Une semaine après son lancement, la campagne électorale pour la présidentielle ne parvient pas à sortir du ronronnement et de la sinistrose. Hormis les meetings et l'ambiance de kermesse dans lesquels les cinq candidats et les représentants du président sortant semblent avoir tout investi, rien ou peu de chose rappellent que l'on est à moins de vingt jours du scrutin. L'indifférence manifeste des citoyens vis-à-vis de ce que des jeunes – plus soucieux des exploits «footballistiques» du célèbre Barça espagnol – qualifient avec le scepticisme chevillé au corps de «match joué et gagné d'avance». Surtout devant les moyens considérables déployés par l'appareil de l'Etat au seul profit du président sortant. Ce désintérêt, perceptible à l'égard de l'événement, cache mal sans doute ce que sera l'après-17 avril : une inquiétude largement partagée. Notamment à la suite de la réaction des représentants et de tenants du pouvoir, à travers des propos hostiles et d'une violence à peine voilée face à ceux qui appellent au boycott du scrutin prochain. Les réactions d'Ahmed Ouyahia et consorts donnent la mesure de ce que sera un pouvoir autoritaire, renforcé dans sa conviction qui n'a d'égale que cette volonté à passer en force à tout prix. Les révisions constitutionnelles avancées ou les grandes réformes annoncées à cor et à cri par les hommes et supporteurs du système actuel ne parviennent pas à écarter la crainte de voir le pouvoir évoluer vers une «démocrature», ersatz de l'autoritarisme que l'on connaît, habillé de quelques alibis démocratiques pour servir de faire-valoir aussi bien pour la «consommation interne», si l'on peut dire, que pour l'étranger. Entre autres, le principe de la liberté d'expression auquel on aurait pris soin d'en réduire, comme disent les marins, sérieusement la voilure, comme on pu le constater, encore une fois, avec la loi sur l'audiovisuel, n'autorisant que la création de chaînes thématiques excluant les généralistes ou encore celles d'information continue. Tout, pour le système, concourt à entretenir en quelque sorte l'illusion que le régime, dont il en serait l'émanation, répondrait aux «standards démocratiques». Illusion perdue puisque tant que le système n'aura pas admis l'idée d'une transition vers l'alternance, basée sur les choix des citoyens, toute tentative de replâtrage ne servira pas à grand-chose et ne contribuera en rien à mettre le pouvoir à l'abri de crises majeures. C'est ce qui risque encore une fois d'arriver s'il persiste dans son entêtement.