Des enseignants universitaires, leaders d'opinion, joignent leur voix à celles qui s'opposent à un quatrième mandat pour Bouteflika. Ils appellent la communauté universitaire à s'impliquer dans la lutte pour un changement réel dans le pays. Des enseignants à l'université d'Alger observeront, aujourd'hui à l'intérieur de la faculté de Bouzaréah, un sit-in contre le maintien du système et la reconduction du Président sortant pour un nouveau mandat. Dans un appel lancé hier à l'adresse de la communauté universitaire, ces enseignants-chercheurs disent être animés par la volonté d'agir pour éviter le pire au pays. Leur démarche, première du genre, est motivée par le danger qui guette le pays, lequel patauge dans une situation de blocage politique inédite. Parmi les premiers signataires de cet appel, on trouve des sociologues à l'image de Nacer Djabi, Fatma Oussedik, Madani Safar Zitoun, Zoubir Arous et Mustapha Madi, des politologues tels que Mohamed Hennad, Rachid Tlemçani, des historiens comme Mohamed El Korso (ancien président de la Fondation 8 Mai 1945), Mustapha Nouicer et Abdelhamid Bourayou, des linguistes comme Taleb Khoula El Ibrahimi, des critiques littéraires comme Ahmed Cheniki et des spécialistes en communication tels que Achour Fenni. Un concentré d'intellectuels qui ont l'habitude d'intervenir dans des débats publics pour analyser les questions d'actualité et d'intérêt national. Ces intellectuels considèrent que l'Algérie mérite «un autre avenir» que celui façonné par les détenteurs du pouvoir. Ils rejettent les arguments des promoteurs du 4e mandat selon lesquels le Président sortant «est le garant de la stabilité» et la situation actuelle peut entraîner l'Algérie «vers le drame d'une déstabilisation aux conséquences désastreuses». «La rengaine d'une prétendue stabilité nous est servie depuis quinze ans !» précisent-ils. Ces enseignants refusent de rester passifs devant «une scène politique marquée par la corruption, la violation des libertés, le viol de la Constitution, la négation de la volonté populaire, la dilapidation des richesses du pays et la transformation des institutions de l'Etat en comités de soutien pour le maintien de l'autocratie». Pour eux, il y va de l'avenir du pays, et en tant qu'intellectuels ils veulent assumer leurs responsabilités en agissant pacifiquement pour provoquer le changement espéré par des millions d'Algériens. Ils soulignent qu'ils ne peuvent rester indifférents devant «un système finissant qui a acheté, achète et achètera la paix sociale en dilapidant les profits de la rente pétrolière afin d'endormir et contrôler les Algériens, asseoir sa mainmise sur les richesses du pays et perpétuer un système vieillissant, à l'image de son chef que l'on veut nous imposer pour plusieurs années encore». Ces enseignants s'élèvent non pas contre le 4e mandat mais tout le système. «Il ne s'agit ni d'un quatrième mandat ni d'un cinquième, voire d'un énième, ni même d'un quelconque candidat», soutiennent-ils. Pour forcer le destin, ils appellent la communauté universitaire à se mobiliser pour exprimer son refus de la perpétuation de ce système et pour l'instauration d'un Etat civil libre et démocratique respectueux de la volonté populaire. Avant ces enseignants, les étudiants de plusieurs universités avaient manifesté ces dernières semaines contre le 4e mandat.