«Avant de partir, il me confia ceci : je vais revivre à travers mes amis et mes enfants». Amis, proches et anonymes se sont rendus par la suite à Izemourene, le village natal du défunt. L'association des activités de jeunes Horizons a rendu, du 31 janvier au 3 du mois en cours, un vibrant hommage au cinéaste Abderrahmane Bouguermouh à l'occasion de la commémoration du 1er anniversaire de sa disparition. Les proches et les amis du défunt se sont retrouvés, samedi dernier, à la maison de jeunes d'Ighzer Amokrane, chef-lieu de la commune d'Ouzellaguen, pour partager avec le public des témoignages sur la vie privée et professionnelle du réalisateur de La Colline oubliée, premier long métrage d'expression berbère. Kamal Tabet, président de l'association Horizons, Medjkoune Hocine, coordinateur de la Kasma ONM, Rachid Beldjoudi, président de l'APC et Hocine Haroun, président de l'APW de Tizi-Ouzou, ont rappelé à l'assistance la contribution des frères Bouguermouh, Malek et Abderrahmane, dans la promotion de la culture amazighe. Une contribution qu'ils qualifient de référence pour les nouvelles générations. Après avoir remercié les organisateurs et les présents dans la salle, l'épouse du disparu a mis l'accent sur le combat engagé par son défunt mari contre le système en vue de concrétiser les objectifs artistiques qu'il s'était tracés. «Son engagement exclusif pour le 7e art a fini par avoir raison de sa santé. Il a galéré pendant 18 ans avant de décrocher l'autorisation de tourner, sans subvention de l'Etat, son premier film en kabyle Comme une âme. Il a réussi à relever le défi malgré les mises à pied dont il a fait l'objet à cause de son obstination à le réaliser en kabyle. Un film dont la bande originale a, malheureusement, disparu». Ali Mouzaoui, cinéaste, a tenu à répondre présent à ce rendez-vous pour parler du film qu'il vient de dédier exclusivement à Aberrahmane Bouguermouh. «C'est un film en français de 66 minutes que j'ai intitulé «Mon ami, mon double». J'y ai comparé sa vie aux quatre saisons. Le printemps, c'était son enfance passée à Sétif où les événements du 8 mai 45 et Ferhat Abbès lui ont ouvert les yeux sur les enjeux de l'époque. L'été, c'était ses études en France. Il pouvait rester à Paris mais il revint au pays, son terrain de lutte, avec un espoir difficile à concrétiser : réaliser des films en tamazight. L'automne concernera l'apogée de son art et l'hiver, son départ. Avant de partir, il me confia ceci : «je vais revivre à travers mes amis et mes enfants», résumera l'auteur de Mimezrane en indiquant qu'il est question dans ce film de concepts philosophiques : amour, mort et absence. «C'est un film extrêmement difficile et très dur à regarder eu égard aux questions existentielles abordées. Bouguermouh y fait figure d'intellectuel brillant et quelques passages ont été puisés de son roman Anza», ajoutera-t-il. D'autres personnalités qui n'ont pas pu être de la partie, à l'image du cinéaste Ahmed Rachedi, ont envoyé des messages qui ont été lus aux présents dans la salle. Amis, proches et anonymes se sont rendus par la suite à Izemourene, le village natal d'Abderrahmane Bouguermouh. Dans ce hameau perché sur les hauteurs de la commune d'Ouzellaguen et faisant face à Ifri, les visiteurs découvriront la maison familiale du cinéaste disparu ou ce qu'il en reste puisqu'une partie s'est effondrée. Da Amar Mamouri avait côtoyé les Bouguermouh avant, pendant et après la guerre d'indépendance. «Cette bâtisse a abrité, en 1956, le secrétariat technique du Congrès de la Soummam. Après l'indépendance, Mouloud Mammeri, Kateb Yacine et Malek Haddad y ont séjourné», apprendra-t-il, entre autres, aux pèlerins. Outre l'exposition de photos et de coupures de journaux retraçant le parcours du réalisateur de Kahla Ou Beïda, la projection de son film La Colline oubliée, le lendemain, à la maison de jeunes et un recueillement sur sa sépulture le lundi 3 février, date anniversaire de sa disparition, ont été au programme.