Le signalement d'un abus sexuel ou physique sur mineur ne vise pas à obtenir la condamnation de l'auteur, mais au moins à protéger l'enfant en danger. L'identification et la dénonciation de l'auteur de mauvais traitements à l'égard d'un enfant, qu'ils soient physiques ou sexuels, sont des actions d'abord morales qui doivent faire partie des mœurs d'une société qui aspire au bien-être de sa composante humaine. Dans cette optique, l'établissement hospitalier psychiatrique (EPH) Frantz Fanon de Blida, sous l'autorité de la direction générale de la prévention et de la promotion de la santé relevant du ministère de la Santé et de Réforme hospitalière a organisé, récemment, un séminaire-atelier sur la protection de l'enfance contre le crime et la délinquance. Deux thèmes ont été dégagés : «Répertoire des situations de violence envers les enfants» et «Besoins en formation autour du signalement et de la prise en charge», pour être étudiés en ateliers. Dans son exposé, le médecin légiste du CHU Frantz Fanon, Sofiane Haroual, a rapporté, chiffres à l'appui – puisés d'une étude rétrospective à caractère descriptif portant sur 324 cas de violences physiques et sexuelles dont ont été victimes des mineurs, pris en charge durant l'année 2013 –, que 98% des consultations sont liées aux abus sexuels. Une communication sur le thème «Signalement : problématique et procédure» a été donnée par le docteur Faïza Mousli, qui a mis l'accent sur la protection contre toute forme de violence dont doivent bénéficier les enfants, conformément au droit international des droits de l'homme fondé sur le respect de la dignité humaine de chaque individu. Le Dr Mousli a insisté pour que les professionnels, à travers leurs consultations médicales, témoignent de l'ampleur du problème lié à la violence faite aux enfants dans notre pays. Pour cela, la conférencière a interpellé les intervenants pour s'opposer aux comportements et aux croyances qui présentent la violence comme inévitable ou inoffensive. Elle a signalé aussi que la mobilisation de la volonté politique reste nécessaire pour mettre fin à cette violence. L'intervenante, même si elle reconnaît que les moyens sont minimes, reste convaincue qu'une part importante de la démarche doit être accordée au signalement. Comme le souligne le Dr Mousli à juste titre, le signalement d'un abus sexuel ou physique sur mineur est différent d'un dépôt de plainte puisqu'il ne vise pas à obtenir la condamnation de l'auteur, mais à protéger un enfant en danger. La non-dénonciation est une complicité «Le signalement reste un tabou à transcender», estime le docteur Chaabane de l'EPSP de Mouzaïa. Pour lui, ne pas faire part d'un abus sexuel peut être considéré comme une attitude complice avec l'agresseur. Au cours des débats en atelier, les participants ont partagé leurs expériences sur le terrain et apporté des témoignages bouleversants de cas de maltraitance physique et d'abus sexuels à l'égard des enfants. Un psychologue de la commune de Meftah (Blida) révèle qu'il reçoit en moyenne, dans sa consultation, trois à quatre enfants victimes d'agressions sexuelles par jour. Généralement, ces actes sont commis dans le cadre familial, dans la rue ou le voisinage. Un autre témoignage, celui d'une participante de Boufarik, rapporte les faits de deux suicides et d'une tentative de suicide d'adolescents suite à des agressions sexuelles. Les retardés mentaux, selon certains intervenants, constituent des proies faciles pour les prédateurs dévastateurs de l'innocence. Les professionnels de la santé ont soulevé le manque d'assistantes sociales, élément important dans certains services de santé, et ce, en vue de prendre en charge les procédures administratives, sociales et juridiques. Le signalement ne peut aboutir sans l'élaboration d'une fiche technique et sans une volonté à tous les niveaux afin de protéger l'enfant, cet adulte de demain.