Karima Nayt, Meryem Koufi, Lina Doran, Iness… Elles incarnent la nouvelle tendance musicale en Algérie et dans le monde. Dans des styles totalement différents, elles balaient les clichés qu'on porte sur la musique algérienne dite actuelle. «Dès que j'ai entendu la voix de Samira Brahmia, à l'époque sur les ondes de la Chaîne III, j'ai su qu'elle ferait carrière dans la musique. Déclare Nasser Hamadi, producteur et chercheur en musiques actuelles algériennes. Samira à une aura incroyable sur scène, son public est très réceptif, qu'il soit en Algérie ou à l'étranger.» Festivals, salles de concert ou petit club parisien, Samira se produit toujours à guichets fermés. Son succès ? Elle le doit à ses textes résolument offensifs sur le plan thématique, laissant au placard les déclarations mielleuses, et s'engageant sur une voie plus réaliste, comme dans sont album Nailiya. Un opus où elle chante en arabe, en français et en anglais : Jdoudna, Between us, Fly away, Je délire, Breakfast with a stranger, Fabuleux destin ou encore Ahmed el djadarmi sont autant de titres qu'elle a revendiqués sur des scènes prestigieuses. Dans un autre registre, mais en point commun la radio, la belle Iness a fait carrière à la radio El Bahdja, puis s'est lancée dans la musique avec Karim Albert Kook. Son album qui s'intitule également Iness (dis-lui en kabyle) est «un mélange de pop rock et des rythmes d'Afrique du Nord. Ce mélange est traduit tantôt par la musique, tantôt par la langue, puisque les chansons ont été écrites en arabe, français, anglais et kabyle. On retrouve évidemment le son bluesy de Karim Albert Kook», déclare-t-elle. Pour cette première expérience, elle s'entoure de Khiredine Mejoubi et Kamel Tenfich de l'ONB, au mandole, le petit-fils de Hadj M'hamed El Anka, Mehrez Smaïl El Anka, Bouabdellah Khelif au violon, Jackie Bouladou et Jean-Louis Foiret, respectivement à la batterie et à la basse. Tremplin «Il y a beaucoup de chanteuses algériennes qui réussissent mieux en France ou en Allemagne, comme Souad Massi, Ines, Manel Felali ou Nadia. Elles encouragent dans leur parcours de jeunes chanteuses à faire le pas et participer à des radios-crochets, ou à des émissions de plus grande envergure, comme ‘‘Star Academy'', ‘‘The Voice'' ou ‘‘Arab Got Talent''», explique Salim Kheznar, musicien multinstrumentiste qui a accompagné durant sa carrière plusieurs chanteuses. Tremplin ou véritable mine pour les producteurs, les émissions que proposent essentiellement les chaînes arabes (telles que MBC) ne sont pas différentes de celles en Occident, on reste dans le registre de la téléréalité, du spectacle et du défi. On se souvient tous des performances de la jeune Dalia Chih arrivée en finale de l'émission «Arab Got Talent» (2012), où elle y interprétait avec brio This is the man's world. Jury, téléspectateurs et public subjugués par la personnalité et le potentiel scénique de Dalia, qui avait à l'époque 14 ans. Avant Dalia Chih, on a tous (ou presque) suivi les journées de Salma Ghazali à la «Star'Ac» libanaise, qui s'était également illustrée en devenant la célébrité que s'arrachent les médias au Moyen-Orient. Cette année, Hayet Zerrouk a choisi l'émission «The Voice» pour chanter Ya Rayah» de Dahmane El Harrachi, une agréable surprise pour le public, et ses fans algériens qui la suivent depuis des années «C'est une telle joie de voir ses demoiselle sur des plateaux comme ça, c'est une véritable fierté, surtout quand elles vont en finale et gagnent. Il faut savoir qu'elles ont entourées d'une équipe technique, de musiciens professionnels et professeurs de chant, une chance pour les débutantes» affirme Salim Kheznar. CM Pour la plupart des artistes, les plateaux ou studios de télévision sont «the place to be» pour faire la promotion de leur album. «Aujourd'hui, avec l'émergence positive des médias sociaux, tous les artistes ont des comptes facebook, twitter, instagram et des chaînes sur youtube pour faire connaître ce qu'ils font et rester en permanence ‘‘connectés'' aux fans», déclare Fahad El Khoury, manager et producteur libanais qui est toujours à la recherche de nouvelles voix dans le monde arabe. «Avant d'engager un musicien, on engage d'abord un CM, indispensable pour l'image», précise-t-il. Mais qu'est-ce qu'un CM ? Le CM, dont parle El Khoury, est l'abrégé de «community manager», une personne (parfois une équipe) qui gère, anime et fédère des communautés sur le web. Une solution pour les uns, une stratégie de com pour les autres, les artistes jouent le jeu et animent parfois leurs propres pages. Lina Doran, Salima Abada, Iness, Samira Brahmia, Dalia Chih ont toutes des profils persos et des pages fans sur facebook. Certaines partagent des photos de concerts, en studios d'enregistrement, d'autres des vidéos et même des photos de famille. Le partage sur les réseaux sociaux n'est pas anodin, il peut être négatif. «Quand une photo de famille se retrouve sur facebook, c'est plutôt mauvais signe. En maîtrisant sa communication, on maîtrise l'image que l'on donne à son public. Ce dernier vous donnera du respect et bien plus», conclut El Khoury. n