Le petit journal» de Canal + récidive avec encore plus de sarcasmes sur l'état de santé de notre Président. Non seulement il est revenu à la rescousse pour montrer qu'il avait raison dans le trucage des séquences de la télévision publique pour camoufler son handicap physique, mais il a poussé très loin la dérision à travers un sketch improvisé pour tourner au ridicule l'incroyable décision de Bouteflika de briguer un quatrième mandat alors que son incapacité à gouverner le pays est flagrante. Un sketch dans lequel la chaise roulante tenait le rôle principal, c'est dire… «Le petit journal» animé par Yann Barthes qui est très suivi dans l'hexagone et ailleurs — en Algérie y compris évidemment — égalant même l'audience (s'il ne la dépasse pas) du «Grand journal», a pris la réputation d'être un magazine satirique qui ne fait pas dans les sentiments quand vous lui offrez l'occasion de vous découper en rondelles. A situation burlesque et grotesque qui choque l'opinion, il répond par une critique féroce qui vous amène à réfléchir sur les situations les plus improbables au lieu d'en rire. Le divertissement est ici conçu comme un édito qui remplace les commentaires de presse les plus pointus. Exactement comme les guignols de l'info mais dans un tout autre style. Tous les acteurs publics, qu'ils soient des politiques, des artistes, ou des sportifs craignent comme la peste ce petit canard qui guette la moindre bêtise ou anomalie pour en faire des sujets de plaisanterie qui font grincer les dents. Il doit son succès populaire à sa sagacité à aller chercher là où il se trouve le détail qui fait mouche, accompagné d'arguments ou de preuves difficilement contestables. Quand il s'était attaqué la première fois à Bouteflika pour mettre à nu le montage technique par lequel on a cherché à dissimuler son impotence dans les audiences protocolaires, il y a eu un tollé de contestation chez nos responsables, dont celui du Premier ministre et du DG de l'ENTV qui se sont empressés de crier au scandale d'une grossière entreprise de désinformation. Yann Barthes serait-il animé de quelques intentions de déstabilisation du régime algérien en montrant ses propres images d'un Président malade, presque figé et ayant du mal à communiquer avec ses interlocuteurs ? Ce serait vraiment aller trop vite en besogne en pensant, comme le font nos dirigeants, que toute critique qui viendrait de l'étranger est forcément malveillante, voire pernicieuse dans son intention de vouloir porter atteinte à la stabilité du pays. La main de l'étranger, quoi !... Le refrain est connu et archi usé pour avoir une chance de se remettre au goût du jour comme au bon vieux temps des années de plomb. Les démentis de nos officiels, qui ont été fortement ébranlés par cette charge inattendu du «petit journal» n'ont cependant convaincu personne parmi les Algériens lambda qui ont suivi avec délectation le contre-trucage des séquences du Président par la télé privée française. La preuve, les réseaux sociaux ne sont pas restés indifférents à cet étalage de la vérité, et se sont bien amusés à leur tour de la politique du mensonge menée par un sérail visiblement en perte de vitesse, de crédibilité, et pris la main dans le sac en flagrant délit de tromperie dans la marchandise. Que vont dire nos officiels offusqués à propos de cette deuxième offensive du «Petit journal» qui a caricaturé à sa manière une démarche présidentielle qui nous vaut raillerie et humiliation à travers le monde. Rien… Ils ne pourront rien dire car en s'accrochant désespérément à son trône malgré une maladie fortement invalidante, c'est le candidat Bouteflika assuré de sa propre succession qui donne matière aux spécialistes de la satire pour lui tailler un costume à sa mesure, et dans la foulée donner de l'Algérie une image exécrable d'un pays livré à la gérontocratie qui veut régner par la force alors que les besoins d'un changement démocratique sont immenses. Le Président qui ne s'est pas adressé au peuple depuis son accident cardio-vasculaire est-il conscient de la tache noire qu'il va inscrire dans l'histoire en refusant l'alternance qui pourrait ouvrir des perspectives radieuses à notre société ? Que veut-il prouver en faisant un passage en force pour immortaliser sa présence à la tête de l'Etat, alors qu'il évolue dans les arcanes du Pouvoir depuis l'âge de 25 ans quand il avait été nommé ministre de la Jeunesse et des sports. Bouteflika a tout connu avec l'Algérie. Il a occupé de multiples postes de responsabilité avant d'être porté vers le plus haut. Il a côtoyé tous les grands de ce monde. Et il fait trois mandats dont un de trop après avoir révisé la Constitution dans ses articles portant sur la limitation des mandats. En agissant ainsi, il avait déjà brisé le rêve que nous avait laissé Zéroual, celui de voir enfin notre pays entrer dans la réalité démocratique par un jeu de l'alternance qui commence par le sommet. Sellal qui a été l'un des artisans de ce forcing présidentiel parle, lui,… d'un capital expérience inestimable pour l'avenir de l'Algérie. En plus de ses facultés intellectuelles qui sont supérieures à celles des Algériens, Bouteflika serait donc un gage d'expérience qui nous est indispensable pour les cinq années à venir, et peut-être plus pourquoi pas. Les autres candidats ne pourront donc pas soutenir la comparaison car ils manquent d'expérience. C'est un peu comme ce jeune diplômé chômeur qui n'arrive pas à trouver du travail parce qu'on lui demande de l'expérience. Mais comment acquérir cette expérience si on ne lui donne pas l'occasion de travailler… La vision de Sellal, décidément, ne fait pas rire, même pas les caricaturistes tant elle est violente dans le mépris de l'autre.A. M.