L'armée régulière déclare une zone d'exclusion aérienne sur Benghazi, alors que la milice du général Khalifa Haftar prépare une autre offensive. Tension. C'est l'alerte rouge en Libye. Au lendemain d'une sanglante attaque aérienne menée par le général à la retraite Khalifa Haftar (qui s'était rebellé contre El Gueddafi) contre des positions de groupes d'ex-rebelles islamistes, dont Ançar el charia, qui a fait au moins 37 morts à Benghazi, l'armée régulière reprend les choses en main. L'état-major de l'armée libyenne a en effet décrété une zone d'exclusion aérienne sur Benghazi, menaçant d'abattre tout avion militaire survolant la zone. «L'état-major de l'armée libyenne déclare Benghazi et ses banlieues zone d'exclusion aérienne, jusqu'à nouvel ordre», a indiqué hier un communiqué publié par l'agence libyenne Lana, sans préciser si la décision concernait aussi l'aviation civile. «Tout avion militaire survolant la ville sera pris pour cible par les unités de l'armée (...) et les formations de révolutionnaires» (ex-rebelles), a ajouté le communiqué. C'est dire qu'il règne une atmosphère très tendue dans l'est de la Libye, alors que de graves menaces pèsent sur les chancelleries étrangères à Tripoli, où l'ambassade algérienne a été contrainte de fermer ses locaux hier. A Benghazi, des officiers et des pilotes de l'armée de l'air ont rejoint, vendredi, une force paramilitaire commandée par le général à la retraite Khalifa Haftar pour mener une offensive meurtrière contre des milices terroristes lourdement armées. Bien qu'il ait retiré ses troupes vendredi, le général a précisé hier qu'il était déterminé à poursuivre son opération contre des milices islamistes à Benghazi, classée organisation terroriste par Washington. Haftar, un agent US ? L'armée régulière, qui n'est pas encore opérationnelle, s'en lave les mains du bombardement des positions islamistes et dément toute implication dans ces affrontements que le gouvernement a également condamnés. Autrement dit, le général Khalifa Haftar mène son opération à la tête d'une «armée» parallèle, d'où la décision de l'état-major de déclarer Benghazi zone d'exclusion aérienne. De fait, la sortie des rangs du général Khalifa Haftar suscite moult questions. En Libye, beaucoup pensent qu'il agit pour le compte des Etats-Unis du fait que les milices islamistes ciblées sont marquées de rouge à Washington. Des observateurs suspectent même une volonté du général, qui a passé près de 20 ans aux Etats-Unis, de vouloir opérer un coup d'Etat avec le soutien américain. D'où peut-être cette intervention menaçante de l'état-major de l'armée libyenne pour mettre fin à un éventuel plan de prise du pouvoir. De son côté, le cabinet du Premier ministre démissionnaire, Abdallah Al Theni, a mis son grain de sel en discréditant le coup du groupe de Khalifa Haftar, qu'il a qualifié de «hors-la-loi». Même ces menaces ne semblent pas inquiéter la bande armée. Un porte-parole de la force de Haftar, le colonel Mohamed Hijazi, a demandé dans un communiqué aux habitants des quartiers de Guewercha (ouest) et de Sidi Fradj (sud) de partir. Autrement dit, les hommes du général Khalifa Haftar ne sont pas intimidés par la zone d'exclusion décrétée par une armée non opérationnelle et encore moins par le communiqué d'un Premier ministre en partance. Les deux banlieues ciblées sont connues pour être des fiefs de groupes islamistes qui y occupent des sites militaires et des fermes. Il est donc à craindre que l'armée régulière et la milice du général ne s'affrontent sur le terrain. Ces craintes interviennent sur fond d'impasse politique née du refus des députés de cautionner la décision du Congrès général national (CGN, Parlement) d'élire, le 5 mai dernier, Ahmed Miitig comme Premier ministre.