Les réapparitions du chef de l'Etat agacent. Alors qu'il s'est éclipsé depuis plusieurs mois, Abdelaziz Bouteflika multiplie, depuis quelques jours, les initiatives (épistolaires) occupant ainsi un espace médiatique, particulièrement en cette période de campagne électorale. Ce traitement de faveur des médias publics n'a pas laissé indifférents les cinq autres candidats à l'élection présidentielle. Les représentants de ces derniers au sein de la Commission nationale de surveillance de l'élection présidentielle n'ont pas tergiversé avant de faire connaître leur mécontentement, et ce, en envoyant des lettres de protestation aux responsables des médias publics et à la Commission de supervision du scrutin. «Nous ne contestons pas le fait que le président de la République exerce ses prérogatives. Il est de son droit de s'adresser aux Algériens. Ce que nous contestons est l'utilisation de ces messages présidentiels en période de campagne électorale», relève Fateh Boutbig, président de la Commission nationale de surveillance de l'élection présidentielle. Le représentant du candidat Abdelaziz Belaïd dénonce ainsi une confusion entre le candidat Bouteflika et le chef de l'Etat. «Il est anormal que les médias publics consacrent une tranche horaire de plus de 20 minutes au journal télévisé alors que les autres candidats n'ont droit qu'à quelques minutes», ajoute encore Boutbig. Ce dernier s'insurge contre le fait que les responsables concernés n'aient pas daigné répondre au courrier de la Commission de surveillance de l'élection. «La Commission de supervision va se réunir pour étudier nos requêtes», atteste-t-il. La Commission de supervision de l'élection, composée de magistrats, est chargée de veiller au respect des lois lors de la campagne électorale. «La Constitution et le code électoral n'interdisent aucunement au chef de l'Etat d'exercer ses fonctions en période électorale», justifie, pour sa part, Belkacem Sahli, représentant de Abdelaziz Bouteflika au sein de la Commission de surveillance de l'élection. Pour le secrétaire général de l'ANR, «il n'y a aucune confusion entre l'activité présidentielle et la campagne du candidat, qui est menée par des personnalités politiques». «A mon avis, ces candidats tiennent ce discours parce qu'ils sont incapables de mobiliser», ajoute Sahli, un brin provocateur. «Question purement juridique» Les plaintes des représentants des autres candidats à l'élection présidentielle ne s'arrêtent pas aux messages du chef de l'Etat. Il y a quelques jours, des membres de la Commission de surveillance de l'élection ont dénoncé l'usage des biens de l'Etat par des personnalités, notamment des ministres, qui font campagne pour le président-candidat. «La Commission de supervision nous a répondu pour nous demander des preuves !» révèle Boutbig. Une chose difficile à apporter, surtout que ces ministres se déplacent avec toute l'escorte nécessaire à leur fonction. «Je garde uniquement mes gardes du corps», s'est défendu récemment Abdelmalek Sellal, directeur de campagne du président-candidat, qui s'est exprimé sur une chaîne de télévision. Des cas d'affichage anarchique au profit du candidat Abdelaziz Bouteflika ont également été signalés par les autres candidats. La commission, que préside le juge Lhachemi Brahmi, s'est saisie de ces plaintes. Mais, questionné récemment par El Watan, le président de la Commission de supervision refuse de se prononcer sur des questions politiques. Interrogé sur l'absence de Bouteflika de la campagne, M. Brahmi répond : «Si vous abordez la question sur le plan politique, la commission n'a aucune réponse. La préservation de sa crédibilité la met dans l'obligation de s'abstenir de tout avis lié à la politique. Elle est là pour faire appliquer la loi et rien que la loi.»