Le bilan des victimes de la violence en Irak recensées en juin venait à peine d'être révélé que les chiffres pour le mois de juillet commencé hier, ainsi que les perspectives qu'ils annonçaient, étaient plus sombres. Pour deux raisons au moins. Il y a d'abord la mise en œuvre d'un plan dit de réconciliation qui concerne à vrai dire tous les opposants quoi qu'en dise son auteur, le premier ministre Nouri El Maliki. Et puis l'attentat d'hier relance ce conflit inter-ethnique, parce qu'il a été perpétré dans un quartier chiite de la capitale. Et certains seraient tentés d'affiner leurs analyses pour relever qu'il est contrôlé essentiellement par le jeune imam Moqtada Sadr. Ce qui tend évidemment à brouiller les pistes. En tout état de cause, c'était l'hécatombe hier dans ce quartier connu pour son animation mais qui n'en est pas à son premier attentat. Soixante-deux personnes y ont été tuées et 114 blessées dans un attentat à la camionnette piégée hier matin près d'un marché très animé du quartier. L'attentat, commis à une heure de grande affluence, a provoqué d'énormes destructions autour du principal marché du quartier populeux. Il a été commis, selon des témoins, par une camionnette chargée de produits explosifs, qui avait été garée à seulement dix mètres du marché des fruits et légumes et autres produits. Les sources de sécurité privilégient la thèse de la voiture piégée garée près de l'entrée du marché. Au moins une vingtaine de voitures ont été détruites par l'explosion et de nombreuses ambulances et véhicules des pompiers étaient sur place, deux heures après l'attentat. Les façades de nombreux bâtiments autour du marché ont été éventrées et les bris de verre se mêlaient aux flaques de sang, alors que des voitures particulières continuaient à évacuer les blessés. Et dire que la capitale est supposée être sous haute surveillance avec un dispositif de sécurité en place depuis le 14 juin mobilisant plus de 50 000 policiers et soldats irakiens et des militaires américains. Malgré toutes ces mesures, une députée sunnite Taysir Najah Awad al Machhadani, a été enlevée par des hommes armés, hier à Baghdad avec huit membres de sa protection. L'enlèvement, sans précédent, s'est produit dans le quartier Chaâb, dans le nord de la capitale. Le Front national de la concorde est le principal bloc parlementaire d'Arabes sunnites. Il est représenté par 44 députés au Parlement qui compte 275 sièges. Dans une autre attaque, trois commandos de police ont été tués et deux blessés dans l'explosion d'une bombe à Baghdad Jadida, dans l'est de la capitale, a indiqué une autre source de sécurité. Dans le sud de la capitale et plus précisément à Doura, des habitants, alertés par des odeurs fétides, ont découvert une tombe collective dans une maison en construction. « Six corps en état de décomposition ont été extraits de la maison inhabitée », a déclaré la source de sécurité, sans pouvoir donner de précisions sur l'identité des personnes qui y étaient enterrées. Juillet s'annonce aussi meurtrier que le mois de juin avec 1009 soldats, policiers et civils irakiens tués dans la violence contre 1055 le mois précédent. Si le nombre de tués est stable, en revanche celui des blessés a augmenté de 24,4% à 1771 contre 1423, selon un bilan recueilli auprès de sources aux ministères de l'Intérieur, de la Défense et de la Santé. Mai avait connu un pic avec 38% de personnes tuées de plus qu'en avril. Quelque 19 voitures piégées, contre 26 en mai, 32 explosions d'engins artisanaux contre 65 en mai, trois attentats suicide par des kamikazes portant des ceintures d'explosifs, contre 2 en mai et 24 attaques armées, contre 60 en mai ont été recensées en juin, selon des sources de sécurité. Une nouvelle fois, ce sont les civils qui constituent la très grande majorité des victimes : 887 ont été tués et 1588 blessés contre 932 morts et 1271 blessés en mai, selon les chiffres du ministère de la Santé. Par ailleurs, 79 policiers ont péri et 126 ont été blessés contre 95 tués et 97 blessés en mai, d'après une source au ministère de l'Intérieur. En revanche, les victimes militaires ont nettement augmenté : 43 soldats tués contre 28. Le nombre de blessés est resté stable à 57, a indiqué une source au ministère de la Défense. Depuis 2003, les Irakiens en sont à compter les morts et à constater à quel point leur pays devient plus proche de l'éclatement.