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le Blues de Garagouz
Théâtre de marionnettes. 50 ans d'existence en Algérie
Publié dans El Watan le 11 - 01 - 2014

Il est admis par les spécialistes que le théâtre de marionnettes est le frère aîné du théâtre d'acteur.
En Algérie, depuis qu'ils sont pratiqués par nos compatriotes, c'est plutôt l'inverse : le second a bouclé un siècle d'existence, alors que le premier n'est apparu qu'après l'indépendance. Mais, bien que déjà quinquagénaire, il n'a jamais été démailloté de ses langes de nourrisson parce que le frère aîné a failli à son endroit ! Pire, si sous d'autres latitudes le théâtre de marionnettes a retrouvé ses titres de noblesse, dans notre pays, il est demeuré un puéril amusement pour enfants, statut dans lequel il est tombé au début du siècle dernier quand le cinéma l'a détrôné auprès du public adulte. Mais voyons maintenant le comment et le pourquoi.
Il est vrai qu'en 1963, à la naissance du TNA, il y a eu une velléité de prise en charge du théâtre de marionnettes par le théâtre public. En effet, lors du stage de trois mois ouvert à Sidi Fredj au profit d'amateurs sélectionnés pour renforcer le premier effectif du TNA, un atelier dit d'art plastique avait été institué. Henri Cordereau en eut la charge. Par ailleurs, en 1968, au sein de l'éphémère Théâtre national de l'Ouest algérien (1968-1970), Kaki avait mis en place un atelier d'art plastique dédié à la marionnette et confié à Mohamed Adar, un des stagiaires de Sidi Fredj.
Deux spectacles avaient été montés et largement diffusés à travers les écoles d'Oran et de Mostaganem. Mais, après l'accident de la route de Kaki en 1969, l'affaire tourna court, son principal soutien n'étant plus en poste. De plus, Adar allait être propulsé sur le devant de la scène grâce à son premier grand rôle, celui de Si Ali dans El Khobza. Dans les années 1980, le TRO récidive en relançant la marionnette dans le cadre d'un atelier de théâtre pour enfants. Il fut le seul théâtre d'Etat à le faire, ce qui était insuffisant pour la promotion du théâtre de marionnettes.
Par contre, ce qui fit école, c'est la télévision et le secteur de la jeunesse et des sports. Ce sont eux les «géniteurs» du théâtre de marionnettes qui existe aujourd'hui. A la télévision, à l'époque seul canal que l'on pouvait capter et qui avait une audience sans pareille, l'émission «El Hadika Essahira» (Le Jardin magique) en direction des écoliers ratissait large. Dans son programme, un spectacle de marionnettes avait fait son entrée dès 1963. Il avait pour concepteur Saïd Hamidi, animateur d'une troupe oranaise jusque-là versée dans le théâtre d'acteurs.
Le ministère de la Jeunesse et des Sports disposait d'une école de formation à Tixeraïne (Alger) qui dispensait à ses stagiaires, entre autres disciplines, des cours d'art de la marionnette. Il s'agissait de pourvoir en animateurs les maisons de jeunes et les centres de colonies de vacances. Or, les cadres formés, n'ayant pas vocation à être des hommes de théâtre, s'appliquaient à faire de l'animation avec les marionnettes.
En 1970, un article non signé d'El Moudjahid (28/6/1970) signale que «dans le but de développer l'art de la marionnette en Algérie» et – précision de taille – «d'en faire une véritable école d'éducation et de formation», un Festival international de théâtre de marionnettes aurait lieu à Alger, à la salle El Mougar. Côté participation algérienne, on ne comptait que deux troupes : «Les compagnons de la marionnette» fondée en 1964 par Saïd Hamidi sous l'égide de la Radio télévision algérienne (RTA), et celle de la «Jeunesse et des sports», créée en mars 1970.
Pour la participation étrangère, il y eut de grosses pointures avec, en particulier, Yves Joly, l'une des figures majeures de l'avènement de la marionnette moderne. La participation algérienne fit plus que pâle figure. Si la troupe du ministère de la Jeunesse s'était engagée avec cinq spectacles puisés des contes et légendes algériens, Saïd Hamidi s'était montré plus ambitieux en s'attaquant à une adaptation de La poudre d'intelligence de Kateb Yacine. Mais il réduisit la pièce à presque rien, ce dont témoigne un entrefilet paru dans La République (25/6/1970).
S'interrogeant sur ce qu'il restait de l'œuvre de Kateb Yacine, le chroniqueur anonyme notait : «Peut-être l'idée d'avoir créé une œuvre gentille, un agréable divertissement pour les petits et… les moins petits ? C'est charmant.» Pour sa part, K. Mehdi, dans El Moudjahid (3/7/1970), en le comparant aux spectacles européens, relève ses insuffisances : «Ce sont l'expression et le texte qui priment sur la démonstration ''marionnettiste''.»
C'est-à-dire que Hamidi Saïd a choisi une pièce de théâtre (…) où la parole, inévitablement, prime (…), le texte étouffe le jeu des mains. La preuve est que les manipulateurs durent entrer en scène pour le complément de telle ou telle scène (…).
C'est malheureusement cette pratique de la marionnette qui allait prévaloir majoritairement et se maintenir jusqu'à nos jours, avec l'usage abusif de la marionnette habillée (généralement un comédien accoutré en animal) ou d'un acteur en chair et en os sans que sa présence constitue une valeur ajoutée en matière de création.
L'héritage actuel est somme toute dans la logique des choses car, que ce soit à la télévision ou au sein du secteur de la jeunesse et des sports, ce n'est pas la cause du quatrième art qui a prévalu dans l'exercice du théâtre de marionnettes. Cela est si vrai que l'unique festival de théâtre de marionnettes pendant toute une période, celui de Chlef, se tenait à la faveur de célébrations officielles, ne constituant qu'un supplément d'âme pour les festivités.
Il est évident que si cet art avait été pris en charge par les hommes de théâtre et au sein des institutions théâtrales, il aurait pu connaître une autre fortune. Mais le pouvaient-ils, sachant que ces hommes étaient à la base des comédiens et qu'ils sont devenus dramaturges par nécessité sachant le déficit qu'accusait le théâtre algérien en auteurs et metteurs en scène ? Ils pensèrent d'abord à se mettre en scène, et c'est légitime, plutôt que de servir de pantins.
Un seul se soucia du théâtre de marionnettes et ce n'était pas un hasard, Abderrahmane Kaki qui, lui, était dramaturge de métier. Il s'était déjà illustré en se prévalant de l'ancestralité de Garagouz dont il donna le nom à sa troupe qui monta une pièce intitulée Diwan el Garagouz. Lui savait que la ma- rionnette était un instrument qui avait permis en Europe de repenser le théâtre dans son ensemble, tant pour ce qui est du jeu de l'acteur que de la scénographie et des destinations et significations de l'art théâtral. Lui savait que la biomécanique, chère au grand dramaturge russe Meyerhold (1874-1940), et qu'il avait mise en œuvre dans la Diwan el Garagouz, devait tout au théâtre de marionnettes.
Pour rappel, cette influence remonte loin dans le temps, à l'ère du romantisme, dès la fin du XVIIIe siècle, puis celle du symbolisme, à partir de la moitié du XIXe siècle. La réflexion avait porté plutôt sur le théâtre d'acteurs que sur celui de marionnettes auquel ce dernier était opposé pour des vertus qui, jugeait-on, faisaient défaut au premier. L'art de la marionnette était perçu comme moins maniéré que le théâtre d'acteurs qui, lui, s'était embourbé dans la multiplicité des conventions et le formalisme. En Allemagne, Goethe voyait dans le théâtre de marionnettes un moyen de régénérer l'art dramatique.
En France, Charles Nodier vante la pureté primitive de la marionnette pour souligner la décadence du théâtre d'acteurs et sa perversion par l'idéologie au pouvoir. George Sand pousse plus loin l'exigence. Pour elle, la marionnette à fils, qui cherche à imiter l'acteur n'est pas authentique, jugeant que celle qui fait le plus illusion est celle qui est la plus éloignée du modèle humain. Au début du XXe siècle, l'avènement du cinéma supplanta le théâtre de marionnettes auprès des adultes. Il devint, depuis, un amusement pour enfants.
Les avant-gardistes, au début du même XXe siècle, s'y intéressèrent mais en orientant leur regard, cette fois, du côté de la marionnette asiatique. Ainsi, Paul Claudel s'extasie en 1926 dans une lettre au professeur Miyajima Takashi sur le fait que, contrairement à l'acteur qui reste un être déguisé, la marionnette n'a de vie et de mouvement que celles qu'elle tire de l'action. Gaston Baty, qui fut en 1927 un des fondateurs du cartel des avant-gardistes avec Louis Jouvet, Charles Dullin et Georges Pitoëff, s'était mis en tête de «re-théâtraliser» le théâtre grâce à la marionnette en l'éloignant du réalisme. Le Britannique Edward Gordon Craig, qui cherchait à sortir le théâtre de l'enlisement conformiste, forgea sa théorie de la «sur-marionnette».
Depuis, mais surtout à partir des années 1990 en Europe, on n'écarquille pas les yeux en entendant parler des marionnettes pour adultes comme c'est encore le cas en Algérie. Les arts audiovisuels, comme la télévision avec le Muppets Show et Les guignols de l'info, pour ne citer que ces derniers, ainsi que le septième art, en ont tiré bien des avantages. Par ailleurs, à travers tout le monde, le renouvellement artistique et thématique du théâtre réalise actuellement ses avancées les plus remarquables à travers ou à partir du théâtre de marionnettes. Maintenant que le théâtre de marionnettes est devenu une source d'inspiration et de créativité dans le monde, et sur tous les supports, pourquoi n'en serait-il pas de même en Algérie ?
Il y a grand intérêt, pour les femmes et les hommes de théâtre à la recherche du renouveau, de tourner leur regard dans sa direction. D'autant que dans notre pays, le théâtre de marionnettes est en train de se départir, bien que timidement, d'une pratique archaïque passant à la marionnette sur table, au théâtre d'objet, au théâtre noir, à la manipulation à vue et à la transformation du manipulateur qui s'est mué sur scène en acteur-partenaire de la marionnette.
En effet, et plus que pour tout art, la «festivalisation» de la vie culturelle en Algérie a permis au théâtre de marionnettes de s'extraire de la marginalisation qu'il endurait. Ainsi, avec le Festival national de théâtre de marionnettes, les compagnies qui activaient isolément dans une pratique archaïque de cet art, sans échanges mutuels, sans lieu de production ni de diffusion dédié au théâtre de marionnettes, ont disposé d'une tribune à même de contribuer à les extraire de l'ornière. Grâce à la valorisation des créations les plus remarquables, tant par les sacres que par diverses autres incitations, un repositionnement de l'activité a commencé à poindre. Cela s'est d'ailleurs traduit par deux phénomènes concomitants. D'abord, une première décantation s'est opérée, mettant en minorité les troupes qui tenaient jusque-là le haut du pavé, activant selon une vision étriquée et dogmatique de l'art de la marionnette.
Ensuite, le mouvement émergeant a entrepris de se démarquer peu à peu de la tendance, jusque-là hégémonique, qui le mettait au service de l'édification morale du jeune public. De la sorte, en renouant avec son essence, l'art de la marionnette est en trai-n d'évoluer vers une pratique qui le libère des œillères aliénantes ayant jusque-là déterminé et structuré son existence. Progressivement, il se met en phase avec la pratique contemporaine à travers le monde.


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