Ce n'est plus un épiphénomène, c'est une véritable hécatombe sur nos routes : les accidents de la circulation sont devenus quotidiens et de plus en plus dramatiques. Ce sont pas moins de 4000 personnes qui décèdent chaque année sur les routes et des milliers d'autres qui sont blessées, parfois même handicapées.En dépit des mesures répressives prises par les pouvoirs publics afin de réduire ce fléau, les statistiques des accidents de la route sont à un niveau alarmant, classant même notre pays parmi les pays les plus dangereux dans le monde en matière de sécurité routière. En milieu urbain, le bilan établi par la Direction générale de la Sûreté nationale montre bien cette tendance à la hausse des accidents entre 2012 et 2013. Le nombre d'accidents est passé de 17 170 à 17 363, soit une hausse de 193 accidents (+1,12%). Les pertes humaines ont, elles aussi, augmenté de 82 victimes (de 710 à 792). «Le bilan est certes inquiétant, mais par rapport à l'évolution du parc automobile et à l'étendue des routes, il n'y a pas eu un boom en matière d'accidents, et ce, grâce à notre présence sur le terrain», analyse Naït El Hocine, sous-directeur de la prévention routière et de la circulation à la DGSN, qui déplore l'augmentation des pertes humaines et des blessés durant la même année. S'il n'est pas sans ignorer la responsabilité de l'état de certains véhicules et de celui des voies dans ces accidents, le facteur humain (dans 95,97% des cas) est la principale cause de l'hécatombe sur les routes. La Sûreté nationale attribue ces accidents à l'inadvertance des piétons et des automobilistes, au non-respect du code de la route et notamment à l'excès de vitesse. Selon les statistiques de la police, les piétons ont été à l'origine de 1446 accidents en 2013. Les pouvoirs publics s'emploient depuis des années à peaufiner une politique de lutte contre l'insécurité routière, en vain. Si pour certains, la condition essentielle pour que les accidents baissent est que les conducteurs eux-mêmes prennent conscience du danger encouru et changent de comportement sur les routes, la Police nationale appelle à agir de manière globale en faveur de la sécurité routière. Pour la DGSN, «la lutte contre l'insécurité routière doit nécessairement s'inscrire dans un concept de coproduction de la sécurité». «Ce concept fait appel à l'implication des parents, qui doit être confortée au niveau de l'école, en matière d'éducation routière», estime notre interlocuteur. Outre le rôle que doivent jouer les parents, la DGSN demande l'intégration de la matière «éducation routière» dans le cursus scolaire. «Cette matière est prévue par les dispositions de la loi, mais celles-ci n'ont jamais été appliquées», regrette notre interlocuteur, qui rappelle que son institution a maintes fois interpellé à ce propos le ministère de l'Education nationale. La police préconise, par ailleurs, de revoir la manière avec laquelle est assurée la formation des candidats au niveau des auto-écoles. Le permis à points toujours attendu «D'après nos statistiques, il y a insuffisance au niveau de la formation dans les auto-écoles. La qualité de la formation est mauvaise», selon l'officier de la DGSN, qui prend soin de préciser que «la majorité de ceux ou celles qui sont à l'origine des accidents de la circulation sont des jeunes de moins de 25 ans». Selon les statistiques établies par la Police nationale, ils étaient 3813 jeunes de 18 à 24 ans, impliqués dans les 17 990 accidents survenus en 2013. Cela dit, la DGSN préconise la création d'une structure placée sous la tutelle de la chefferie du gouvernement pour élaborer la stratégie de lutte contre l'insécurité routière. Pour le haut responsable de la police, «le Centre national de prévention et de sécurité routière ne dispose pas des moyens nécessaires pour assurer le rôle de concepteur et de coordinateur de la politique nationale en matière de sécurité routière». «Il faut une structure capable de coordonner l'ensemble des activités des intervenants dans la sécurité routière», a-t-il estimé. A ses yeux, la lutte contre l'insécurité routière appelle l'implication de tout le monde, le mouvement associatif, les travaux publics, les transports, l'éducation, les parents… En attendant, même la mise en place du permis à points, considéré par certains comme l'unique solution, à ce fléau, n'a pas encore vu le jour. «Les textes existent, mais l'opération n'a pas commencé», révèle l'officier de police. Pour la DGSN, «le permis à points a toujours constitué une proposition législative et réglementaire régissant la sécurité routière. Ce système offre l'avantage de disposer d'un outil à la fois répressif (retranchement de points jusqu'à l'invalidation du permis) et pédagogique (formation pour les conducteurs pour la récupération des points perdus)». Seulement, pour son application, il faudra encore attendre que les fichiers nationaux des contraventions, des permis de conduire et des cartes grises soient faits. Ce qui n'est encore le cas !