Les femmes koweïtiennes ont participé pour la première fois, jeudi, aux élections législatives de cet émirat du Golfe persique. Sur les quelque 340 000 électeurs inscrits, il y a environ 195 000 femmes. « Aujourd'hui, les femmes ont gagné en venant voter et je pense qu'il s'agit d'un succès important pour les femmes », a révélé le ministre de l'Intérieur sortant, cheikh Jaber Al Moubarak Al Sabah. « Je crois que je vais pleurer de joie, car c'est un moment historique pour le Koweït. J'espère qu'une femme sera élue », a déclaré Diaâ Al Saâd, une des premières femmes à voter dans la circonscription de Djabriya. Malheureusement, le vœu de cette femme ne sera pas exaucé et il faudra encore attendre pour que cet émirat, plus que jamais partagé entre modernité et conservatisme, cède une once de pouvoir aux femmes. Les Koweitiens semblent satisfaits de cette avancée, mais ils pensent que les femmes ne peuvent pas encore siéger au Parlement. Elles peuvent voter, mais aucune d'entre elles n'est capable de jouer un rôle politique en tant que députée, considérant que le pays vit « un processus de maturation ». En tout cas, la participation des femmes aux meetings électoraux a été particulièrement surprenante. Tous les candidats ont tenté de gagner leurs voix. En allant glisser le bulletin dans l'urne, les femmes voulaient faire un geste plus que symbolique : tenter de dépasser les opinions préconçues masculines et les traditions familiales qui les ligotent. Un combat qu'elles livrent seules, sans grands moyens et sans illusion dans le but de briser un tabou. D'après les résultats officiels du scrutin, diffusés hier, aucune d'entre elles n'a été élue. Les islamistes, vainqueurs de ces élections, constitueront le principal bloc parlementaire de la nouvelle Assemblée. Ils ont remporté à eux seuls, 21 mandats, contre 18 dans l'Assemblée dissoute, gagnant ainsi trois sièges. Ces résultats constituent une lourde défaite pour le gouvernement, estiment les observateurs. La campagne a été marquée par le thème de la corruption et les appels de l'opposition à une réforme du système électoral. Les femmes ont participé massivement à des meetings qui se sont tenus sous des chapiteaux provisoires installés un peu partout dans une capitale couverte d'affiches. Les unes en abaya (robe traditionnelle) ou en hidjab et les autres, généralement plus jeunes, en jeans, la tête nue, elles sont de tous les âges. L'Union européenne (UE) a félicité l'Etat du Koweït à l'occasion des premières élections législatives ouvertes aux femmes. Dans une déclaration rendue publique à Bruxelles, l'UE juge que « ce premier droit de vote actif et passif des femmes » qui représentent 50% de la population constitue « un pas historique » vers le développement et la promotion de la démocratie. Le Koweït est la quatrième des six monarchies du Golfe à accorder le droit de vote aux femmes. Au Bahreïn, au Qatar et dans le Sultanat d'Oman, les femmes disposent déjà de ce droit. L'opposition koweïtienne regroupe des courants idéologiques très divers, unis seulement dans leur rejet de la politique gouvernementale. Les islamistes veulent imposer la charia, alors que les libéraux s'inspirent du modèle démocratique occidental. Les analystes politiques et les quotidiens estiment que le bon résultat de l'opposition risque encore d'aggraver les tensions entre la nouvelle Assemblée et le gouvernement.