdict ainsi : «C'est une décision qui nous satisfait amplement et qui met fin à une bataille judiciaire qui a duré 15 années et a donné lieu à un jugement, trois arrêts de la cour et deux de la Cour suprême. Pour nous, cette décision consacre le fait que les éditeurs sont tout à fait dans leur mission et leur rôle en publiant des opinions ou des contributions à des débats qui s'imposent à la société. C'est un signal fort que la raison d'être de la presse est incompatible avec tout acte de censure ou autocensure et conforte donc un fondement essentiellement de la liberté d'expression.»