La reconduction de Abdelaziz Bouteflika pour un 4e mandat n'a pas eu d'effet anesthésiant sur la société civile. Bien au contraire. Plusieurs acteurs du mouvement associatif et des syndicalistes ont réussi à organiser un regroupement, hier, à la Maison des syndicats de Bab Ezzouar (est d'Alger). Les organisateurs de cette réunion veulent engager un large débat entre militants à l'effet d'élaborer une feuille de route les regroupant autour d'un strict minimum comportant notamment «la lutte pour le changement pacifique et démocratique». «L'Etat de droit, la démocratie réelle, la séparation effective des pouvoirs et des élections libres et transparentes», ont été les grands axes débattus. Salah Dabouz, président du bureau national de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH, à ne pas confondre avec l'aile de Benissad), indique que «l'objectif de cette initiative est de créer un espace ouvert de large débat et de concertation pour les organisations, les mouvements et les syndicats, afin de faire converger leurs efforts pour la concrétisation des libertés individuelles et collectives, et pour l'émergence d'un Etat souverain». Pour lui, «la Constitution est violée par le pouvoir. Elle ne renferme que des slogans». «Il faut militer pour la mise en place de mécanismes pour que la gestion démocratique du pays soit réelle et non fictive», a-t-il ajouté. De son côté, Kadour Chouicha, coordinateur national du Syndicat des enseignants du supérieur solidaires (SESS), explique que «la société civile est appelée à se fédérer autour de ce strict minimum, sans que cela soit synonyme de création d'une nouvelle organisation ou d'un nouveau mouvement. Chaque acteur restera indépendant». Rachid Malaoui, président du Snapap, souligne que «le militantisme pour la consécration des libertés et des droits humains est un travail à long terme. Les syndicats et les mouvements doivent comprendre cependant que c'est une fois leurs droits politiques arrachés que l'on peut espérer des améliorations dans différents secteurs d'activité. Il faut dépasser le cadre corporatiste de la contestation». Abdelwahab Fersaoui, président du Rassemblement action jeunesse (RAJ) n'exclut pas le dialogue avec toutes les forces politiques du pays : «Les vrais opposants aspirent au changement pacifique. Il est temps qu'ils convergent vers le même but.» Large débat sans clivage idéologique Des contacts sont entrepris pour élargir la base de discussion. Kadour Chouicha souligne que «les idéologies et les sensibilités partisanes ne peuvent être discutées. L'objectif est de focaliser sur le strict minimum, notamment après la concrétisation de l'Etat de droit». Rachid Malaoui estime que «celui qui aspire au changement de manière individuelle ne pourra pas avancer. Une fois l'Etat de droit obtenu, c'est à ce moment-là que l'on pourra débattre d'un projet de société». Enfin, un communiqué sanctionnant la réunion «condamne avec la plus grande vigueur la répression féroce des marches pacifiques commémoratives du Printemps amazigh ; l'incarcération injustifiée et inadmissible de Kadi Mohand (militant du RAJ) et d'un citoyen tunisien ; les harcèlements et intimidations qui se multiplient à l'encontre des journalistes, des militants et des citoyens ; la situation d'isolement et de crise dans laquelle est confinée la population de Ghardaïa».