Plusieurs syndicats autonomes prévoient de réunir, dans les prochains jours, leurs structures respectives à l'effet de débattre des actions et des décisions à prendre concernant leurs revendications. Si dans les pays dits démocratiques, la Fête du travail se veut festive, en Algérie celle-ci sera célébrée dans un contexte, encore une fois particulier, de tension sociale liée aux préoccupations des salariés en matière d'emploi, de conditions de travail et de violation des droits syndicaux. Les promesses avant l'élection présidentielle par les pouvoirs publics aux travailleurs de certains secteurs demeurent toujours hypothéquées. Du coup, le risque d'une explosion sociale planera toujours sur le pays. C'est à ce titre que beaucoup de syndicats autonomes prévoient de réunir, dans les prochains jours, leurs structures respectives à l'effet de débattre des actions et des décisions à prendre. Les pouvoirs publics n'ont jamais amorcé ni négocié un vrai dialogue autour des revendications socioprofessionnelles des travailleurs. Surtout avec les syndicats autonomes qui, malgré leur forte mobilisation dans nombre de secteurs, restent ignorés par le pouvoir politique. Sauf rares exceptions, depuis la promulgation de la loi 90-14 régissant l'activité syndicale et le dialogue social en Algérie, le mouvement syndical autonome a toujours buté sur le refus des pouvoir publics d'ouvrir un dialogue comme le stipulent pourtant les lois sociales. En dépit de ces textes de loi, le pluralisme syndical dans notre pays demeure de façade. Un leurre. Le monopole revient au syndicat du pouvoir, l'UGTA. Pourtant, les Snapap, SNPSP, CLA, CNES, Snapest, Cnapest, Satef, pour ne citer que ceux-là, sont présents dans pratiquement tous les domaines d'activité et sont souvent plus combatifs que les organes de l'UGTA. Cependant, la liberté de manœuvre et de décision de ces syndicats autonomes dérange le pouvoir, qui préfère mettre en scène le dialogue social de façade duquel les travailleurs restent très largement absents. Clonage «La pratique syndicale en Algérie va très mal», résume Yamina Meghraoui du Snapap qui, pour illustrer cet état de fait, appelle, à la veille du 1er Mai, à la réintégration des syndicalistes du secteur de la justice suspendus depuis deux ans et privés de leurs droits sociaux (salaire, allocations familiales et sécurité sociale). Plusieurs syndicalistes ont été poursuivis en justice ou suspendus arbitrairement ces dernières années. Leur seul tort : leur appartenance à des syndicats autonomes. Les syndicats autonomes sont diabolisés. La syndicaliste du Snapap pousse le triste constat plus loin : «Il y a un problème de restriction des libertés de façon générale, une atteinte aux libertés démocratiques.» Pour le président de SNPSP, le combat est encore très long : «On ne s'attend pas à grand-chose par rapport aux libertés syndicales.» S'il est vrai que sur le terrain, les syndicats autonomes ont toujours réussi leur démonstration de force, ils ne sont cependant pas encore parvenus à constituer un véritable front d'opposition. Le pouvoir a, jusque-là, réussi à affaiblir leur action unitaire. «Le problème est qu'il y a un clonage de syndicats autonomes, à chaque fois qu'un syndicat s'impose on lui crée un frère jumeau. On fragilise les syndicats en remettant en doute leur efficacité», analyse Yamina Meghraoui. Le premier responsable du Snapest, Meziane Meriane, pour qui «les libertés syndicales dans notre pays n'évoluent pas», préfère parler de «verrouillage de la part du pouvoir central». «Au niveau des relations de travail entre l'administration et les salariés, la liberté d'appartenance et l'activité syndicale constituent la pierre angulaire de l'exercice concret du droit syndical. Chez nous, il n'est que théorique», a-t-il regretté. Ainsi, pour lui, «le recours à l'arsenal juridique et aux ponctions sur salaire des fonctionnaires lors des actions de protestation réduit à zéro l'activité syndicale». Il estime qu'«il ne sert à rien de proclamer le droit syndical sans reconnaître aux syndicats les moyens de leur action, pourtant garantis par la convention 87 du BIT, ratifiée par notre pays en 1962». Meziane Meriane qualifie, par ailleurs, la situation sociale actuelle de «peu reluisante malgré les augmentations salariales» car «le pouvoir d'achat est toujours laminé par une inflation galopante incontrôlée».