La zone industrielle Rouiba-Reghaïa s'étale sur une superficie de 1000 ha. C'est l'une des plus importantes zones du pays, qui regroupe 202 unités en plus de celles nouvellement installées sur les extensions à l'entrée de la ville de Rouiba, face au cimetière. Des discussions que nous avons eu avec des responsables d'unités industrielles, il ressort que la zone est plus ou moins bien organisée. Facilement accessible à partir de l'autoroute (RN5) et dotée de voies de circulation assez larges, celles-ci permettent un mouvement relativement facile des marchandises. « Du côté commodités, on ne se plaint pas. Il y a l'éclairage, l'eau des forages, le téléphone et le réseau d'assainissement » nous a déclaré un cadre d'une entreprise publique qui a préféré garder l'anonymat. Pôle industriel du centre du pays, la zone de Rouiba totalise plus de 27000 travailleurs avec près de la moitié à la seule usine de la SNVI. Là les travailleurs gardent le souvenir de l'époque où ils étaient « 18000 environ, nous dit-on, « avant que ne souffle le vent du libéralisme qui a induit la compression des effectifs ». « Les problèmes des travailleurs de la SNVI sont ceux de tous les travailleurs algériens : les salaires, les promotions, le manque de transparence... » nous a dit un employé qui s'approche de la retraite et qui craint « pour l'avenir de (sa) progéniture tant le pouvoir d'achat est très faible ». Si les deux secteurs, public et privé, continuent à co-exister à la zone industrielle de Rouiba qui peut être assimilée à un modèle en miniature du tissu industriel national, il y a une nette prédominance de ce dernier et « rares sont les entreprises étatiques qui n'ont pas été sérieusement ébranlées » selon des témoignages recueillis sur place. En effet 70% des entreprises qui s'y trouvent appartiennent au privé, selon une source proche de l'organisme chargé de la gestion de cette zone, Gestimal (ex -EGZIB). Parmi les entreprises publiques qui se portent bien on cite l'ENGI (gaz industriels), ANABIB, GTP (grands travaux pétroliers) et BATICIM (ex-Batimetal) entre autres. Royal (jus) et l'IMC (industries médico-chirurgicales), du secteur privé, sont avancées comme deux autres entreprises qui se frayent une bonne place parmi les grands. Handicaps à plusieurs niveaux Si la quasi totalité des entreprises publiques implantées à Rouiba « doivent s'adapter au nouvel ordre économique ou disparaître » parce qu'elles ont leurs propres difficultés, celles qui se portent mieux et qui ne semblent pas du tout menacées n'en ont pas moins des problèmes. L'indisponibilité de la matière première ou sa cherté, les taxes douanières « très élevées pour la matière d'importation », les difficultés de commercialisation des produits industriels, l'inexistence de possibilités de formation continue pour les personnels qualifiés et les gestionnaires sont autant d'handicap devant le développement des activités de nombreuses boites. « Pour ce qui est de la formation, ça commence à changer un peu. Un changement imposé bien entendu par le nouvel environnement économique. Des entreprises, dont la notre, envoient maintenant des travailleurs en formation régulièrement. Elles le font parce qu'il s'avère qu'on ne peut plus se doter de nouveaux équipements si nous n'avons pas le personnel qualifié apte à le faire fonctionner » témoigne un cadre de l'ENAG. Un autre travailleur de cette entreprise aborde le problème des ressources humaines où l' « on enregistre un manque de compétence et un déficit en matières d'encadrement ». « A la différence de l'époque de l'économie dirigée, maintenant il faut être apte à suivre de très près afin de réviser ou revoir, chaque année si nécessaire, sa stratégie » ajoute-t-il. L'un des autres problèmes auxquels sont confrontées certaines entreprises, du secteur public surtout, demeure celui du marché informel. « Des gens importent ou produisent ici même en Algérie des produit de moindre qualité, ou de qualité douteuse dans beaucoup de cas, qu'ils proposent à des prix défiant toute concurrence. Ces gens n'ont pratiquement pas de charge, ce qui leur permet de ‘casser' les prix. Il faut un état fort qui veille sur les intérêt et les droits de tous les citoyens honnêtes pour que l'économie puisse obéir à ce qu'on appelle l'ordre mondial » un dirigeant d'une entreprise spécialisée en mobilier. Dans la zone, nous avons rencontré des transporteurs (camionneurs) qui se disent « lésés » par l'interdiction qui leur est faite d'entrer le jour dans les villes, Alger surtout, et d'emprunter l'autoroute. « Nous sommes ainsi obligés d'attendre ici jusqu'à la tombée de la nuit. Il nous arrive de venir ici très tôt le matin et d'attendre le soir pour repartir. Mais les investisseurs ou les commerçants n'ont pas de temps à perdre. Ce qui fait qu'ils fassent appel à des moyens de transport de petit tonnage, à notre détriment » nous a déclaré un jeune conducteur d'un semi remorque qui attendait devant l'entreprise nationale du Bois (ENAB).